Menaces sur le marché des actions

François-Xavier Chauchat, Dorval Asset Management

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Une récession, l’arrêt du robinet de gaz et la crise des secteurs numériques inquiètent les places financières.

©Keystone

Les derniers signes de ralentissement économique ont produit une soudaine révision à la baisse des anticipations d’inflation et de taux d’intérêt pour les prochains trimestres. Les investisseurs en actions doivent-ils s’en inquiéter ou s’en réjouir? Alors qu’un nombre toujours plus élevé d’économistes prévoient que l’accélération de la hausse des taux d’intérêt finira par provoquer une récession américaine en 2023, le scénario implicite des marchés financiers semble s’orienter dans une autre direction. Le récent ralentissement de la consommation américaine, la baisse de certains indicateurs cycliques et la baisse des prix des matières premières industrielles poussent les investisseurs à privilégier la piste d’un fort ralentissement dès 2022. Si ces craintes sont logiquement renforcées par la crise du gaz russe en Europe, elles devraient être au moins en partie compensées par la perspective d’un rebond chinois, mais ce n’est pas le cas. A Wall Street, le ratio valeurs cycliques/valeurs défensives a récemment accéléré à la baisse, le ratio atteignant un niveau qui semble compatible avec un ISM manufacturier autour de 45, soit une récession industrielle.

Banques centrales et investisseurs avancent à tâtons.

Est-ce que Wall Street est en train d’anticiper une nouvelle récession imaginaire, comme ce fut le cas en 2012 lors de la crise de l’euro, en 2016 lors de la crise du renminbi, voire fin 2018? Les prochaines statistiques, dont celles de l’emploi, permettront d’y voir plus clair. En attendant, les marchés obligataires ont eu un rallye extrêmement fort, les marchés révisant à la fois l’inflation anticipée, pourtant déjà basse, et le chemin des taux d’intérêt à court terme à la baisse aux Etats-Unis comme en Europe. En conséquence, les parties courtes de courbe de taux intègrent désormais un pic à environ 3% pour les taux de la Fed en fin d’année, et des taux BCE qui resteraient sous les 1,25% jusqu’au milieu de l’année prochaine.

Ces mouvements rapides et surprenants illustrent à la fois le positionnement extrême des investisseurs sur les marchés obligataires (d’où des rachats massifs de positions vendeuses), et la fragilité des raisonnements économiques en cette période exceptionnelle de l’histoire économique mondiale. Plus que jamais, économistes, banques centrales et investisseurs avancent à tâtons. Pour l’instant une modération de la croissance est observable dans les pays développés, modération qui trouve sa source non pas dans la politique des banques centrales mais sans doute dans l’ajustement automatique de l’économie aux effets délétères de la hausse des prix sur le pouvoir d’achat. Cette modération s’accompagne d’une normalisation progressive des ratios stocks/ventes et des délais de livraison, et donc d’une baisse des pressions inflationnistes cycliques.

Ce scénario de modération semble a priori favorable aux marchés des actions. Trois menaces continuent cependant de guetter le marché des actions. La première est bien entendu celle d’un épisode récessif plus sévère que prévu dès cet été. La deuxième menace est européenne avec le risque désormais très élevé d’un arrêt des livraisons de gaz russe. Et la troisième vient de Wall Street, dont la valorisation relative reste élevée, et reste freiné par la crise des secteurs du numérique.

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