Gonet: l'actualité des marchés au 17 mars

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow +1,55%, S&P 500 +2,24%, Nasdaq +3,70%, Russell 2000 +3,08%, SOX +5,03%, Eurostoxx +4,05%, SMI +1,87%.

Wall Street écoute attentivement Jerome Powell, qui ne semble pas la convaincre. La convaincre de quoi? Que le scénario présenté par la Fed soit crédible, j’y reviens. La Réserve Fédérale des Etats-Unis relève son taux directeur de 25 points de base comme prévu. Hormis James Bullard qui souhaitait 50 points de base, tout le monde est d’accord pour 25 bps au sein du FOMC. Six hausses supplémentaires sont attendues cette année, quatre de plus l’an prochain et aucune en 2024, ce qui nous fait trois hausses de plus sur la période 2022 – 2024 que lors des dernières prévisions. Sur la partie de la taille de son bilan, la Fed nous dit implicitement qu’elle veut accélérer sa réduction dès le deuxième trimestre 2022, on peut envisager un démarrage lors de sa réunion du mois de mai. Sur le front de la croissance, la Fed réduit ses prévisions pour 2022 tout en relevant ses attentes de PCE (Personal Consumption Expenditures). L’invasion de l’Ukraine par la Russie est également abordée, qui est de nature à accélérer l’inflation (pétrole et chaine d’approvisionnement) selon l’institut d’émission.

On l’aura compris, le terme «stagflation» semble de moins en moins chimérique. Et c’est là que le bas (de la Fed) blesse. Jerome Powell s’emploie tellement à tenter de convaincre que la Réserve Fédérale va taper fort pour ne pas laisser l’inflation s’installer que le marché y croit précisément 35 minutes. 35 minutes, c’est le temps qui s’écoule entre 19 heures, l’annonce de la Fed, et 19h35 (j’ai fait maths + à l’école primaire), moment où les indices d’actions se mettent en mode Space-X après avoir rendu un peu de terrain. Dès 19h35, les attentes de hausses de taux se réduisent dans le marché. L’idée fait rapidement son chemin dans les salles de marché que la Fed ne pourra pas appliquer ce calendrier comme elle l’entend. Les incohérences de ses projections, et surtout le quasi désespoir avec lequel Jerome Powell insiste sur la force de l’économie vont dans ce sens.

Résultat des courses, les taux forward prévoient désormais près de 3 baisses de taux dans les trois prochaines années. J’ai bien écrit «baisses». Et quoi de plus doux aux oreilles du marché des actions que l’idée de baisses de taux? C’est donc assez logiquement que les indices terminent leur journée au plus haut de la séance. Rappelons ceci dit que, si les attentes du marché forward s’avèrent justifiées, cela constitue une plutôt très mauvaise nouvelle pour l’économie, et donc le marché des actions à terme. Mais on verra cela plus tard, au joyeux royaume parallèle des actions, on préfère goûter le moment…

L’indice S&P500 (SPX) réalise sa plus forte hausse en deux séances depuis avril 2020. Je l’écrivais plus haut, dans un premier temps, plus ou moins tout ce qui a trait au risque recule après 19 heures, et plus ou moins tout rebondit une demi-heure plus tard, même l’or et le bitcoin, c’est dire si ce marché est «perdu dans la traduction». D’ailleurs la volatilité reste élevée, le VIX (volatilité du SPX) recule de 10% à 26,67, mais ce niveau implique encore et toujours un potentiel certain de mouvements violents et soudains, vers le nord ou le sud. Quoi qu’il en soit, le marché se remet clairement en mode «risk on» et opère de jolies rotations des actions de valeur vers les titres de croissance (pour les taux obligataires en forte hausse on verra plus tard, une chose à la fois svp). Je note de clairs éléments cycliques dans ce marché avec les secteurs de la consommation discrétionnaire et financier qui mènent la danse, accompagnés notamment par la technologie. Et qui retrouve-t-on dans le rôle du vilain petit canard du jour? Je vous le donne en mille, l’énergie, qui semble beaucoup moins prisée depuis peu, le marché est infidèle. Les actions de la défense se prennent également un bouillon monumental, le marché serait-il déjà passé à autre chose? Pas si vite…

