Gonet: l'actualité des marchés au 12 octobre

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

4 minutes de lecture

Dow +0,12%, S&P 500 -0,66%, Nasdaq -1,24%, Russell 2000 +0,06%, SOX -2,5%, Eurostoxx -0,49%, SMI -0,53%.

Caramba! Encore raté…

Wall Street tente un retour dans le vert mais se fait remettre en place par… la Banque d’Angleterre, encore elle me direz-vous! Si la bande à Bailey est montrée du doigt, c’est bien malgré elle. La BoE fait ce qu’elle peut pour protéger ses fonds de pensions domestiques, qui ont fait de grosses bêtises en augmentant exagérément leur profil de risque, les Gilts ne rendaient pas assez. Dans un tel contexte, on se dirige bien souvent vers les produits à effet de levier, les fonds de pension ont notamment couvert leur risque d’intérêt sur le marché des produits dérivés. Les taux prenant la direction du ciel, le coût de couverture a explosé et les pauvres fonds se sont vus confrontés à des appels de marge importants, les forçant à vendre des actifs, sauf que les acheteurs ne se bousculant pas, c’est la Banque d’Angleterre qui a dû s’y coller, et paf le pataquès au royaume de la perfide Albion, le contribuable anglais avait bien besoin de cela…

Or donc hier Andrew Bailey tape du poing sur la table et somme les fonds de pensions de faire face à leurs appels de marge d’ici à vendredi soir au plus tard, il les avertit que les mesures d’urgence n’iront pas au-delà. Bon, selon le FT l’entourage de Bailey laisserait déjà entendre que ce dernier aurait rétropédalé cette nuit, probablement après avoir constaté avec horreur qu’il commençait à influencer Wall Street (mon avis personnel à moi). Wall Street donc, qui voit sa tentative de rebond avortée par l’annonce du gouverneur de la Banque d’Angleterre, annonce qui ne passe pas du tout, une banque centrale qui explique qu’elle va sevrer ses toxicomanes investisseurs, ça sonne comme un affreux «wake up call» que la joyeuse période des liquidités perpétuelles est révolue, c’est un peu comme si on se réveille en pleine nuit alors qu’on rêvait qu’on fêtait son anniversaire…Ceci dit, Andrew Bailey s’est probablement mis la pression tout seul, un peu comme moi lorsque j’avertis numéro deux (qui goutte les joies de l’entrée en adolescence sans modération) des pires maux en sachant pertinemment que je ne mettrai jamais mes menaces à exécution.

Dans ce contexte plutôt britannique, l’indice S&P500 (SPX) casse le niveau de 3600 points, rappelons que son principal support se situe dans la zone 3525 – 3500. On assiste à une séance typique d’aversion au risque, les actions de croissance sont délaissées, surtout les TMT (Telecom, Media, Tech) qui connaissent certaines des baisses les plus brutales, les investisseurs continuant à liquider leur exposition au groupe pour diverses raisons, notamment les restrictions réglementaires (qui ont le plus affecté les firmes d’équipements pour puces ces derniers jours) et la demande (en particulier sur certains marchés comme celui des ordinateurs)... Du côté éclairé de la force, on retrouve les REITs, les biens de consommation de base et la santé. Les volumes d’échanges augmentent quelque peu avec 11,18 milliards de titres traités sur le NYSE. La volatilité gagne 3,6%, le VIX clôture à 33,63, la résistance de 35 est de plus en plus proche. Le dollar reste stable, la paire EUR/USD évolue ce matin à 0,9715, même phénomène de stagnation sur l’or, dont l’once évolue à 1668 dollars. Le pétrole rend du terrain, le baril de WTI Light Crude revient à 89,40 dollars.

Sur le front des rendements obligataires, la courbe des taux US se pentifie un peu plus, le 10 ans évolue à 3,91% alors que le deux ans traite à 4,27%, le spread 2 / 10 ans en est à – 37 points de base. La prochaine réunion de la Fed a lieu le 2 novembre, le marché prévoit quasiment 100% de probabilités d’une hausse de 75 points de base. À ce sujet, on prêtera attention ce soir aux minutes du dernier FOMC, qui pourraient nous aider à mieux comprendre l’état d’esprit général des membres du comité.

