L’économie française face aux pénuries

Bruno Cavalier, ODDO BHF AM

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La balance des risques en France reste fortement penchée vers le bas à horizon visible.

© Keystone

Après six mois de baisse continue du sentiment des ménages et des entreprises, l’activité économique a semble-t-il encore un peu progressé en France durant l’été. Le plus dur reste à venir. Partout, il n’est question que de rationnement ou de pénuries. Certaines tendent à s’atténuer (approvisionnement des entreprises), d’autres pas encore (recrutement de main-d’œuvre). Certaines sont anecdotiques (la moutarde), d’autres touchent au cœur du système productif (l’énergie). Comme c’est la France, le climat social est toujours plus ou moins éruptif. Moment idéal, il va sans dire, pour relancer le projet de réforme des retraites.

L’énergie, le nerf de la guerre

En attendant la première estimation de la croissance du troisième trimestre, à paraître le 28 octobre, les dernières enquêtes de la Banque de France et de l’INSEE augurent d’une progression du PIB réel de 0,2% t/t. Sur l’ensemble des secteurs, les indices de climat des affaires demeurent encore un peu au-dessus du seuil d’entrée en récession. Mais comme il est d’usage de dire les documents d’investissement, les performances passées ne préjugent pas du futur. Les indicateurs avancés suggèrent que les prochains mois verront le rythme d’activité ralentir, passant probablement en territoire négatif.

Une telle réduction des consommations ne saurait être sans effet sur le niveau d’activité. Tout ne peut pas être obtenu par des gains d’efficacité.

Les raisons sont nombreuses, allant du choc sur les revenus réels à la remontée rapide des taux d’intérêt et au resserrement des conditions financières. Ne mentionnons même pas le risque sanitaire qui n’a sans doute pas totalement disparu. A court terme, la plus grande incertitude touche à la disponibilité de ce facteur de production essentiel qu’est l’énergie. Selon l’enquête Rexecode auprès des trésoriers, la part des entreprises se disant concernée par la hausse des prix de matières premières va de record en record, ceci est en lien direct avec le risque de pénurie d’énergie. En temps normal, ce problème n’était jamais une préoccupation pour les plans d’activité; désormais, c’est la survie de certaines entreprises qui en dépend.

Dans le cadre de son «plan de sobriété», le gouvernement veut encourager une baisse des consommations d’énergie de 10% par rapport au niveau de 2019. Il est difficile de dire si cette baisse sera assez rapide pour éviter des ruptures d’approvisionnement étant donné que la capacité de production du parc nucléaire est réduite de moitié et qu’il subsiste des doutes sur sa montée en charge durant l’hiver. En tout état de cause, une telle réduction des consommations ne saurait être sans effet sur le niveau d’activité. Tout ne peut pas être obtenu par des gains d’efficacité. Selon l’enquête de la Commission européenne, la production des secteurs les plus énergivores sera la plus impactée. Le risque, comme on l’a constaté avec les perturbations logistiques durant la pandémie, est que suivent des effets en cascade sur le reste de l’économie. La balance des risques en France reste fortement penchée vers le bas à horizon visible.

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