En Europe, la règlementation et l’adoption des cryptos ont le vent en poupe

Flavio Restelli & Inés Beneyto, Blockchain Partner by KPMG

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Chronique blockchain. L’adoption des cryptos en Europe s’accélère, à l’heure où l’UE approuve définitivement le règlement Markets in Crypto-Assets (MiCA).

© Keystone

Près d’un Français sur dix détient des actifs numériques en début 2023 (9,4%), une proportion qui s’élève à 14% pour les Pays-Bas, 12% au Royaume-Uni et 11% pour l’Italie et l’Allemagne. Tels sont les résultats de l’étude récemment publiée par l’Association pour le Développement des Actifs Numériques française (ADAN), faisant état de l’adoption des cryptos par le grand public en France et en Europe. Ainsi, pour la France, l’adoption progresse de 18% en seulement douze mois (8% en début 2022 ). Pourtant, l’année 2022 a été tumultueuse, aussi bien sur le plan économique à échelle globale (montée inédite de l’inflation, des taux d’intérêt, etc.), que sur le marché des cryptos, marqué par un enchaînement de scandales et de faillites (Terra-Luna, FTX, etc.). Cette combinaison de facteurs macro-économiques et affaires endogènes au monde crypto a entraîné la chute des valorisations des actifs numériques en 2022. Néanmoins, elle ne paraît pas avoir eu d’impact sur l’adoption, qui s’accélère dans toutes les géographies. En particulier, en France, 48% des détenteurs de cryptos ont moins de 35 ans (contre 46% en 2022). Au niveau européen, la tendance est encore plus marquée, notamment aux Pays Bas où 53% des détenteurs appartiennent à cette tranche d’âge.

En vigueur à partir de 2024, MiCA s'appliquera à un large éventail de cryptoactifs et acteurs du secteur, tels que les plateformes d’échange, les prestataires de services de conservation, etc.

Par ailleurs, l’intérêt du grand public à l'égard des cryptoactifs se reflète dans le développement de cas d’usage, et particulièrement au sein de l’industrie bancaire. En effet, au-delà de l’investissement, la révolution de fond initiée par les cryptos se situe sur le plan technologique. A ce titre, les stablecoins confirment leur rôle de trait d’union entre l’écosystème financier et l’environnement blockchain. Ces actifs numériques non-volatiles, adossés à la monnaie ayant cours légal (euro, dollar, etc.), permettent des échanges rapides, transparents et sans frontières, et peuvent être utilisés par n’importe quelle application qui soit construite sur une blockchain publique. Le 20 avril dernier, Société Générale a inauguré son propre stablecoin par l'intermédiaire de sa filiale Forge, entièrement dédiée aux technologies du Web3. Le stablecoin «CoinVertible» de Forge est garanti à 100% par des actifs aussi liquides que les espèces et vise à favoriser le développement de nombreux cas d’usage crypto: transferts entre institutions financières, règlement d’achats de titres financiers jetonisés, solutions d'optimisation des flux de trésorerie intragroupe, gestion des liquidités à court terme, etc. A ce jour, les principaux stablecoins (notamment l’USDT et l’USDC) sont adossés au dollar et sont émis par des pure players crypto (iFinex, Circle, etc.). Le lancement du CoinVertible par Société Générale laisse présager un changement de paradigme aux implications multiples, y compris en termes de souveraineté monétaire et numérique de l’Europe. Un changement grandement impulsé par les autorités publiques européennes.

Le même jour que l’annonce de CoinVertible, le Parlement Européen a approuvé définitivement le règlement Markets in Crypto-Assets visant à doter l’Union Européenne d’un cadre spécifiquement conçu pour les cryptoactifs, avec une approche holistique. En vigueur à partir de 2024, MiCA s'appliquera à un large éventail de cryptoactifs et acteurs du secteur, tels que les plateformes d’échange, les prestataires de services de conservation, etc. Une nouvelle étape qui constitue un saut en avant dans la structuration, au sein de l’Union Européenne, d’un secteur en ébullition. Bien que contraignant à plusieurs égards, le règlement MiCA apporte une clarté nécessaire pour asseoir encore plus la confiance des particuliers et des entreprises à l’égard des technologies crypto et blockchain. Une approche qui, pour le moment, semble donner raison à l’UE, de plus en plus vue par les acteurs cryptos comme un espace économique et légal favorable à l’innovation – contrairement, selon certains, au marché américain, encore dépourvu d’un cadre règlementaire clair.

Mais avec une adoption galopante et une règlementation bien avancée, est-ce que l’UE sera également capable de favoriser le développement de champions européens du Web3, potentiels leaders mondiaux de l’internet de demain?

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