Climat: plus que 8 années pour agir

Adam El Cheikh, Kepler Cheuvreux Solutions

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D’une prévision scientifique à une réalité mondiale: et si nous n’avions plus que 8 années pour atteindre nos engagements?

Pendant des décennies, les scientifiques et les experts ont alerté face aux conséquences irréversibles de l’évolution de la température pour notre planète. 32 ans après la première parution du rapport du GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat), le changement climatique impacte désormais toutes les populations et son influence sur notre environnement est aujourd’hui visible et mesurable:

  • Des records de chaleurs observées: 38°C enregistrés en juin 2020 dans l’Arctique,
  • Succession d’incendies alimentés par la sécheresse et la hausse des températures,
  • Elévation du niveau des océans: +10 centimètres en 50 ans,
  • Recrudescence des maladies en lien avec les perturbations de la biodiversité soulignée par la Banque Mondiale.
Sans une action rapide, le monde devrait dépasser les 1,5°C de réchauffement climatique au début des années 2030, soit 70 ans plutôt que l’objectif international.

Face à ces événements, l’urgence climatique devient la première préoccupation de 47% des Européens selon un sondage réalisé par l’institut BVA. Une réalité d’autant plus marquée auprès des générations plus jeunes… Sans une action rapide, le monde devrait dépasser les 1,5°C de réchauffement climatique au début des années 2030, soit 70 ans plutôt que l’objectif international. 

Un horizon climatique qui s’éloigne: 1,5°C de réchauffement attendu pour 2030

Avec une hausse de la température de +1,2°C déjà observée, le défi climatique s’intensifie et semble devenir de plus en plus difficile à atteindre. Le Climate Action Tracker, un groupe de scientifiques indépendants, a publié un rapport sur les différents niveaux de hausse de température en lien avec les engagements des pays. Dans le scénario le plus optimiste, qui demande une application stricte des protocoles, nous devrions aboutir à un réchauffement de 1,8°C d’ici 2100.


 
Source: Climate Action Tracker, https://climateactiontracker.org/

 

La prise de conscience des pouvoirs publics sur l’urgence d’agir s’est accentuée et traduite par un renforcement des engagements sur la réduction des gaz à effet de serre. La mobilisation de la scène internationale s’organise au travers de nombreuses initiatives (COP, Sommets pour la planète, groupes de travail) pour réaffirmer l’urgence d’une action coordonnée et limiter le réchauffement climatique à +1,5°C d’ici la fin du siècle.

Si la théorie du Donut développée par l’économiste Kate Raworth nous pousse à dépasser le dogme d’une croissance infinie, la tendance haussière de notre économie et des besoins en énergie traduit une tout autre réalité. L’Agence International de l’Energie prévoit une hausse de la demande d’énergie de 27% d’ici 2030. Pour y parvenir tout en assurant une limitation des émissions, l’accélération du développement de la transition énergétique se couple à la réduction progressive de l’utilisation des énergies fossiles dans le mix énergétique des Etats.

La transition énergétique au cœur des politiques de relance des Etats

En 2020, le renouvelable a généré pour la première fois davantage d’électricité (1 054,3 TWh soit 38,6% du mix électrique) que l’ensemble des centrales à combustible fossile (1020,3 TWh pour 37% du mix) dans l’Union européenne. La neutralité climatique d’ici 2050 implique que la croissance des énergies renouvelables doit s’accélérer dans les prochaines années. D’ici 2040, la part des énergies renouvelables dans la production électrique mondiale devra passer de 18% actuellement à plus de 50% selon l’AIE.

Source: The European Power Sector in 2020, Ember & Agora https://connaissancedesenergies.org/

 

Au-delà de limiter les risques physiques qui pèseront lourd sur les budgets des Etats, la transition énergétique permet aussi d’assurer la souveraineté des Etats face au caractère décentralisé des sources d’énergies fossiles. Le renforcement des engagements pris en Europe avec l’objectif de réduire de 55% ses émissions d’ici 2030, le retour des Etats-Unis dans l’accord de Paris ou encore l’ambition formulée d’une neutralité carbone de la Chine sont des catalyseurs d’une transformation à venir. 

Parmi les initiatives clés lancées par l’Europe, le Green Deal qui prévoit d’investir plus de 1’000 milliards d’euros dans la transition énergétique d’ici 2030 ou encore l’entrée en vigueur de la réglementation européenne Taxonomie, qui vise à orienter les flux d’investissement sur les activités vertes, vont permettre la réalisation de la plus grande transition énergétique de notre histoire. 

Les pouvoirs publics ont compris l’importance d’associer le secteur privé et la finance dans la mobilisation des capitaux pour soutenir la transition énergétique.

Les huit prochaines années seront donc clé dans la limitation du réchauffement climatique à 1,5°C. Les pouvoirs publics ont compris l’importance d’associer le secteur privé et la finance dans la mobilisation des capitaux pour soutenir la transition énergétique. La finance apparait alors comme un outil puissant dans la lutte contre le changement climatique.

La finance, un acteur incontournable pour la transition

Du greenwashing aux fonds dédiés à l’impact, les engagements des investisseurs et les fonds d’investissement pour le climat ont fleuri ces dernières années pour répondre à une demande croissante. Soutenu par un écosystème économique et politique favorable, l’investissement dans la transition énergétique permet de participer à un secteur en forte croissance et de donner à l’investissement un caractère durable. La montée en puissance des obligations durables, la collecte importante sur les fonds thématiques climat et environnement ou encore la multiplication des initiatives comme la Net Zero Alliance illustrent une tendance systémique. L’évolution du diptyque financier traditionnel risque-rendement vers le triptyque risque-rendement-responsabilité est aujourd’hui au cœur de cette transformation.

Le durcissement des politiques monétaires et les rotations factorielles qui s’opèrent depuis quelques mois ont mis à l’épreuve la performance des stratégies sur la transition énergétique exposées aux valeurs avec un profil croissance. Cependant, les fondamentaux de la thématique restent solides et la limitation du réchauffement climatique ne pourra être réalisée que l’investissement sur ce thème séculaire.

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