Développer la résistance des portefeuilles face à l’incertitude

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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L’accent mis sur la sécurité énergétique, alimentaire et informatique crée des opportunités d’investissement dans des domaines tels que les technologies vertes.

Les banquiers centraux affichent toujours leur détermination à resserrer la politique monétaire pour lutter contre l’inflation. La présidente de la Réserve fédérale de Cleveland, Loretta Mester, a dernièrement indiqué que le relèvement des taux directeurs se poursuivrait quand bien même cela induirait une récession.

La présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, a pour sa part déclaré que les taux directeurs seraient probablement relevés «lors des prochaines réunions». En outre, plusieurs membres du Conseil des gouverneurs de la BCE se sont dits favorables à une hausse de 75 points de base en octobre.

L’inflation à nouveau en hausse

Les derniers chiffres de l’inflation ont conforté le scénario d’une poursuite du resserrement monétaire. Aux Etats-Unis, l’indice «core PCE», le baromètre de l’inflation préféré de la Réserve fédérale américaine (Fed), est ressorti en hausse de 0,6% en glissement mensuel en août après la stabilité des prix observée en juillet.

Dans la zone euro, les données préliminaires ont montré que l’inflation globale des prix à la consommation a atteint, en septembre, 10% sur un an, contre 9,1% en août.

La chute des actions

L’orthodoxie des banques centrales a fait grimper les rendements et a pénalisé les actions. L’indice S&P 500 a chuté de près de 3% au cours de la semaine en question, signant au passage sa plus mauvaise performance mensuelle depuis mars 2020. Il a terminé dans le rouge pour le troisième trimestre d’affilée, une première depuis la crise financière mondiale.

Dans l’ensemble, les dernières évolutions confortent dans l’idée que les conditions ne sont pas encore réunies pour un regain de confiance durable sur les marchés.

Le rendement des bons du Trésor américain à dix ans a atteint 3,97% avant de retomber. L’indice DXY du dollar américain a atteint un nouveau sommet cyclique au-dessus de 114. L’indice VIX de volatilité implicite des actions américaines a bondi à 34, un niveau cohérent avec des fluctuations journalières du S&P 500 supérieures à 2%.

Le Royaume-Uni dans la tourmente

L’inquiétude suscitée par la trajectoire budgétaire du Royaume-Uni a accentué la volatilité des marchés après l’annonce d’un projet de baisses d’impôts non financées de 45 milliards de livres. La livre sterling est tombée à un plus bas historique face au dollar américain et le rendement des gilts (les emprunts d'Etat émis par le Royaume-Uni) à trente ans a dépassé les 5% pour la première fois depuis 2008.

Face aux turbulences sur les marchés et à l’apparition de signes de contagion, la Banque d’Angleterre (BoE) a annoncé une intervention sur le marché des gilts. Elle a également renoncé à réduire son bilan, promettant au contraire d’acheter «autant d’obligations que nécessaire» pour «restaurer le bon fonctionnement du marché». Le rendement des gilts a baissé après les annonces de la BoE mais il reste encore volatil.

Les effets de la guerre en Ukraine

Les investisseurs restent également très attentifs aux risques géopolitiques. Le président russe, Vladimir Poutine, a entériné l’annexion de quatre provinces ukrainiennes, une décision que l’Organisation des Nations unies a qualifié de «dangereuse escalade».

Dans ces conditions, l’ouverture de pourparlers de paix est encore plus difficile à envisager à court terme, d’autant que la Russie a déclaré qu’elle utiliserait tous les moyens dont elle dispose pour défendre son territoire. La guerre en Ukraine continue d’accentuer la volatilité des marchés, l’insécurité énergétique et les risques baissiers pour la croissance économique.

Les marchés restent volatils

Dans l’ensemble, les dernières évolutions confortent dans l’idée que les conditions ne sont pas encore réunies pour un regain de confiance durable sur les marchés. Pour cela, il faudrait des signes tangibles d’atténuation de la menace inflationniste, qui permettraient aux banques centrales d’être plus accommodantes.

Compte tenu de cette forte incertitude, les marchés devraient rester volatils. Cet environnement n’est guère propice à un positionnement trop marqué dans l’optique d’un scénario donné à court terme. Il nécessite plutôt des réajustements judicieux au sein des différentes classes d’actifs pour améliorer la résistance et le profil risque/rendement des portefeuilles.

Cinq grands thèmes caractérisent les préférences d’investissement de la Recherche d’UBS: valeurs défensives, valeurs de rendement, valeurs décotées, diversification et sécurité. Tour d’horizon.

Privilégier les titres défensifs

S’agissant des actions,  on peut recommander de privilégier les secteurs défensifs à l’instar de la santé et des biens de consommation de base, ainsi que les valeurs de rendement de qualité, qui devraient mieux résister au ralentissement économique. Comme l’inflation devrait rester supérieure aux objectifs des banques centrales pendant un certain temps, la Recherche d’UBS affiche toujours une préférence pour les valeurs décotées au détriment des valeurs de croissance.

Dans ce contexte, elle privilégie les actions internationales du secteur de l’énergie et les actions britanniques. La situation économique s’annonce difficile au Royaume-Uni mais les entreprises du FTSE 100, qui réalisent plus de 70% de leur chiffre d’affaires à l’étranger, devraient profiter de la dépréciation de la livre sterling. La composition sectorielle du marché britannique, qui fait la part belle aux valeurs décotées et aux titres défensifs, devrait également être porteuse.

Protéger son portefeuille

Après la hausse des taux d’intérêt et des écarts de crédit à travers le monde enregistrée cette année, on décèle quelques opportunités sur les marchés obligataires. D’autant qu’ils reflètent déjà la perspective d’un relèvement des taux directeurs à marche forcée. La préférence de la Recherche d’UBS va aux titres de grande qualité et aux titres de créance résistants, qui devraient aussi contribuer à protéger les portefeuilles en cas de crise économique.

Sur le marché des changes, le dollar américain et le franc suisse sont appréciés. En effet, ce sont deux devises refuge traditionnelles émises par des banques centrales qui relèvent résolument leurs taux.

Se diversifier grâce aux hedge funds

Pour diversifier les portefeuilles, les investisseurs peuvent envisager de s’exposer aux hedge funds et aux actifs non cotés. A plus long terme, l’accent mis sur la sécurité énergétique, alimentaire et informatique crée des opportunités d’investissement dans des domaines tels que les technologies vertes, l’amélioration des rendements agricoles et la cybersécurité.

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