Le retour des corrélations actions-obligations

Eoin Walsh, TwentyFour Asset Management

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La rupture dans les corrélations traditionnelles place les valeurs refuges classiques hors d’atteinte.

© Keystone

Les investisseurs sont confrontés depuis le début de l’année à une correction massive sur l’ensemble des marchés. La rupture des corrélations traditionnelles rend la situation encore plus difficile.  L’ampleur du mouvement exige un bref rappel: le S&P 500 et l’Euro Stoxx 50 ont respectivement cédé 17,5% et 15% depuis janvier, tandis que le Nasdaq affiche des pertes spectaculaires de 27%. Les indices obligataires, généralement moins volatiles, n’ont pas fait beaucoup mieux: les indices américains à haut rendement et investment grade enregistrent des baisses respectives de 10% et 13% depuis le début de l’année. Mais c’est la sous-performance des obligations qui pose vraiment problème: les bons du Trésor à 10 ans ont subi des pertes de 10% depuis janvier, ce qui signifie que la valeur refuge phare pour la majorité des investisseurs n’a apporté aucun secours.  

Hausse forcée des taux d’intérêt

Les raisons de cette sous-performance sont évidentes. L’inflation, qui était déjà un problème de taille, risque d’échapper à tout contrôle sur fond de guerre en Ukraine et de nouvelles mesures de confinement en Chine qui ont contribué à un choc de prix mondial sur les matières premières en plus d’une inflation déjà trop élevée. Cette situation a obligé les banques centrales à réagir par de fortes hausses des taux d’intérêt, ce qui pourrait faire des marchés obligataires le point zéro de la volatilité pour une grande partie de l’année.

Les bons du Trésor devraient jouer leur rôle de valeur refuge si la croissance devenait négative.

La semaine dernière, les corrélations ont toutefois amorcé un retour timide avec le rally vigoureux des bons du Trésor pendant la correction des marchés boursiers, et ce en dépit des derniers chiffres de l’inflation américaine qui ont une nouvelle fois dépassé les attentes. Ce serait un changement bienvenu pour les investisseurs, mais à quoi est-il dû?

Un certain nombre de facteurs ont probablement contribué à la reprise des titres obligataires, et le rendement disponible est sans doute l’un d’entre eux. Les bons du Trésor à 10 ans ont démarré l’année avec un rendement de tout juste 1,5% qui n’avait pas vraiment de quoi séduire la plupart des investisseurs, même sans une inflation galopante. Mais après avoir progressé de plus de 150 pb en un peu plus de quatre mois, l’UST à 10 ans dégage aujourd’hui un rendement plus raisonnable pour les investisseurs, surtout si l’on songe que l’indice à haut rendement américain n’offrait que 3,75% en septembre dernier. En outre, la crainte de nouvelles pertes importantes est également retombée avec des rendements qui se situent désormais au-dessus du probable taux neutre de la Fed (~2,5% sur la base des graphiques à points de la Fed).  

Les bons du Trésor comme refuge

La semaine dernière, nous avons également assisté à une légère évolution du scénario qui se focalise désormais sur une potentielle récession et non plus seulement sur l’inflation. Face au débat actuel sur la question de savoir si la Fed poursuivrait ses hausses de taux jusqu’à une récession, la réponse dépend probablement du type de récession auquel les Etats-Unis feraient face (taux de chômage élevé ou faible, niveau des taux de défaut?). Néanmoins, compte tenu du nombre de relèvements de taux déjà intégrés dans les prix des marchés, nous sommes d’avis que les bons du Trésor devraient jouer leur rôle de valeur refuge si la croissance devenait négative. Les gérants d’actifs amorcent en outre la transition vers la fin du cycle, ce qui est notre cas actuellement, et cela devrait apporter un soutien supplémentaire aux actifs sans risque.  

Lorsque les taux deviennent source de risque et qu’il y a rupture des corrélations, l’environnement devient très difficile pour les investisseurs. Des phases comme celle-ci tendent heureusement à ne pas durer très longtemps, bien que les cinq derniers mois aient sans doute ressemblé à une éprouvante traversée du désert. La récente évolution des UST apparaît toutefois comme un retour à un certain degré de normalité qui, s’il s’avère durable, devrait raffermir un peu la confiance d’un marché qui en a manqué durant une grande partie de l’année.

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