Les actions plongent avant la Fed

Axel Botte, Ostrum AM

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L’inflation et les chiffres de croissance pèsent sur les actifs risqués, faisant du dollar la seule valeur refuge.

©Keystone

L’inflation et le resserrement monétaire agissent toujours comme une chappe de plomb sur les actifs risqués. La Fed et la banque de réserve d’Australie s’apprêtent à relever leurs taux cette semaine. Le S&P termine le mois d’avril en baisse de 9% et le Nasdaq enregistre sa plus forte chute mensuelle depuis le krach de 2008 (-13%). Le plongeon de l’euro vers 1,05 dollars amortit, quant à lui, la baisse des actions sur le continent. Les marchés du crédit sont mal orientés, d’autant que la fermeture du marché londonien lundi incitait à la réduction des positions. Les achats de protection portent le spread de l’iTraxx Crossover au-delà de 430 points de base. Les spreads souverains s’élargissent dans le mouvement général de reconstitution des primes de risque. Le swap spread à 10 ans remonte au-dessus des 80 points de base. Le dollar reste l’unique valeur refuge. Le billet vert se renforce contre toutes les devises majeures. Le yen se situe au-delà de 130 et le yuan s’affaiblit à 6,60 en raison du coût astronomique des mesures de confinement à Shanghai et à Pékin.

L’Europe subit la hausse des coûts de l’énergie au premier trimestre. L’économie italienne se contracte de 0,2%.

La croissance économique s’est infléchie au premier trimestre. L’économie américaine s’est contractée de 1,4% en rythme annualisé sur les trois premiers mois de l’année. La dégradation du solde extérieur retire 3,2% au PIB. La moindre accumulation de stocks pèse à hauteur de 0,8%. Les dépenses publiques, y compris dans le secteur militaire (-8,5%), ont baissé selon les comptes nationaux malgré le soutien à l’Ukraine. En revanche, la consommation et l’investissement privé (équipement, recherche et développement) affichent une forte croissance. Le profil de croissance heurté (+6,9% au quatrième trimestre 2021, puis -1,4% au premier trimestre 2022) sera probablement lissé lors de prochaines révisions. L’activité mesurée par les enquêtes ou les heures travaillées semblent plutôt compatibles avec une croissance stable de l’ordre de 3-4%.

L’Europe subit la hausse des coûts de l’énergie au premier trimestre. L’économie italienne se contracte de 0,2%. En revanche, l’Espagne (+0,2%T) ou l’Allemagne (+0,2%T) dégagent une croissance légèrement positive. Le PIB français stagne entre janvier et mars. La stabilisation de l’IFO et le niveau des enquêtes PMI sont néanmoins encourageants. L’inflation en zone euro se stabilise à un niveau très élevé de 7,5% en avril.

Une hausse des taux en perspective

Les marchés de taux d’intérêt demeurent très volatiles. La prédominance de l’inflation dans le double mandat de la Fed justifie l’accélération des hausses de taux de sorte que la tendance du marché reste à la hausse des rendements. Une série de hausses de 50 points de base est désormais intégrée dans les contrats à terme. Une hausse de 75 points de base n’est pas exclue. Conjointement aux hausses des taux, la Fed annoncera cette semaine le début de la réduction de son bilan. Les minutes du dernier FOMC suggéraient un rythme mensuel de 60 milliards de dollars sur les bons du Trésor et 35 milliards de dollars sur les MBS. L’enveloppe totale du resserrement quantitatif reste à déterminer.  Dans ce contexte, les taux américains à 10 ans s’approchent des 3% avec des objectifs techniques vers 3,20%. Les comptes spéculatifs ont réduit leurs positions vendeuses de contrats malgré la solide tendance haussière.

Une hausse des taux parait possible dès le mois de juillet et la faiblesse de l’euro renforce encore cette probabilité.

En zone euro, les achats d’extension de duration de fin de mois ou le solde négatif d’émissions en avril n’empêchent pas la poursuite de la hausse des rendements allemands. L’inflation reste un élément déterminant pour cette tendance. La hausse hebdomadaire des anticipations d’inflation est ainsi plus forte que le mouvement des taux nominaux. Le Bund surperforme néanmoins, la logique de resserrement monétaire affectant davantage les valorisations des dettes risquées. Une hausse des taux parait possible dès le mois de juillet et la faiblesse de l’euro renforce encore cette probabilité.

L’arrêt attendu des programmes d’achats d’actifs provoque un rééchelonnement des primes de risque. Les swap spreads à 5 et 10 ans dépassent le seuil de 80 points de base. La détente du début du mois dernier aura donc été de courte durée. De la même façon, les spreads souverains français (52 points de base) et italien (186 points de base) témoignent de la défiance des intervenants avant la mise en œuvre d’une politique plus restrictive. En Asie, la baisse du yen, au plus bas depuis 20 ans, est entretenue par la banque du Japon qui ne déroge pas à son objectif de taux. Le taux japonais à 10 ans reste capé à 0,25%. Le yuan subit les sorties de capitaux et les interrogations sur une croissance amputée par le confinement strict à Shanghai et à Pékin. La banque populaire de Chine semble laisser filer le CNY en refusant de relever les taux d’intérêt.

Le Nasdaq fait le grand plongeon en avril

Les marchés du crédit n’échappent pas à l’aversion pour le risque. Les flux de rachats sur les fonds de crédit se poursuivent. Le mois d’avril se solde par un élargissement de 22 points de base sur le crédit IG (151 points de base contre Bund) et de 55 points de base sur le high yield en euros. L’absence d’émissions sur le high yield amortit à peine la pression vendeuse. Les dettes financières subordonnées ou les hybrides ont tendance à s’écarter davantage. La défiance des intervenants s’exprime à travers la forte tension sur les indices de crédit. L’iTraxx Crossover s’échange au-delà des 430 points de base.

L’accélération baissière sur les actions est impressionnante, et les flux vers ETF s’inversent en avril aux Etats-Unis après une collecte nette interrompue depuis 2020. Le Nasdaq plonge de plus de 13% en avril. La saison des résultats est ambivalente. Les surprises haussières sont majoritaires mais les perspectives augurent d’un ralentissement des bénéfices et d’une plus grande difficulté à maintenir les marges. En Europe, la baisse est plus limitée mais de l’ordre de 4% en zone euro. Le marché britannique est stable. La hausse des taux ne profite ni aux bancaires ni à la technologie. La qualité n’est pourtant pas la valeur refuge espérée dans cet environnement d’incertitude. La surperformance des valeurs à dividendes élevés en avril, juste avant la principale période de distribution, fait écho à la réduction de la duration dans les portefeuilles obligataires.

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