Un compromis faucons-colombes

Bruno Cavalier, ODDO BHF AM

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Si les faucons sont les plus bruyants dans les médias, ce ne sont pas forcément ceux qui pèsent le plus.

Quoique vigilante au risque d’inflation, la BCE maintient une attitude de patience, à la différence de la Fed qui, au contraire, est pressée d’amorcer le resserrement de sa politique monétaire. Début 2021, la Fed était patiente elle aussi et n’envisageait de monter ses taux qu’en 2023 ou 2024. Désormais, il est probable qu’elle monte ses taux dès mars 2022, avec trois ou quatre hausses sur l’ensemble de l’année. Pourrait-on connaître un même changement de pied à la BCE dans les prochains mois? 

Une hausse des taux repoussée fin 2023

La BCE ne publie pas de projection sur son taux directeur mais, vu les déclarations récentes des officiels et sa fonction de réaction, une hausse des taux est exclue en 2022 et plutôt envisageable vers la fin 2023. Il serait en effet peu logique de poursuivre les achats d’actifs jusqu’à la fin de l’année 2022 - au moins - et de remonter les taux en même temps. Bien sûr, ces vues sont conditionnelles à l’état des pressions inflationnistes. L’inflation en zone euro a terminé 2021 à 5% sur un an. Dès janvier, des effets techniques comme la TVA allemande vont ralentir ce rythme mais, tant que les prix de l’énergie ne seront pas revenus à la normale, l’inflation sera toujours au-dessus de la cible. La BCE sait faire la part des facteurs exceptionnels dans le choc d’inflation. Hors énergie, l’inflation en zone euro reste faible et il n’y a pas d’effets de second tour sur les salaires. Le débat entre faucons et colombes est à suivre de près. 

Au Royaume-Uni, le chômage poursuit sa décrue en ligne droite depuis un an et n’est pas loin de revenir vers le bas niveau d’avant la pandémie.
Un climat troublé en Europe

Deux ans de crise sanitaire ont rendu une partie de l’opinion publique de l’Union Economique et Monétaire (UEM) moins docile face aux restrictions que les Etats imposent pour protéger les systèmes hospitaliers d’un débordement. Cela crée un climat social assez turbulent et, par suite, cela peut affecter le moral des consommateurs. Depuis trois mois, l’indice de la Commission est reparti à la baisse. La vague Omicron se révèle semble-t-il bien moins grave que ce que pas mal de prédictions alarmistes suggéraient à son début. Les conditions d’emploi évoluent favorablement, ce qui est, au bout du compte, l’élément déterminant du comportement de dépenses.

En France, la vague Omicron dépasse toutes les précédentes en nombre de tests et, par suite, en nombre de «cas» positifs mais c’est la plus insignifiante en gravité. Reste que cela peut causer des perturbations à cause de l’absentéisme qui en résulte. La confiance des entreprises pourrait se replier. Son niveau, largement au-dessus de la normale, ne suscite pas de grosse inquiétude. 

L’économie chinoise pâtit du freinage du secteur de la construction et de la politique sanitaire zéro-COVID.

Au Royaume-Uni, le chômage poursuit sa décrue en ligne droite depuis un an et n’est pas loin de revenir vers le bas niveau d’avant la pandémie. A cause du Brexit, le marché du travail connaît un choc sur l’offre de travail, ce qui attise les difficultés de recrutement. Le pic d’inflation n’est pas attendu avant avril prochain, lorsque les prix réglementés de l’énergie seront remis à jour. Elle pourrait alors dépasser les 6%. 

Entretemps, la Chine ralentit…

Selon les estimations officielles, la croissance du PIB réel chinois a ralenti au quatrième trimestre 2021, ressortant à 4,0% sur un an, le plus faible rythme de l’histoire moderne hormis le choc du premier trimestre 2020. La comparaison avec la fin 2020 est, précisons-le, défavorable puisque la Chine était alors en plein rebond post confinement. Le rythme de croissance trimestriel ressort à 1,6% t/t, ce qui est inférieur à la moyenne pré-pandémie (1,8% en moyenne sur 2015-2019). L’économie chinoise pâtit du freinage du secteur de la construction et de la politique sanitaire zéro-COVID. Cela pèse directement sur la demande des ménages, perturbe la production domestique et les échanges internationaux. En décembre, les ventes au détail affichent un gain de seulement 1,7% t/t sur un an.

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