Un optimisme prudent pour 2023

Arthur Jurus, ODDO BHF

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L'assombrissement des perspectives économiques, l'accélération de l'inflation et le durcissement rapide de la politique monétaire ont laissé des traces profondes sur les marchés.

L'année 2022 a apporté de grands changements sur le plan politique et économique. Les chars qui ont pénétré en Ukraine en février n'ont pas seulement marqué un changement dans la politique mondiale. Le contexte économique a lui aussi brusquement changé. Les restrictions de livraison d'un côté et les sanctions de l'autre ont bouleversé le marché des matières premières énergétiques et ont fait grimper les prix. L'éclatement de la guerre en Ukraine et la «fermeture du robinet de gaz» par la Russie ont ensuite fait grimper le prix du gaz à des niveaux astronomiques. Même après une légère baisse des prix, le mégawattheure de gaz naturel coûte en moyenne 140 euros, ce qui est encore 7 à 8 fois plus élevé qu'«avant Corona».

Le choc de l'offre provoqué par l'évolution des prix de l'énergie a contribué à une accélération massive de l'inflation. Aux États-Unis, les taux d'inflation ont atteint un pic de 9,1%. Dans la zone euro, où la dépendance vis-à-vis des livraisons de gaz naturel russe était particulièrement marquée, le renchérissement a atteint 10,6% en octobre 2022. La flambée des prix a augmenté les coûts de production, a fait diminuer les revenus réels et a pénalisé la croissance économique.

Cette explosion des taux d'inflation a provoqué un durcissement de la politique monétaire dont la rapidité et l’ampleur sont sans précédent depuis des décennies. Au cours de l'année 2022, la Réserve fédérale américaine a augmenté son taux directeur pour le porter à 4,25-4,50%. La Banque centrale européenne a aussi amorcé un changement de cap en augmentant son taux de dépôt pour le porter à 2,00% actuellement.

Même les pertes de l'année 2022 se relativisent si l'on prend en compte les excellents résultats des années précédentes.

L'assombrissement des perspectives économiques, l'accélération de l'inflation et le durcissement rapide de la politique monétaire ont laissé des traces profondes sur les marchés. Les obligations, qui sont normalement considérées comme une composante stabilisatrice d'un patrimoine, pourraient terminer l'année avec une perte historiquement élevée d'environ 18%.

Les actions ont été à peine moins malmenées. Les marchés des actions ont gagné beaucoup de terrain, surtout au quatrième trimestre, mais ils devraient tout de même terminer l'année sur de lourdes pertes. Les valeurs technologiques ont été les plus durement touchées, car elles se sont révélées particulièrement vulnérables à la hausse des taux d'intérêt en raison de leurs perspectives de bénéfices à long terme (et souvent dans un avenir lointain).

Mais là où il y a de l'ombre, il y a aussi de la lumière. Nous voyons aussi des opportunités pour 2023. La hausse des rendements obligataires a entraîné des pertes de cours considérables pour les investisseurs en 2022. L'aspect positif de cette situation est que l'époque des taux d'intérêt bas, nuls voire négatifs semble être derrière nous. Les obligations, en particulier celles des entreprises, offrent de nouveau un rendement acceptable. Les obligations d'entreprise du segment investment grade affichent ainsi un rendement d'environ 3,7% (ICE BofA Euro Corporate Index, duration: 4,8). La prime de risque par rapport aux emprunts d'État est devenue nettement supérieure à la moyenne sur le long terme. Selon nous, ces rendements compensent les risques de cours encore existants, surtout si l'on reste défensif (court) en termes de duration («durée moyenne»).

Le marché des actions offre également des opportunités. En Europe notamment, le niveau de valorisation est devenu nettement plus avantageux. Cela justifie à nos yeux un positionnement neutre sur le marché des actions, notamment pour les investisseurs orientés vers le long terme. Même les pertes de l'année 2022 se relativisent si l'on prend en compte les excellents résultats des années précédentes. Étant donné que l'incertitude concernant l'ampleur des hausses de taux d'intérêt à venir des banques centrales est élevée, que la croissance économique devrait continuer à ralentir et que la pression sur les marges bénéficiaires des entreprises s'est accrue, nous continuons pour l'instant à naviguer à vue. Nous sommes toutefois convaincus que des opportunités d'investissement intéressantes se présenteront plus tard en 2023, lorsque la fin des hausses de taux et la stabilisation de l'activité économique seront perceptibles.

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