Sur le social, la sincérité paie à long terme

Antoine Mach, Covalence SA

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Au cours des douze derniers mois, cependant, le cynisme l’emporte dans la plupart des secteurs.

Les entreprises à risque élevé de greenwashing obtiennent-elles des résultats boursiers supérieurs ou inférieurs à celles dont le risque est jugé faible? C’est à cette question que tente de répondre cet article, en se focalisant cette fois-ci sur les enjeux sociaux (le S de ESG)1.

L’agence de notation Covalence a récemment développé un indicateur de risque d’écoblanchiment mesurant les écarts entre les promesses et les pratiques des entreprises sur les questions de durabilité2. Cet indicateur est obtenu en comparant un score de sentiment basé sur des données prospectives (reflet des engagements pour l’avenir), et un score de sentiment basé sur des données rétrospectives (reflet des actions passées).

En partant d’un univers de 2500 sociétés cotées au plan international, deux groupes ont été constitués: les sociétés à faible risque de greenwashing, et les sociétés affichant un risque moyen ou élevé. Chaque groupe représente un portefeuille fictif équipondéré. La performance moyenne des deux portefeuilles a été calculée sur plusieurs périodes: 10, 5, 3 et 1 an, sans rebalancement (buy and hold).

La période actuelle, marquée par la guerre en Ukraine, génératrice d’incertitudes et d’anxiété, semble favoriser les comportements cyniques et sanctionner les engagements sincères.

Sur 10 ans (mai 2012 – avril 2022), les sociétés à faible risque d’écoblanchiment affichent une performance supérieure de 3,6% (139,9% vs 136,2% pour le groupe des entreprises à risque moyen ou élevé). Cette surperformance s’observe principalement dans les secteurs suivants: industriel (avec par exemple Vestas, Plug Power et Kardex); consommation discrétionnaire (Yamaha, Lowe's, Lululemon Athletica); consommation de base (Constellation Brands, Keurig Dr Pepper, Kesko); et finance (SVB Financial, London Stock Exchange, Moody's).

Les sociétés contribuant à cette surperformance sont basées dans des pays comme la Suisse (Lonza, Bachem, Sika), l’Allemagne (Encavis, Merck KGaA, Deutsche Boerse), la Grande Bretagne (Rentokil Initial, Persimmon) ou le Canada (Canadian Solar, Ballard Power Systems, Alimentation Couche-Tard).

En revanche, sur 5 ans, les entreprises à risque moyen ou élevé de greenwashing font mieux que les autres (34,1% vs 28,5%). C’est aussi le cas sur 3 ans, mais de manière plus légère (26,6% vs 25,9%). Pour favoriser les entreprises fiables et crédibles en termes de durabilité tout en soignant la performance de ses investissements, il fallait considérer ces secteurs en priorité: industrie et utilities.

Sur les 12 derniers mois (mai 2021 – avril 2022), on calcule également une surperformance des titres marqués par un risque important de greenwashing (-0,25% vs -2,1%). Dans trois secteurs, seulement, les sociétés à faible risque font mieux, même si leur performance moyenne est négative: télécommunications, consommation discrétionnaire, et technologie.

D’un autre côté, l’industrie, la consommation de base, la santé et les matériaux affichent en moyenne une performance boursière positive sur 1 an. Dans chacun de ces secteurs, ce sont les sociétés à risque élevé de greenwashing qui produisent cette performance positive, alors que les sociétés à bas risque présentent un résultat négatif.

Sur les utilities et l’énergie, on porte un regard similaire mais plus nuancé, car si les entreprises marquées par un risque d’écoblanchiment font globalement mieux que les autres, celles-ci affichent également une performance positive. Parmi les utilities, c’est ainsi le cas de Acciona, et dans l’énergie, de Equinor.

La période actuelle, marquée par la guerre en Ukraine, génératrice d’incertitudes et d’anxiété, semble favoriser les comportements cyniques et sanctionner les engagements sincères. Elle bouscule les critères et taxonomies ESG (charbon, pétrole, nucléaire, armement, par exemple). Alors, quand commencera le prochain cycle, optimiste plutôt que cynique, favorisant la durabilité à long terme plutôt que l’opportunisme à court terme?  

 

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