Jusqu’à ce que le job soit fait

Bruno Cavalier, ODDO BHF AM

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Le taux directeur se rapproche de ce que la Fed considère comme le point haut du cycle.

«Nous continuerons, jusqu’à ce que le job soit fait». C’est par cette phrase inspirée de Paul Volcker que Jerome Powell a reprise à Jackson Hole que sa lutte contre l’inflation était loin d’être terminée, et par suite, que la Fed continuerait de durcir sa politique. Il a répété cette phrase trois fois lors de sa conférence de presse de septembre. L’inflation sous-jacente a continué d’accélérer. Les données du marché du travail restent solides et ne pointent pas vers une cassure imminente. Les comptes nationaux du troisième trimestre ont montré que la croissance du PIB réel avait rebondi, et même si on met à part les éléments exceptionnels, ils ne décrivent pas une économie à l’arrêt, encore moins en récession. La faiblesse reste concentrée dans le secteur immobilier où tous les voyants sont négatifs. On n’avait jamais vu un resserrement aussi fort et rapide, même en 1994. A cette vitesse, le taux directeur se rapproche de ce que la Fed considère comme le point haut du cycle. Cela suscite un débat sur une possible modération du rythme de hausse des taux. Il n’est pas certain que Jerome Powell tranche la question dès l’issue de la réunion et il pourrait laisser ouvert le choix entre 50 et 75pb à la réunion de décembre.

En France, le lobby du secteur industriel a récemment alerté sur la possibilité d’une baisse de 10% au quatrième trimestre de la production si les aides énergétiques ne sont pas étendues.
Crise pour l’industrie Européenne

Les données nationales ont nettement surpris à la hausse en Allemagne, en France et en Italie. Les tensions de prix se renforcent sur l’alimentation et elles ne baissent pas ailleurs. On peut s’attendre à ce que le taux d’inflation en zone euro franchisse un nouveau record au voisinage de 10,5% sur un an. Même si certains ont cru déceler un certain assouplissement du ton de Christine Lagarde, il est peu probable que la BCE change vraiment de direction avec de tels chiffres d’inflation. La zone euro montrait encore une certaine résilience aux chocs au troisième trimestre mais vu la direction prise par les indices de climat des affaires et la pression sur les revenus réels, un repli de l’activité au quatrième trimestre est très probable. Les enquêtes auprès des entreprises européennes montrent que l’activité ralentit dans un contexte de difficultés de recrutement de la main-d’œuvre. Le rythme des créations d’emplois a ralenti mais pas au point de pousser le chômage à la hausse.

En France, le lobby du secteur industriel a récemment alerté sur la possibilité d’une baisse de 10% au quatrième trimestre de la production si les aides énergétiques ne sont pas étendues. La tendance est certainement baissière. Les enquêtes Ifo et PMI pointent vers une contraction de l’activité dans l’industrie allemande du fait de la crise de l’énergie.

Baisse du recrutement aux États-Unis

Aux Etats-Unis, les offres d’emplois avaient nettement baissé en août. Un nouveau repli est attendu en septembre. Si tel est le cas, cela montrerait que les tensions du marché du travail peuvent s’atténuer même sans de larges licenciements. Les indices régionaux étaient assez mitigés en octobre, pointant à une stabilisation de l’activité. Le consensus mise sur un indice ISM très proche du seuil des 50 points qui sépare entre les zones de contraction et d’expansion de l’activité industrielle.

Aucun indicateur du marché du travail ne laisse attendre de rupture de tendance en octobre. Les inscriptions au chômage restent basses, les enquêtes signalent que l’emploi reste abondant, peut-être seulement un peu moins qu’il y a quelques mois. Le dernier Livre Beige de la Fed signalait aussi que les difficultés de recrutement avaient un peu baissé. Le rythme des créations d’emplois devrait poursuivre son érosion. Le chômage est attendu en hausse modeste de 3,5% à 3,6%. Les gains salariaux sont à surveiller car depuis quelques mois ils tendent à plafonner mais ne ralentissent pas encore, comme le voudrait la Fed. L’Employment Cost Index, une mesure plus large, était en hausse de 1,2% t/t au troisième trimestre, un peu moins qu’au premier et deuxième trimestre.

Le niveau élevé de l’ISM services (>56points) étonne un peu, vu les nombreux autres signes de ralentissement de l’économie américaine. Un repli est attendu qui laisserait l’indice largement en territoire d’expansion.

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