Revirement énergétique dans le secteur de l’accueil

Lionel Saul & Tatyana Tsukanova, EHL Hospitality Business School

2 minutes de lecture

Comment le secteur de l’accueil fait face à la crise en mettant en place des systèmes de gestion d’énergie plus efficaces?

Perspectives de l'industrie

Tom Standage, l’éditeur en chef de The World Ahead 2023, a désigné le «tourisme de revanche» comme l'une des dix tendances à suivre en 2023. Ce terme décrit le rebond du tourisme post pandémique qui devrait presque atteindre le niveau prépandémique d’ici fin 2023. Cependant, la crise énergétique actuelle prend rapidement le pas sur le Covid-19. Depuis le début de la guerre en Ukraine, le marché énergétique s’est emballé et les prix du gaz et du charbon ont atteint des niveaux records. De plus, les pressions inflationnistes émanant du marché de l'énergie ont entraîné un risque de récession. Inévitablement, la situation actuelle a un impact sur la reprise du tourisme.

La menace la plus imminente frappant le secteur de l’hospitalité est l'augmentation du coût de l'énergie. Comme l'a résumé Sébastien Bazin, PDG d'Accor, «l'énergie représente généralement environ 8% des coûts totaux, mais ce chiffre pourrait atteindre 25%».

Les grands acteurs pourraient être en mesure d'absorber le choc. Cependant, le secteur de l’accueil étant extrêmement fragmenté, de nombreux petits acteurs sont impuissants face à la crise. Au Royaume-Uni, environ un tiers des entreprises du secteur pourraient faire faillite d'ici le début de l'année 2023. De plus, les clients étants eux-mêmes confrontés à des factures d'énergie à la hausse, certains ménages sont contraints de réduire leurs dépenses discrétionnaires. Par conséquent, les hôtels et les restaurants risquent d'être confrontés à un nombre croissant de lits et de tables vides, résultant en une baisse du revenu. En conséquence, certains acteurs du secteur élaborent différentes stratégies de survie. Par exemple, le plus grand hôtel de Hongrie a décidé d'adopter une approche radicale, en arrêtant toutes ses activités durant l'hiver. D'autres établissements optent pour la fermeture de certaines installations ou d’étages entiers. Outre les hôtels et les restaurants, certaines attractions touristiques ont également fermé leurs portes, impactant négativement l'attractivité de certaines destinations.

Parallèlement, les législateurs européens commencent également à agir afin de protéger leur économie de l’impact de la crise énergétique. En août dernier, l'Union européenne a prévu un plan de sauvetage de 280 milliards de dollars afin d’aider les entreprises à réduire leurs factures d'énergie. Bien que ces mesures nécessitent des investissements importants, des actions immédiates peuvent être entreprises à moindre coût, comme l'utilisation de LED, une réduction de l'éclairage ou l'incitation des clients à renoncer au service de nettoyage.

Néanmoins, cette crise présente également des opportunités inattendues. Par exemple, les destinations méditerranéennes semblent avoir développé une proposition de valeur peu conventionnelle. En effet, certaines agences de voyage présentent les vacances en Espagne comme plus rentables que de rester chez soi, pour les résidents du Royaume-Uni, car le chauffage pourrait bientôt devenir plus cher qu'un séjour à l'hôtel.  

Dans l'ensemble, la plupart des entreprises hôtelières devront attendre la fin de l'hiver pour profiter pleinement de la vague du «tourisme de revanche» qui s'annonce.

L'innovation

Sans aucun doute, l'augmentation du coût de l'énergie challenge les entreprises du secteur de l’accueil qui cherchent à introduire des systèmes de gestion énergétique. Comme prévu, l'éclairage par détecteur de mouvement, les douches économes ou encore les thermostats intelligents deviennent des innovations cruciales pour faire face à cette crise.

De plus, les acteurs de l'hôtellerie font preuve de créativité afin de réduire les coûts. Certains d'entre eux proposent des expériences de «dîner dans le noir», alors que d’autres utilisent les médias sociaux pour faire appel à leur communauté. Par exemple, un restaurant familial nigérian, ouvert à Londres en 2020, a partagé ses difficultés avec sa communauté et a obtenu plus de 600 réservations en quatre jours, lui permettant de maintenir son activité à flot.

Parallèlement, il y a de la place pour des changements technologiques et des innovations plus notables. La start-up indienne On2Cook a mis au point un appareil de cuisson promettant d'économiser jusqu'à 70% de temps et 50% de consommation d'énergie.

Les stations de ski se joignent également à la course à la réduction des émissions en augmentant la demande de logements économes en ressources et à faible impact environnemental. Sur le long terme, une autre solution pourrait consister à trouver des moyens plus efficaces d'utiliser et de stocker l'énergie renouvelable, comme les batteries à sable.

Ce qui est certain, c’est que de plus en plus d'innovations et de start-ups verront le jour dans ce domaine, à mesure que la demande de solutions durables augmentera dans le secteur de l'hôtellerie et de la restauration.

 

Article original: https://hospitalityinsights.ehl.edu/energy-shift-trends-in-hospitality

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