L’inflation en trouble-fête?

Axel Botte, Ostrum AM

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La publication de l’indice des prix à la consommation relance le débat sur l’inflation au moment du FOMC.

© Keystone

 

La problématique de l’inflation refait surface à travers les publications américaines des prix à la consommation et à la production à la veille du FOMC. Lors de son intervention devant le Congrès, Jerome Powell invoquait la «confiance» quant au processus de désinflation pour justifier l’allègement monétaire projeté depuis plusieurs mois. Or, ces anticipations de réductions de taux sont la clé de l’embellie des marchés depuis l’automne dernier. Le resserrement des spreads s’est même accéléré la semaine passée, tant sur les marchés de dettes souveraines que du crédit dans la phase de rebond des taux. Le dollar regagne du terrain, y compris au détriment du yen japonais toujours sensible à l’incertitude sur la date du relèvement de taux évoqué par la Banque du Japon. Ce rebond du billet vert ne cache pas la ruée vers l’or (2’160 dollars l’once), et plus encore les cryptomonnaies dont la dynamique de bulle spéculative paraît évidente. L’embellie des marchés d’actions se poursuit en Europe et, à un degré moindre, aux États-Unis, où le Russell 2000 chute de 2,5%, à l’opposé de la hausse du S&P.

Dilemme de la Réserve fédérale

Aux États-Unis, la croissance devrait avoisiner 2% au premier trimestre, voire 2,3% selon les calculs de la Fed d’Atlanta. La consommation de biens des ménages montre toutefois des signes d’inflexion. Les ventes au détail de février (+0,6%) n’effacent pas la baisse d’1,1% des dépenses enregistrée le mois précédent. L’inflation ressort une nouvelle fois au-dessus des attentes à 3,2% en février. Le coût du logement et, plus généralement, des services hors énergie (5,2%) restent bien supérieurs à celui des biens, quasi-nul. Cela pose un dilemme à la Réserve fédérale dont la confiance dans la normalisation des prix sous-tend la promesse de baisses des taux. Ces publications pourraient retarder le début du cycle monétaire, voire relever le plancher des taux dans les années à venir. La Fed a peu communiqué sur le taux normatif de long terme toujours figé à 2,5%, malgré un environnement international bouleversé depuis 2020. La perspective de taux durablement plus élevés ne serait pas sans conséquence sur le refinancement du Trésor américain selon Janet Yellen. Le FOMC du 20 mars sera sans doute l’occasion de communiquer sur sa politique de réduction du bilan et de confirmer l’orientation des taux. En zone euro, la BCE a publié son nouveau cadre monétaire. Le système de réserves surabondantes est ainsi pérennisé. Le taux de refi, dès le 18 septembre, sera abaissé pour se situer 15pb au-dessus du taux de dépôt. L’institution a également annoncé la mise en œuvre d’un porte- feuille de titres structurel, indépendant de la politique monétaire courante, visant à injecter les liquidités nécessaires à l’activité.

La résilience des actions américaines reste alimentée par les flux captés par les grandes valeurs de la technologie soit 7,6 milliards sur les 56 milliards de dollars d’entrées sur les fonds d’actions américaines. En parallèle, les craintes d’inflation s’expriment de nouveau par une hausse de l’or et des cryptomonnaies. Un scénario de stagflation favoriserait les secteurs associés aux matières premières et raviverait la tendance à la pentification par une hausse des points morts. La structure par terme des anticipations laisse déjà poindre un risque de dérapage des prix au-delà des cinq prochaines années. Le pétrole (85 dollars le baril de Brent) et le cuivre (8’880 dollars la tonne) ont aussi repris le chemin de la hausse. Ces signaux s’accompagnent d’une remontée du rendement du T-note à 10 ans vers 4,30. En zone euro, le Bund s’approche de 2,50%, un niveau d’intervention pour les comptes institutionnels. Les spreads des émetteurs souverains ont aussi marqué de nouveaux points bas. L’OAT à 10 ans s’est échangée à 43pb, alors que le spread du BTP italien fondait sur les 120pb. L’aversion pour le risque reste très réduite sur le crédit également. Le spread du crédit IG en zone euro s’est resserré sous le seuil de 80pb contre swap. Les fonds IG collectent 10 milliards d’euros depuis le début de l’année, contre 15 milliards d’euros l’an passé. Le marché primaire est animé avec un total de 200 milliards d’euros émis en 2024, avec encore 17 milliards d’euros dont 12 de non-financières la semaine passée. L’excès de demande se traduit par des allocations faibles lors des émissions, des primes à l’émission négatives et une pression au resserrement en secondaire. Les facteurs techniques du high yield sont encore plus favorables que sur l’investment grade, avec des flux entrants sur la classe d’actifs et en absence de marché primaire. Le Crossover revient toutefois vers 300pb sous l’effet d’un stress spécifique.

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