Un peu de répit pour les actions

Axel Botte, Ostrum AM

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Surperformance du T-note et fort rebond des actions grâce au repli du dollar.

©Keystone

Les marchés financiers cherchent encore une direction. L’inflexion de plusieurs indicateurs américains s’est accompagnée d’une détente des rendements obligataires et d’une baisse du billet vert permettant un fort rebond des indices boursiers aux Etats-Unis (4% sur le S&P 500) et des marchés du crédit en dollars. La remontée de l’euro au- dessus d’1,07 dollar freine parallèlement la performance relative des marchés européens. L’Euro Stoxx 50 s’adjuge néanmoins 3% sur la semaine écoulée. Le rendement du Bund pointe à la hausse autour de 1%, la pression vendeuse étant plus significative encore sur les échéances au-delà de 10 ans. Les spreads de crédit se stabilisent malgré des tensions persistantes sur le swap spread. En Chine, les difficultés conjoncturelles et la réduction du taux de référence à 5 ans de la Banque Populaire de Chine pèsent finalement sur les rendements obligataires après une longue période de stabilité. Le yuan reste fragile (6,71). La crise énergétique et alimentaire crée un regain de tensions sur les prix des matières premières (Brent à 114 dollars le baril). Les métaux industriels font toutefois exception.

Une fois encore, la croissance mondiale ne semble reposer que sur le consommateur américain. La contraction du PIB des Etats-Unis (-1,5% au premier trimestre) traduit l’envolée des importations en provenance de Chine en mars, précipitée par les risques de rupture d’approvisionnement qui se sont concrétisés depuis. La contribution du commerce efface plus de 3 points de croissance et la moindre accumulation des stocks retire 1 point supplémentaire. A l’opposé, la consommation des ménages et l’investissement des entreprises est au beau fixe. La chute de la confiance et la hausse des prix infléchissent à peine le comportement de consommation (+3,1% au premier trimestre 2022). Les données de dépenses réelles d’avril (+0,7%) le confirment. Il convient toutefois d’être attentif à l’ampleur de la baisse de l’investissement résidentiel induite par le durcissement monétaire.

Le gouvernement chinois fait face à des difficultés économiques bien pire qu’en 2020, selon Li Keqiang.

La diminution des dépenses militaires américaines reste une énigme, étant donné le soutien conséquent apporté à l’Ukraine. Le conflit qui s’enlise au Donbass provoque aussi une crise alimentaire mondiale sans précédent. Le blocus de la mer Noire par l’armée russe empêche l’exportation par la mer des céréales ukrainiennes.

En Europe, les enquêtes (IFO, PMI) surprennent encore par leur résilience malgré la faible croissance rapportée au premier trimestre. L’Allemagne enregistre un maigre 0,2% avec une consommation des ménages en berne (-0,1%). Le Royaume-Uni, soumis en outre à l’impasse du Brexit en Ulster, annonce 15 milliards de livres sterling de soutien aux ménages. Le gouvernement chinois fait face à des difficultés économiques bien pire qu’en 2020, selon Li Keqiang, premier ministre chinois. Le chômage des jeunes atteint 18% et les difficultés financières des promoteurs immobiliers semblent sans issue. Une liste de 33 mesures de soutien a été annoncée, l’urgence étant au rebond de l’activité avant le 20e congrès du PCC à l’automne.

La fin des taux négatifs approche

La volatilité financière ne diminue pas. Le narratif dominant sur les marchés financiers semble être que le ralentissement américain permettra une inflexion salvatrice dans la politique monétaire américaine. Le marché a ainsi effacé 25 points de base de resserrement de la Fed à l’horizon de décembre prochain. Le repli du T-note vers 2,75% reflète la diminution du taux réel à 10 ans.  La baisse du dollar encourage parallèlement la prise de risque. Ce scénario reste pourtant cousu de fil blanc compte tenu de l’inflation à 8%, favorisée, cette semaine encore, par le renchérissement du baril. A tort ou à raison, le marché n’envisage pas que la Fed privilégie durablement l’objectif de la baisse de l’inflation.

Le marché du crédit peine à se stabiliser entre les risques conjoncturels et l’imminence de l’arrêt du Corporate Sector Purchase Programme et les hausses de taux.

A l’instar des Treasuries, la pente de la courbe des taux en zone euro s’accentue. Le spread 10-30 ans s’élargit de 10 points de base sur la semaine écoulée. Les émissions de DSL 30 ans, Bund 15 ans ou RAGB verte (2049) expliquent en partie la dégradation du marché obligataire sur les maturités les plus longues. Les spreads souverains à 10 ans se sont toutefois bien comportés malgré le débat sur l’ampleur des hausses de taux de la BCE. Klaas Knot, président de la banque central néerlandaise, et d’autres n’excluent pas de relever les taux de 50 points de base en juillet. La fin des taux négatifs approche. Le BTP italien se resserre néanmoins vers 190 points de base ce qui semble compatible avec un mécanisme de soutien pérenne de la BCE pour encadrer les risques asymétriques caractéristiques de l’union monétaire.

Le marché du crédit peine à se stabiliser entre les risques conjoncturels et l’imminence de l’arrêt du Corporate Sector Purchase Programme et les hausses de taux. Le niveau des swap spreads reste inhabituellement élevé, entrainant un nouvel écartement des spreads des obligations sécurisées. Le spread moyen sur le crédit Investment Grade en euro se dégrade de 18 points de base en mai. Les primes à l’émission, pourtant élevées depuis le mois d’avril, ne permettent pas de surperformance des nouveaux emprunts. Le high yield européen attend toujours la reprise du marché primaire. Les flux vendeurs ralentissent cependant de sorte que le spread moyen contre Bund s’est stabilisé aux alentours de 500 points de base. A l’opposé, grâce à la baisse du dollar, les marchés du crédit et du high yield américains profitent pleinement du rebond des actifs risqués. Le dollar n’apparait plus comme la devise refuge, à mesure que les anticipations de taux s’ajustent. Le yen s’est renforcé vers 127 et l’euro passe le seuil de 1,07 dollar. Aux antipodes, le dollar néo-zélandais profite du durcissement monétaire réaffirmé par la Banque de réserve de la Nouvelle-Zélande qui relève à près de 4% son objectif de taux pour 2023.

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