Les gardiens du phare que sont l’équipe de sentimentrader publient une nouvelle étude dans laquelle ils constatent que le SPX a connu de fortes fluctuations ces derniers temps, avec des variations de 1% fréquentes. Sur sept périodes, le nombre de variations de 1% de l'indice a dépassé tout ce qui s'est produit au cours de la dernière décennie et se rapproche des périodes les plus volatiles de l'histoire. Après des périodes similaires, les actions ont baissé au cours des deux mois suivants, mais se sont redressées à long terme. Sentimentrader ajoute que les quelques précédents ont tous précédé des gains à long terme, car ils ont été déclenchés près des principaux points bas du marché. On peut aisément envisager un marché encore volatile ces prochains mois, gardons en tête que la saison des résultats de sociétés au troisième trimestre débute et que la réaction du marché aux chiffres décevants est plutôt épidermique ces temps. J’ai consulté les statistiques. Le contexte de volatilité qui occupe actuellement les marchés ne s’est déjà produit que 4 fois dans le passé depuis 1929. La performance moyenne du SPX deux mois après est de -4,6%, en revanche 12 mois plus tard elle est de +16,7%. Comme d’accoutumé, l’avenir nous dira si l’histoire se répète une fois encore.

Les clients de BofA (Bank of America) ont été de gros acheteurs d'actions américaines la semaine dernière, ajoutant un montant net de 6,1 milliards de dollars. Il s'agit du troisième plus grand afflux depuis que la banque a commencé à suivre les données en 2008 et les analystes indiquent que cela pourrait suggérer que les clients pensent que les actions sont au plus bas (impressionnants de clairvoyance ces analystes…).

Loretta Mester, patronne de la Fed de Cleveland, estime que des hausses de taux supplémentaires sont nécessaires car l'inflation n'a pas ralenti; elle est plus préoccupée par l'inflation que par le risque d'un ralentissement économique trop. La Fed garde un œil sur les marchés financiers lorsque les taux augmentent, Madame Mester constate que les marchés fonctionnent actuellement.

On fait un point sur l’état d’esprit des gens dans la région de New-York (je sais, NY ce n’est pas les Etats-Unis, mais ça compte tout de même). L'enquête de septembre de la Fed de New York sur les attentes des consommateurs montre que les personnes interrogées ont des attentes moins élevées en matière de croissance des prix à l'horizon d'un an (5,4% contre 5,7% en août), mais que les attentes en matière d'inflation à trois et cinq ans sont légèrement plus élevées (mais comment donc font les gens pour avoir un avis éclairé sur le niveau des prix dans 5 ans?). Les consommateurs revoient à la hausse leurs prévisions concernant les prix de l'essence, de l'alimentation et du logement pour l'année à venir, tandis que les attentes au sujet de la croissance des prix de l'immobilier tombent à leur plus bas niveau depuis juin 2020. Les prévisions de perte d'emploi au cours de l'année prochaine augmentent (11,6% contre 11,1% le mois précédent). Les prévisions de croissance des dépenses des ménages au cours de l'année à venir chutent fortement, enregistrant la plus forte baisse sur un mois depuis juin 2013, la part des ménages signalant une détérioration de leur situation en glissement annuel restant proche d'un niveau record. En résumé, dans la région de New York, tout un chacun s’attend à perdre considérablement en pouvoir d’achat, à potentiellement perdre son emploi, à dépenser donc nettement moins dorénavant et à voir le prix de son logement perdre en valeur (le fameux «wealth effect»). Les esprits taquins, ou chagrins c’est selon, rappelleront ici que le consommateur contribue à environ deux tiers de la croissance du PIB. En parallèle, le président des Etats-Unis accorde une interview à CNN et affirme qu'une récession aux États-Unis est peu probable et que, même si elle se produisait, elle ne serait pas grave. «Je ne pense pas qu'il y aura une récession. Si c'est le cas, ce sera une très légère récession»…

Au menu macro-économique du jour, la production industrielle européenne d'août (11h00) et les prix à la production américains de septembre (14h30) animeront l'après-midi, avant à 20h00 la publication des minutes de la dernière réunion de la Fed. Ce matin, le Japon a annoncé une forte baisse de l'indice de commande des machines-outils en septembre, le yen faiblit à un niveau inexploré de 146.11 contre le dollar.

LVMH: Le groupe affiche une croissance organique élevée de 19% au troisième trimestre, des résultats littéralement impressionnants. Crédit Suisse pourrait faire l'objet d'une enquête fiscale aux Etats-Unis. Intel prévoirait un gros plan social pour faire face au ralentissement du marché du PC. General Electric a déposé auprès de la SEC une déclaration d'enregistrement pour la scission de sa division santé. Meta Platforms sort un casque de réalité virtuelle plus performant qui vise notamment les professionnels. Uber et Lyft chutent après un projet de nouvelle réglementation aux USA. Leonteq réfute les allégations de blanchiment d'argent et confirme ses objectifs. Roche lance une nouvelle génération de tests Covid en Europe. Marvel Studios (Walt Disney) retarde la sortie de certains films.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en hausse, hormis Tokyo qui clôture autour de l’équilibre. Hong Kong gagne 0,50%, Shanghai progresse de 1,52% et Séoul avance de 0,47%. Le future SPX récupère 18 points et l’Europe ouvre en légère hausse de 0,2%. le marché se prépare au très important rapport américain sur les prix à la consommation qui sera publié demain.

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