Trop tôt pour exclure un atterrissage en douceur

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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L’actualité récente a entretenu l’espoir que l’atténuation de la pression inflationniste permette aux banques centrales de se montrer un peu plus conciliantes d’ici quelques mois.

© Keystone

Il y a dix jours, l’indice S&P 500 a cédé 1,6%. Il a ainsi achevé la semaine en question en repli de 1,2%, après l’annonce de créations d’emploi plus importantes que prévu en mai. Ce chiffre a accentué la crainte que la Réserve fédérale américaine (Fed) ne soit obligée de relever ses taux de manière plus drastique pour enrayer la pression inflationniste. Décryptage.

En mai, l’économie américaine a créé 390'000 emplois de plus qu’elle n’en a détruit, alors que le consensus tablait sur 325'000. Le rendement des bons du Trésor américain à dix ans a augmenté de 20 points de base (pb) au cours de la semaine, à 2,94%.

Néanmoins, l’actualité récente a également entretenu l’espoir que l’atténuation de la pression inflationniste permette aux banques centrales de se montrer un peu plus conciliantes d’ici quelques mois. Selon la Recherche d’UBS, un atterrissage en douceur reste possible. Explications.

Augmentation de la main d’œuvre

On observe de timides signes que la main d’œuvre suffira à répondre à la forte demande des entreprises. Le taux de chômage est resté stable à 3,6% et le taux d’activité a grimpé à 62,3% en mai, contre 62,2% en avril, grâce aux 330'000 individus entrés sur le marché du travail.

Récemment, la publication de l’enquête JOLTS (Job Openings and Labor Turnover Survey) a montré que les postes à pourvoir ont diminué de près d’un demi-million en avril. Même s’ils restent quasiment deux fois plus nombreux que les demandeurs d’emploi aux Etats-Unis.

Ralentissement de la hausse des salaires

Le ralentissement de la hausse des salaires pourrait éloigner le spectre d’une spirale salaires-prix. Le salaire horaire moyen a augmenté de 0,3% sur un mois, un peu moins que prévu (+0,4%). Depuis janvier, les salaires augmentent de l’ordre de 4% sur un an, un taux qui serait compatible sur le long terme avec le taux d’inflation de 2% visé par la Fed.

Toutefois, la Fed surveillera aussi d’autres indicateurs comme le baromètre des salaires de son antenne d’Atlanta pour avoir la confirmation d’une modération de la progression des salaires.

Les autres indicateurs

Aux Etat-Unis, d’autres indicateurs confortent le scénario d’un atterrissage en douceur de l’économie américaine. Le dernier Livre beige de la Fed, qui repose sur des entretiens avec des entreprises clés et d’autres sources dans les différents districts de la Fed, suggère une lente normalisation de la demande, ainsi qu’une atténuation de la pression sur les prix.

Dans certaines zones du pays, le marché de l’emploi commence à se détendre. L’indice ISM des directeurs d’achat dans le secteur manufacturier reste solidement ancré en territoire expansionniste (56,1 en mai après 55,4 en avril). La baisse des délais de livraison des fournisseurs suggère une atténuation des dysfonctionnements des chaînes d’approvisionnement liés à la pandémie.

Jusqu’ici, les données sont cohérentes avec une issue positive, qui verrait une modération de la progression des salaires grâce à une décélération graduelle de la demande de main d’œuvre, atténuant ainsi la menace d’une spirale salaires-prix. Dans le même temps, la sécurité de l’emploi continuera de soutenir la consommation des ménages.

Selon le scénario central de la Recherche d’UBS, l’inflation enregistrera une décrue tout en restant supérieure aux objectifs des banques centrales. En outre, l’activité économique ralentira tout en restant en expansion et les marchés termineront l’année plus haut qu’à l’heure actuelle.

Les valeurs décotées et de la santé

Dans ce contexte, il est suggéré de privilégier les valeurs décotées qui, historiquement, ont tendance à surperformer lorsque l’inflation est supérieure à 3%. En outre, comme les indicateurs reflètent toujours une situation incertaine, le spectre d’une récession induite par la Fed devrait rester présent.

Tout bien considéré, la volatilité devrait perdurer. Les investisseurs feraient donc bien d’étoffer leur exposition aux segments plus défensifs comme les valeurs de la santé et les titres de qualité.

Les questions à se poser dans l’immédiat
  • Et maintenant, que fera la BCE?
    Les investisseurs suivront de près la réunion de la Banque centrale européenne (BCE) du mois de juillet qui devrait accoucher d’un premier relèvement des taux directeurs. Avant cela, la BCE livrera peut-être des indices sur le nombre et sur l’ampleur des relèvements envisageables cette année.
     
  • La décrue de l’inflation aux Etats-Unis se poursuivra-t-elle?
    La publication de l’indice des prix à la consommation (IPC) de mai est attendue avec fébrilité après la légère décrue observée en avril. En effet, les investisseurs guettent les signes que l’inflation a atteint son apogée. Ces chiffres seront importants pour les anticipations de relèvement des taux de la Fed et donc pour le dollar américain.
     
  • Le déconfinement se poursuivra-t-il en Chine?
    La demande chinoise influence grandement les prix du pétrole à court terme. C’est pourquoi les investisseurs guetteront les premiers signes de rebond de l’activité économique avec l’assouplissement des restrictions sanitaires prises face au Covid-19.

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