Lueurs d’espoir ou premiers bourgeons sur les marchés financiers?

François Savary, Prime Partners

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A l’aube de la saison des bénéfices et malgré le meilleur comportement des marchés, il ne nous apparait pas justifié de reconsidérer notre positionnement défensif sur les marchés boursiers.

On a coutume de dire que l’hirondelle ne fait pas le printemps. Une manière d’inciter à ne pas céder trop tôt à l’espoir de meilleurs jours sur le front climatique. Or, l’année boursière a commencé en fanfare, particulièrement en Europe, avec son lot d’optimisme renouvelé ou de doutes réaffirmés selon les inclinaisons de chacun. Cependant, les optimistes ont repris les rennes du marché depuis quelques jours!

On ne peut pourtant pas dire que la fin de 2022, marquée une fois encore par des mouvements erratiques sur les actifs financiers, nous avait fourni des signes annonciateurs d’un contexte nettement plus favorable pour les obligations et les actions dès les premiers jours de 2023. Et pourtant, nous achevons les deux premières semaines de l’année avec une progression marquée des indices boursiers et une détente conséquente des rendements obligataires par rapport à la période pré-fêtes.

Les causes de ces mouvements récents sont multiples évidemment mais il nous semble que les facteurs économiques y participent pour une grande part.

D’abord sur le front de l’inflation, un élément dont nous n’avons eu de cesse de réitérer l’importance au cours des derniers mois, défendant un scénario d’inflexion significative de la hausse des prix au cours du premier trimestre de 2023, les développements récents ont conforté notre appréciation.

A cet égard, plusieurs données tant sur les indices des prix à la consommation en Europe et aux USA que sur la progression des gains horaires américains sont venus confirmer que nous n’avions peut-être pas eu si tort de refuser les visions les plus pessimistes sur l’avenir de l’inflation, contrairement à une partie des opérateurs financiers. Il est vrai qu’un climat relativement doux, un facteur aléatoire qui a «tourné» dans le bon sens, a facilité ce mouvement; une  autre manière de dire que certains acteurs des marchés avaient peut-être choisi des options bien trop négatives sur le front de la menace d’une crise énergétique mondiale.

Les chiffres relatifs à l’activité économique, particulièrement en Europe, ont démontré que les pires prédictions sur une récession étaient peut-être excessives.

Enfin, pour ne pas dire surtout, les données relatives aux gains salariaux américains sont venues nous rappeler qu’il ne faut jamais se laisser porter à exagérer un chiffre pour en extrapoler des conclusions hâtives; ainsi, non seulement la dernière donnée publiée s’est révélée plus faible qu’attendu mais les révisions baissières sur celles de novembre et décembre ont démontré que ceux qui avaient un peu trop rapidement penché dans les camp de la mise en place d’une inflation structurelle aux USA à la lumière d’un seul chiffre avaient été trop vite en besogne!

Des signes plus favorables sur la hausse des prix, sachant que ces derniers vont encore subir les conséquences des hausses de taux par les banquiers centraux depuis 9 mois, il n’en fallait pas plus pour que les pires scénarios sur le front d’un processus de resserrement monétaire mondial fassent désormais l’objet d’une réévaluation. Il ne devient peut-être plus aussi déraisonnable de miser sur la fin des relèvements des taux directeurs US d’ici le début du printemps, alors que certains ne l’envisageait que pour la fin du premier semestre, il y a quelques semaines encore.

Il faut aussi mentionner les chiffres relatifs à l’activité économique, particulièrement en Europe, qui ont démontré que les pires prédictions sur une récession étaient peut-être excessives. La résistance de l’économie européenne en fin 2022 en a surpris plus d’un, en partie du fait que la crise énergétique ne s’est finalement pas révélée aussi forte que prévue. En outre, certains ont peut-être trop vite occulté l’étendue des mesures de soutien à l’économie que la majorité des pays du vieux continent ont mis en œuvre dans le sillage de l’invasion de l’Ukraine et qui ont certainement contribué à soutenir les dépenses de consommation au cours des derniers mois.

De plus et dans la perspective de réfléchir au potentiel de croissance pour les 3 à 6 prochains mois, avez-vous remarqué que les autorités suisses compétentes ont récemment fait un virage important sur la question de l’imminence d’une pénurie énergétique ou encore que la France est à nouveau exportatrice nette d’énergie? Il suffit de se remémorer les discussions du dernier trimestre 2022 pour voir combien certains investisseurs doivent être surpris de telles évolutions qu’ils n’avaient pas considérer dans l’élaboration de leurs perspectives conjoncturelles 2023!

Les éléments susmentionnés et leur impact évident sont largement intégrés par les marchés. Ces derniers vont désormais subir le test de la saison des résultats des sociétés, qui va véritablement dominer les marchés à partir de jeudi et l’accélération notoire des publications tant sur le front des secteurs économiques couverts que sur le nombre de sociétés concernées.

Nous ne sommes pas convaincus que la volatilité que nous avons affrontée en 2022 ait «comme par magie» disparu.

Ce test sera particulièrement important, car malgré des anticipations bénéficiaires qui ont été révisées à la baisse au cours des derniers mois les opérateurs ne sont pas préparés à des données qui seraient fortement négatives et/ou à des «guidances» très réservées de la part des compagnies cotées!

Les lueurs d’espoir peuvent aussi bien être fugaces que déboucher sur l’émergence des premiers bourgeons – qui pour le coup sont souvent révélateurs de l’arrivée du printemps. A l’aube de la saison des bénéfices et malgré le meilleur comportement des marchés en ce début d’année, il ne nous est pas apparu justifié de reconsidérer notre positionnement défensif sur les marchés boursiers.

Nous prenons acte du fait que les conditions conjoncturelles se révèlent moins «noires» que certains avaient pu le craindre et d’une amélioration plus que bienvenue des perspectives sur les taux directeurs US ; cependant, nous ne pensons pas que cela justifie de courir après le rallye récent des actions. Nous ne sommes pas convaincus que la volatilité que nous avons affrontée en 2022 ait «comme par magie» disparu.

Nous saisissons l’opportunité de cette chronique pour vous adresser nos meilleurs vœux de bonne et heureuse année pour 2023. 

       

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