Récession imminente et défis pour l’industrie

Thomas Hempell, Generali Investments

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Des marchés du travail solides et une demande refoulée dans un contexte d'épargne résiduel soutiennent toujours les services.

Face aux vents contraires des hausses de taux et à la menace d'un resserrement du crédit, les États-Unis se dirigent vers une récession au second semestre, même si les risques sont plus élevés au quatrième trimestre en raison de la résilience du marché du travail et de la consommation. La zone euro devrait y échapper, mais la récession technique observée au cours du semestre d'hiver devrait être suivie de plusieurs trimestres de croissance médiocre.

Des obstacles subsistent pour l'industrie manufacturière

Le secteur manufacturier mondial est déjà dans le marasme, malgré le soulagement apporté par la baisse des prix de l'énergie et le relâchement des tensions dans les chaînes d'approvisionnement. L'écart entre les indices PMI mondiaux des services et de l'industrie manufacturière est le plus élevé depuis la grande crise financière. Cet écart pourrait se réduire progressivement, mais un rebond de la production industrielle mondiale est peu probable dans l'immédiat. Le commerce mondial devrait rester modéré, car le ralentissement cyclique dû à la hausse des taux d'intérêt se heurte à une fracture structurelle de l'économie mondiale dans un contexte de tensions géopolitiques (Ukraine, Taïwan, conflit technologique entre les États-Unis et la Chine). L'élan de réouverture de la Chine s'essouffle déjà, ce qui fait peser des risques sur la croissance. Un nouveau soutien politique est en vue, mais il sera modéré et n'apportera pas de soulagement majeur à l'économie mondiale.

Le pouvoir de fixation des prix des entreprises ne se relâchera que lentement, tandis que la politique budgétaire s'efforcera de contenir les mesures de soutien.

L'inflation globale devrait diminuer de manière visible. Les effets de base importants des augmentations de prix de l'été dernier se font sentir. La baisse des prix du gaz et du pétrole et la réduction des goulets d'étranglement constituent un soulagement important. Aux États-Unis, la baisse des loyers sera également bénéfique. Mais les banques centrales n'ont pas encore de raison de crier victoire. Les pressions sur les prix dans les services restent élevées. L'échauffement des marchés du travail fait peser le risque d'une spirale salaires/prix bien ancrée. Le pouvoir de fixation des prix des entreprises ne se relâchera que lentement, tandis que la politique budgétaire s'efforcera de contenir les mesures de soutien. Les problèmes bancaires et les préoccupations en matière de stabilité financière incitent à la prudence, mais les principales banques centrales devraient encore procéder à d'ultimes hausses de taux au cours de l'été et s'en tenir à leur politique de resserrement quantitatif. Un pivot à court terme n'est pas en vue. La Fed est susceptible de mener le cycle d'assouplissement dans un contexte de récession imminente, mais compte tenu de la persistance des pressions sur les prix, il est peu probable que cela se produise avant début 2024.

Zone euro: Au bord de la récession

La zone euro est tombée en récession technique au cours de l’hiver. Mais les indicateurs suggèrent que l'activité s'est à nouveau développée. Toutefois, pour le second semestre, un nouveau ralentissement de l'activité est à prévoir, ce qui placerait la zone euro au bord de la récession. Les principaux obstacles émanent de l'environnement mondial qui maintient l'industrie manufacturière sur une trajectoire descendante. Dans le même temps, les conditions de financement continueront à se détériorer, le resserrement de la politique monétaire ayant fait sentir ses effets. Dans la zone euro, les économies fortement orientées vers l'exportation, comme l'Allemagne et les Pays-Bas, sont particulièrement touchées.

L'inflation globale passera probablement sous la barre des 3% en glissement annuel, principalement en raison de la baisse des prix de l'énergie vers la fin de l'année, et que l'inflation annuelle passera de 5,4% en 2023 à 2,5% en 2025. Le marché du travail devrait rester tendu (en raison de la rétention de main-d'œuvre et du départ à la retraite des baby-boomers), tandis que la croissance des salaires restera élevée. Cela soutient l'activité intérieure. En outre, il existe encore un énorme excédent d'épargne (d'environ 1’000 euros) sur les étagères qui pourrait être déployé, au moins en partie. Dans l'ensemble, il est plus probable qu'une rechute dans une récession technique puisse être évitée, tout en reconnaissant que les risques de détérioration ont clairement augmenté.

La BCE a relevé son taux directeur (taux de dépôt) à 3,5% en juin. Une nouvelle hausse à 3,75% d'ici juillet semble très probable. Toutefois, la BCE pourrait s’arrêter là. L'inflation sous-jacente restera manifestement beaucoup trop élevée, favorisée par une forte croissance des salaires. Mais selon la BCE, il y a peu de signes d'effets second. De plus, la pression inflationniste est en train de s'atténuer. En outre, lors de la réunion de septembre, la BCE devra probablement revoir à la baisse ses perspectives d'activité optimistes, qui supposent que la croissance revienne à son potentiel et s'y maintienne.

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