Le verre à moitié vide ou à moitié plein?

Eric Vanraes, Banque Eric Sturdza

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Chronique des taux de la banque Eric Sturdza.

©Keystone
Minutes du FOMC: tout ça pour ça

Les tant attendues minutes du FOMC du 4 mai n’ont pas révélé de scoop. La Fed confirme qu’elle a l’intention de restreindre sa politique monétaire pour la faire passer de mode accommodant à mode neutre dans les plus brefs délais. Tous les participants ont jugé qu’une hausse de 50 points de base du taux Fed funds était appropriée, ainsi que deux hausses supplémentaires de 50bp chacune le 15 juin et le 27 juillet. Les minutes ne mentionnent aucune discussion à propos d’un éventuel tour de vis de 75bp, ce qui corrobore les récents propos de Jerome Powell.

La normalisation de la politique monétaire devrait donc se dérouler en deux phases distinctes. La première phase concerne le passage de mode accommodant à neutre avec probablement 50bp en juin, 50bp en juillet et 25bp le 21 septembre, voire 25bp supplémentaires le 2 novembre selon les différentes évaluations du mode neutre. La deuxième phase est la plus intéressante car il s’agira du passage du mode neutre au mode restrictif. Combien de hausses supplémentaires seront alors nécessaires? Seront-elles plus compliquées à mettre en place compte tenu des premiers signes de ralentissement?

Voir le verre à moitié vide, c’est se lamenter sur les performances catastrophiques des marchés obligataires depuis le début de l’année.

La sacro-sainte unanimité des membres du FOMC sera mise à rude épreuve et Raphael Bostic, de la Fed d’Atlanta évoque déjà une possible pause en septembre. Les marchés de taux n’ont pas réagi car il n’y avait pas matière à bouger. Finalement, le seul enseignement que nous pouvons tirer de ces minutes, c’est que la Fed est beaucoup plus floue lorsqu’il s’agit d’évoquer la seconde phase de son plan alors qu’elle semble très claire sur ses intentions de mener à bien la première phase.

Saisir les opportunités dans le bear market

Voir le verre à moitié vide, c’est se lamenter sur les performances catastrophiques des marchés obligataires depuis le début de l’année. Vendredi soir, l’indice US Treasuries affichait -7,8%, l’US Corporate Investment Grade -11,5%, l’US High Yield -8,1% et l’indice Marchés Emergents Investment Grade USD -14,2%. Il s’agit de performances pratiquement similaires à celles d’un S&P500 à -12,7% ou un Dow Jones à -8,6% et il y a de quoi en perdre son latin.

Toutefois, depuis le début du mois, certains marchés relèvent la tête. A force de vanter les mérites du crédit Investment Grade en dollars, ce dernier relève la tête. Les flux acheteurs, le recul des taux US Treasuries et le resserrement des spreads lui redonnent de quoi envisager l’avenir avec un peu plus d’assurance: +1,4%, à confirmer demain matin avec la clôture mensuelle de ce soir. Il s’agit de la classe d’actifs obligataires en dollars qui a le plus relevé la tête en mai, devant les Treasuries qui affichent un prometteur +0,8%. Rebondir de 1% après une dégringolade de -8% ou -12%, ce n’est certes pas une garantie que nous avons touché le fond et qu’il faut revenir à toute allure sur ces marchés. Mais les partisans du verre à moitié plein ont déjà fait le premier pas.

Nous allons, sauf accident, boucler ce soir le premier mois de 2022 en territoire positif pour les obligations. Ne boudons pas notre plaisir sans toutefois nous bercer d’illusions. Le bull market fixed-income, s’il doit y en avoir un cette année, apparaîtra vraisemblablement à l’occasion de la phase n°2 du plan de la Fed. S’ils persistent à «overshooter» en mode restrictif alors que la récession pointera le bout de son nez, il ne fera pas bon être short des taux US.

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