La reprise des actions sera-t-elle durable?

Steven Bell, BMO GAM

2 minutes de lecture

Les données récentes pourraient raviver les craintes de récession.

©Keystone

La guerre en Ukraine se poursuit avec de terribles conséquences pour la population. Mais les marchés financiers se comportent comme si tout cela était déjà de l’histoire ancienne, au vu du remarquable rebond des actions la semaine dernière. Pour les actions européennes, ce sursaut fait suite à la forte performance de la semaine précédente. Il existe des explications à ce phénomène qu’il faut examiner avec la plus grande prudence, certains événements à venir méritent aussi réflexion. Parmi ces événements, la prochaine déclaration du chancelier britannique Rishi qui pourrait être en fait l’annonce d’un véritable budget.

En outre, le rebond des actions s'est produit malgré le relèvement des taux d'intérêt par les banques centrales, et il n'y a eu aucun soutien du marché obligataire où les rendements ont fortement augmenté. La Réserve fédérale a, quant à elle, entamé son cycle de relèvement des taux. Cette hausse était attendue, mais le commentaire du président de la Fed, Jerome Powell, était plutôt engagé et le graphique des prévisions du comité indiquait une série de hausses de taux à venir. La BCE s'est également montrée agressive. La Banque d'Angleterre a elle aussi relevé ses taux, mais avec plus de douceurs. Pour les investisseurs, la grande décision est de savoir si la récente remontée est le signe d'un nouveau marché haussier des actions ou s'il s'agit simplement d'un rebond à court terme.

Il ne faut pas oublier que l'économie mondiale semblait solide avant la guerre.

Les indices flash des directeurs d'achat permettront d’avoir quelques indications - les premiers indicateurs réels des dégâts économiques causés par la guerre en Ukraine. Les chiffres seront cependant, probablement décevants, avec un contraste entre les données recueillies avant et après la guerre. Mais il ne faut pas oublier que l'économie mondiale semblait solide avant la guerre.

Diverses réponses à l’inflation

Cette semaine également, Rishi Sunak va, selon la presse, réduire la taxe sur les carburants et annoncer une série d'autres mesures pour atténuer la crise du pouvoir d’achat en Grande-Bretagne. Mais Rishi Sunak est un conservateur fiscal, malgré les craintes de récession, il voudra démontrer que la dette publique et le déficit sont toujours orientés à la baisse. De fait, les finances publiques devraient s'améliorer rapidement - la vigueur de l'économie et la hausse de l'inflation augmentent en effet les recettes fiscales, tandis que la baisse du chômage réduit la facture de l'aide sociale. Il dispose donc d'une grande marge de manœuvre pour soutenir l'économie et faire état de l'amélioration des finances publiques. Il faut également surveiller les bons du trésor britannique. Etant donné que la Banque d'Angleterre passe du statut d’acheteur à celui de vendeur avec l'arrêt de son programme d'assouplissement quantitatif, cela aura une grande incidence sur les rendements de la dette publique. Si le Royaume-Uni assouplit sa politique budgétaire, il suivra les pays européens qui ont annoncé des plans d'assouplissement représentant 1% du PIB. En revanche, les plans de la Commission européenne en vue d'une réponse collective ont fait long feu.

La grande question est de savoir si une récession s’approche.

Les pressions inflationnistes restent fortes et, avec l'élargissement de la politique budgétaire, il faut s’attendre à une nouvelle hausse des rendements obligataires. Mais la grande question est de savoir si une récession s’approche. Aux Etats-Unis, la hausse des rendements obligataires ralentira le marché du logement – aux Etats-Unis, les prêts hypothécaires sont généralement à taux fixe pendant 5 à 30 ans – et on voit déjà des premiers signes de ralentissement. Mais le marché a été très dynamique et, globalement, les taux hypothécaires sont encore très bas. Comme les consommateurs détiennent de grandes réserves d’épargne après la pandémie, ils devraient pouvoir amortir le choc d'une inflation plus élevée. Dans cette perspective, l'économie américaine devrait rester forte cette année. Les effets de base réduiront également l'inflation - et les prix des voitures d'occasion, qui ont doublé durant la pandémie et sont maintenant en chute libre, vont également contribuer à cette réduction. Même si l'inflation va baisser, il semble peu probable qu'elle atteigne l'objectif de 2% fixé par la Fed sans un ralentissement économique majeur.

La récente reprise des actions, a été déconcertante et l’Europe est encore dans la tourmente. Morgan Stanley vient de réduire ses prévisions de croissance des bénéfices européens pour cette année de 10% à 3%, mais la plupart des analystes n'ont pas encore revu leurs chiffres à la baisse. La période est encore difficile pour les actifs à risque. Si les actions sont susceptibles de performer à plus long terme, les données de cette semaine pourraient raviver les craintes de récession.

A lire aussi...