Nouvelles pratiques de l'économie circulaire dans l’hôtellerie

Florent Girardin & Luciano Lopez, EHL Faculty

2 minutes de lecture

Quand les pratiques 3R classiques – réduire, réutiliser, recycler - utilisées par l’économie circulaire ne suffisent pas.

©Keystone

 

La perception des clients

Toute personne ayant visité un hôtel au cours de la dernière décennie aura vu le message dans la salle de bain demandant aux clients de contribuer à l'économie des ressources en ne posant la serviette sur le sol que si une nouvelle serviette est nécessaire. Tandis que certains clients perçoivent ce message de manière positive et associent l'hôtel à une entreprise respectueuse de l'environnement, d'autres auront une perception totalement différente, et verront un moyen pour l'hôtel de réduire ses coûts en nettoyant moins de serviettes par jour, au détriment du confort des clients. Ainsi, en fonction de la perception du client, l'impact sur l'hôtel (perception de la marque, volonté de rester, volonté de payer, etc.) peut être bon ou, de manière inattendue, mauvais.

Véritable engagement de l’entreprise: la clé de la réussite de l’économie circulaire

De nombreux experts ont affirmé que les pratiques classiques d'économie circulaire (EC) consistant à réutiliser, réduire ou recycler («les 3R») sont moins circulaires que les pratiques impliquant une nouvelle réflexion ou conception de la part de l’entreprise. En outre, les pratiques classiques «3R» peuvent être perçues comme une stratégie de réduction des coûts plutôt que comme un engagement en faveur d'une planète plus propre. Cette différence peut avoir un impact sur la volonté des clients de payer pour une chambre d'hôtel. Notre question de recherche est la suivante; Quelles pratiques d’économie circulaire – celles impliquant une réflexion ou une nouvelle conception – ou celles impliquant uniquement les 3R, impacte le plus positivement la volonté des clients à payer un prix supérieur?

Pour répondre à cette question, nous avons utilisé trois pratiques d'EC, soigneusement sélectionnées parmi de nombreuses pratiques d'EC, traitant de trois problèmes différents : la consommation d'eau, la consommation d'énergie et les émissions de CO2. Pour chacune de ces trois pratiques, nous avons sélectionné une version 3R classique et une autre version, impliquant une reconception des processus. Pour présenter les pratiques d'EC, nous avons créé un site web d'hôtel fictif, puis nous avons interrogé plusieurs centaines de consommateurs d'hôtels pour qu'ils répondent à une série de questions sur leur avis concernant cet hôtel, suite à la consultation du site web.

Les résultats sont clairs: la mise en œuvre d’actions impliquant une nouvelle réflexion ou conception augmente significativement la volonté de payer des clients, alors que la mise en œuvre de pratiques d'EC classiques de type 3R ne modifie pas la volonté de payer des clients.

Source graphique: données collectées par Dr. Girardin et Dr. Lopez dans le cadre de leur recherche.

 

Attitudes à l'égard des pratiques

Mais alors, pourquoi un tel résultat? Nous aimerions répondre à cette question par un exemple simple. Supposons que vous ayez été informé qu'une personne extrêmement riche a fait un don de 1'000 dollars. Quelle est votre attitude envers cette personne? Supposons maintenant que cette même personne n'était pas riche du tout, mais que les 1'000 dollars étaient au contraire ses économies annuelles. Votre attitude envers cette personne est-elle la même? Si non, c'est probablement parce que vous sentez une différence dans l'engagement que ce don représente, en fonction de la situation financière de la personne, bien que celle-ci soit la même personne. Nous pensons que c’est le même phénomène pour les hôtels. Les résultats de notre étude montrent clairement que l'attitude joue un rôle de médiateur dans la relation entre le type de pratiques d'EC mises en œuvre par un hôtel et la volonté des clients de payer.

A ce stade, on peut se demander ce qui fait qu'une pratique d'EC est perçue comme un engagement fort par les clients? C'est sans aucun doute la question à un million de dollars. Nos résultats décrits ci-dessus répondent partiellement à la question en distinguant les pratiques impliquant une nouvelle réflexion ou conception des pratiques «classiques», bien que la distinction entre les deux ne soit pas toujours si évidente.

Une communication prudente

Après de nombreuses recherches, nous avons réalisé que les pratiques d'EC doivent non seulement être soigneusement sélectionnées pour garantir un impact positif sur la situation économique de l'entreprise, mais qu'elles doivent également être soigneusement communiquées. Tout d'abord, selon les résultats que nous avons partagés ci-dessus, les pratiques qui impliquent un engagement fort de la part de l'entreprise doivent être communiquées comme telles. Les clients doivent ressentir autant que possible l'implication honnête de l'entreprise. Cela implique de facto que la communication sur les pratiques classiques d'EC peut avoir peu ou pas d'impact.

Conclusion

«Il n'y a pas de planète B», c'est un fait. Les habitudes et les modèles de consommation changent, et les processus de production doivent s'adapter. Notre recherche vise à aider les hôteliers à progresser plus facilement vers l'économie circulaire en comprenant mieux quelles sont les meilleures pratiques. De nos jours, les pratiques d’EC sont un moyen de se différencier, et même de faire plus de profits. Dans un avenir proche, nous pensons que les pratiques d'EC ne seront plus utilisées pour se différencier des concurrents mais simplement pour rester dans la norme. Le plus tôt une entreprise passe à la mise en œuvre, le mieux ce sera.

 

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