Du côté des actions chinoises internet cotées à Wall Street, c’est journée portes ouvertes et champagne à gogo pour les taureaux, les ours sont priés de revenir un autre jour et l’ETF KWEB se met en orbite en décollant de 40%! On assiste à des couvertures massives de positions shorts sur tout ce qui a trait à la Chine, les Long only reviennent dans la danse, mais par la petite porte, la volonté inespérée affichée de la Chine de s’occuper de son marché des actions semble faire des miracles. À ce propos, cette nouvelle posture de Pékin serait-elle un «game changer»? Mais pourquoi pas? A suivre de près en tous les cas…

J’allais oublier, les intérêts acheteurs s’élèvent à plus de 2 milliards de dollars à la clôture du NYSE hier, les taureaux ne semblent pas avoir terminé leur travail.

Sur le front obligataire, bien souvent plus mature et mesuré que son petit frère des actions, c’est le branle-bas de combat. La partie courte de la courbe des taux US bouge agressivement et l’écart entre le 2 et le 10 ans se réduit à 21 points de base. Le 5 à 10 ans passe en territoire légèrement négatif, le message envoyé par le marché des obligations est que, si la Fed va au bout de son programme, elle fragilisera l’économie des Etats-Unis.

Joe Biden accuse Moscou de commettre des «atrocités» en Ukraine, s’engage à envoyer des drones dans le cadre de l'assistance militaire au pays assiégé et qualifie Vladimir Poutine de «criminel de guerre». Un avion russe bombarde un théâtre à Marioupol où des centaines de personnes avaient trouvé refuge, selon le conseil municipal. Selon des responsables ukrainiens, des frappes aériennes ont également touché un bâtiment de la piscine qui servait d'abri, ainsi qu'un convoi d'évacués civils. Les ministres des affaires étrangères du G7 se réuniront en ligne pour discuter de l'Ukraine aujourd'hui. Les ministres de la défense de l'OTAN se réunissent à Bruxelles pour discuter des moyens de renforcer les membres orientaux de l'alliance et d'éviter les retombées de la guerre.

Encore une actualité chargée aujourd’hui, entre la version définitive de l'indice des prix à la consommation européens de février (11h00), la décision de la Banque d'Angleterre sur ses taux à 13h00, puis aux Etats-Unis l'indice Philly Fed de mars, les nouvelles demandes d'allocations chômage hebdomadaires et les permis de construire de février (13h30), puis la production industrielle de février à 14h15.

Adecco: Exane BNP Paribas passe de neutre à sousperformance visant 39 francs. Assicurazioni Generali: Kepler Cheuvreux repasse d'acheter à conserver en visant 20 euros. Holcim: Credit Suisse réduit son objectif de cours de 65 à 58 francs. Nestlé: RBC reste à performance sectorielle avec un objectif de cours réduit de 109 à 96 francs. Renault: Exane BNP Paribas passe de surperformance à neutre en visant 28 euros. Sika: J.P. Morgan démarre le suivi à neutre en visant 333 francs. ThyssenKrupp suspend ses prévisions. Netflix veut essayer de faire payer le partage de mot de passe.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices emboîtent le pas à l’Europe et à Wall Street, Tokyo progresse de 3,46% à la cloche, Hong Kong gagne 6,58% supplémentaires (décidément le pouvoir des mots (de Pékin en l’occurrence) reste au-dessus de la mêlée, la situation survendue d’il y a deux jours aussi), Shanghai avance de 1,4% et Séoul progresse de 1,33%. Le future SPX reprend son souffle et traite à l’équilibre tandis que l’Europe ouvre en hausse de 0,2%, après avoir bondi de 4% hier. L’or est revenu à 1936 dollars par once, le pétrole reste en-dessous de 100 dollars le baril de WTI Light Crude et le billet vert se replie contre euro, la paire évolue à 1,1049 ce matin.

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