Bien prévoir exige de regarder au-delà de 12 mois et de se focaliser sur les progrès véritables.
C’est une pratique courante que de publier en début d’année ses prévisions pour les 12 mois à venir. Dans l’ensemble, ces anticipations de l’évolution des marchés financiers tendent à se regrouper autour du scénario central et à ignorer l’éventualité d’événements exceptionnels. La question est: que faire, concrètement, de cette masse d’informations?
Dire que les obligations à haut rendement sont devenues moins chères parce que leur cours a chuté l’an passé tient de la lapalissade. Les vraies questions sont: dans quelle mesure le marché a-t-il intégré les prochaines hausses de taux ou quelle est l’augmentation probable des taux de défauts? De même, les titres de croissance paraissent bien meilleur marché par rapport aux actions «value», même si leur valorisation relative est au-dessus de la moyenne historique. Est-ce le moment de se repositionner?
La réalité demeure qu’il est très difficile de prévoir l’évolution du marché à 12 mois, même pour un observateur averti. Et même si cela paraît contre-intuitif, il est beaucoup plus aisé de faire des prédictions à dix ans avec confiance. Et cela parce que certains développements technologiques, ou l’évolution de certaines pratiques sont déjà en cours, qui remplaceront les pratiques actuelles dans la prochaine décennie.
Ces réflexions à long terme n’offrent aucun indice sur l’évolution des valorisations dans les 12 prochains mois, mais parce qu’elles sont basées sur le monde réel, elles peuvent former la base de décisions d’investissement. Les développements évoqués ne dépendent pas des cycles de la consommation ou de la croissance économique puisqu’ils consistent tout simplement à fournir des réponses aux besoins et désirs de la société, des réponses qui sont mieux adaptées et moins chères que celles disponibles à l’heure actuelle. Et l’histoire montre que les entreprises capables d’exploiter ces opportunités ont de fortes chances de voir le cours de leurs actions progresser sur le long terme.
Donc, on ne sait pas ce qui arrivera en 2023. Mais voici quelques-unes des choses que nous savons:
- Pour lutter contre une hausse des coûts de la santé qui devient partout insoutenable, la seule option réaliste est une augmentation spectaculaire de l’efficacité des traitements ainsi qu’un changement radical d’une approche «traitement» à une approche axée sur le diagnostic précoce et la prévention.
Par chance, la santé est à l’aube d’une révolution: la diminution des coûts de séquençage des gènes, l’augmentation de la puissance de calcul et les progrès de l’intelligence artificielle convergent pour multiplier nos capacités à comprendre les maladies et à faire des progrès susceptibles d’entraîner une disruption des systèmes existants. - Le secteur des paiements qui a peu évolué durant des décennies est mûr pour une profonde mutation. Tout son environnement change. Grâce aux téléphones portables, il est dorénavant possible de gérer ses comptes et services bancaires en ligne ou de disposer d’applications qui permettent de détenir plusieurs devises. Les petits commerçants peuvent désormais accéder à une clientèle internationale grâce à des solutions logistiques centralisées et des fournisseurs de services de paiement internationaux.
- La flexibilité du travail est là pour durer, ce qui se traduira par une croissance dans des domaines évidents comme les outils de communication et l’infrastructure internet. Cette évolution impliquera également le passage aux réseaux en nuage et elle nécessitera des logiciels de sécurité plus locaux et plus robustes.
- Le changement climatique étant indéniable, il faut cesser d’ajouter du carbone à l’atmosphère. La plupart des technologies nécessaires pour y parvenir sont disponibles, mais pas encore à grande échelle.
Arriver à des émissions nettes zéro d’ici 2050 nécessite des changements au niveau du bouquet énergétique, du stockage et de la distribution de l’énergie, changements qui ont à peine démarré. Cette situation présente à la fois de nouveaux défis et de nouvelles opportunités comme le stockage évolutif dans les batteries, la fourniture de câbles de très grande qualité pour acheminer l’énergie depuis les éoliennes en mer jusqu’aux centres urbains ou encore les technologies de captage et de stockage du carbone.
Tout cela amène à une conclusion simple: si vous voulez savoir où investir avec succès pour les 12 prochains mois, nous n’avons aucune réponse à offrir.
Savons-nous quand exactement les disruptions évoquées plus haut vont se produire? Non. Sommes-nous confiants que nous cherchons aux bons endroits? Oui. Les actions des sociétés concernées pourraient-elles doubler pendant que les investisseurs se focalisent sur le court terme? Probablement.
Le plus difficile est de regarder bien plus loin que le bout de son nez et le cycle de 12 mois pour se focaliser sur les progrès réels.
Donc voilà notre prédiction: nous n’avons pas la moindre idée de ce que feront nos portefeuilles actions en 2023, mais nous sommes convaincus que leur valeur en 2033 sera bien supérieure à ce qu’elle est aujourd’hui!