La crise énergétique fait pression sur la France

Bruno Cavalier, ODDO BHF AM

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Le contexte est propice au retranchement des dépenses des entreprises.

© Keystone

Les perspectives de l’économie française restent tributaires de la situation des marchés de l’énergie, tant en termes de prix que de quantité disponible. Mis en place dès la fin 2021, le bouclier tarifaire a largement limité le choc d’inflation, mais ce bouclier sera rendu moins généreux début 2023. Les dépenses des ménages se replient déjà. De plus, la France approche de la période hivernale avec un parc nucléaire qui n’opère qu’à environ la moitié de sa capacité normale. Le risque de pénurie existe. Les entreprises, en nombre croissant, s’attendent ces prochains mois à un impact négatif sur leur activité et, plus encore, sur leurs marges.

La fin des mesures d’amortissement

Une comparaison rapide des prix en Europe aurait de quoi rendre envieux les pays voisins de la France. Selon l’indice harmonisé d’Eurostat, le taux d’inflation vient tout juste d’y dépasser 7%, un seuil franchi dès janvier aux Pays-Bas, février en Espagne, mars en Allemagne, avril en Italie. L’inflation en France est 3,5 points sous la moyenne de la zone euro. Pour autant, les ménages français ne se montrent pas franchement plus optimistes ou plus dépensiers que les autres Européens. Sur un an, le pouvoir d’achat du revenu disponible recule de plus de 2%, le volume de la consommation de 0,5%. Les perspectives sont moroses à court terme. Tout d’abord, les mesures pour amortir le choc énergétique sont presque finies (ristourne sur les prix des carburants) ou vont devenir moins généreuses (plafonnement des prix du gaz et de l’électricité). De plus, le temps passant, la hausse des prix de production tend à se diffuser dans un nombre croissant de prix de vente. Enfin, la perception de l’inflation est surtout affectée par les dépenses fréquentes en produits courants, et sur ce segment, l’envolée des prix est spectaculaire cette année. Dans ce contexte, il ne faut pas escompter une baisse compensatoire de l’épargne. Les dépenses de consommation des ménages sont vouées à corriger plus avant; il en va de même de leur investissement immobilier qui pâtit du resserrement des conditions de financement, qui s’est amplifié dernièrement.

Par sa durée et de son ampleur, la crise énergétique assombrit aussi les conditions d’activité des entreprises. Pour quantifier le phénomène, la Banque de France a sondé le panel de son enquête mensuelle. Début novembre, 40% des firmes dans l’industrie et la construction s’attendaient à voir leur production perturbée durant l’hiver, et les deux tiers anticipaient un choc négatif sur leurs marges. Les entreprises de services, moins énergivores, ressentent le choc dans une proportion un peu plus faible. Outre le renchérissement des factures d’énergie, les entreprises opèrent dans un contexte inédit où l’approvisionnement reste incertain. Les opérations de maintenance sur les centrales nucléaires durent plus que prévu. Le gestionnaire du réseau électrique n’exclut pas des coupures. En somme, tout comme pour les ménages, le contexte est propice au retranchement des dépenses des entreprises à court terme.

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