Le rebond boursier bienvenu de l’été est-il durable?

François Savary, Prime Partners

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Même si nous ne pouvons que nous réjouir de la reprise boursière des 2 derniers mois, nous ne sommes pas enclins à conseiller de «chasser» le rallye en cours.

Alors que la rentrée se profile à l’horizon, les investisseurs ont retrouvé le sourire, après un rebond boursier de plus de 10% sur certains indices. Un environnement bien différent de celui qui prévalait à la mi-juin, lorsque rien de semblait pouvoir arrêter la chute, tant des bourses que des marchés obligataires. Il est vrai que les attentes d’une «évidente» récession mondiale s’étaient alors largement imposées au sein de la communauté financière, achevant ainsi de faire du premier semestre 2022 l’un des pires de l’histoire récente pour les actifs financiers liquides. 

Et soudain, comme par enchantement serait-on tenté de dire, les investisseurs ont retrouvé l’espoir. Comment expliquer un tel revirement? Certainement en premier lieu à cause de l’évolution des taux d’intérêt, plus particulièrement celle des taux réels, qui ont amorcé une décrue relativement marquée au cours de l’été. L’effet, sans doute d’une réalité incontournable, les banquiers centraux ont «viré de bord» à 180 degrés, mettant clairement au cœur de leur action la lutte contre une inflation devenue excessive pour ne pas dire incontrôlée. En outre, la confirmation, au cours des 6 dernières semaines, que les résultats des sociétés au second trimestre 2022 n’étaient pas aussi mauvais que ce que certains avaient tenté de faire croire a certainement contribué à donner un élan complémentaire à la reprise des actions. 

Ces mouvements d’ampleur marquée au cours des derniers mois laissent nécessairement l’investisseur dans une position inconfortable. Se laisser porter par le mouvement ou adopter une position plus défensive? Cette question est surtout valable pour ceux qui ont su résister aux sirènes de la panique à la fin du printemps, en conservant leur position. Une décision loin d’être facile alors, il faut en convenir, face aux discours qui voulaient que les «évidences» trop longtemps réfutées ne faisaient que se concrétiser semaine après semaine alors que nous étions au cœur de la tourmente!

La conjugaison de multiples facteurs (économiques, politiques, sanitaires, géostratégiques) rend ce cycle particulièrement difficile à appréhender.

Nous l’avons dit à plusieurs reprises, ce cycle est tout à fait particulier. Loin de moi l’idée de considérer que «cette fois c’est différent»; cependant, la conjugaison de multiples facteurs (économiques, politiques, sanitaires, géostratégiques) rend ce cycle particulièrement difficile à appréhender. Le manque de visibilité est la seule évidence que l’on peut légitimement et honnêtement défendre lorsque l’on doit se positionner. A cet égard, les Etats-Unis offrent l’exemple parfait de cet état de fait. Avec deux trimestres consécutifs de repli du PIB, l’économie de l’Oncle Sam est en «récession technique» ; toutefois, alors que cette dernière a encore créé plus de 500'000 emplois le mois dernier et que le taux de chômage flirte avec les 3.5%, on peut difficilement défendre que la récession soit installée aux USA ! Au demeurant une analyse des composantes du PIB US au cours du premier semestre 2022 ne changerait pas le constat: nous sommes confrontés à une situation où les certitudes trop vite affirmées sont souvent fausses et accepter le manque de visibilité du cycle est inévitable.

Sur le front de l’inflation, qui demeure selon nous l’élément central qui doit mobiliser l’attention - la croissance étant devenue une variable d’ajustement pour des banquiers centraux en recherche de rédemption après les erreurs commises à la fin 2021 -, les premiers signes d’une possible normalisation se sont faits jour au cours des mois d’été. Nous avons toujours défendu l’idée qu’un repli de l’inflation était possible en seconde partie d’année avec la convergence de deux phénomènes : une destruction de la demande d’une part et de meilleures conditions d’offre d’autre part. Il ne faut pas crier victoire trop tôt évidemment mais il y a des raisons d’espérer que le mouvement pourra se confirmer au cours des prochains mois. C’est en fin de compte le plus important, d’autant plus que les investisseurs ont peut-être succombé un peu trop vite au scénario d’un changement de cap rapide des banquiers centraux d’ici le printemps 2023, aux USA en particulier. 

Dès lors, même si nous ne pouvons que nous réjouir de la reprise boursière des 2 derniers mois, qui a ramené l’indice phare américain vers la barre des 4300, nous ne sommes pas enclins à conseiller de «chasser» le rallye en cours. Dans un contexte de visibilité réduite sur le cycle et de changements erratiques du sentiment des investisseurs, il faut savoir être raisonnable. Sommes-nous confrontés à un simple «rallye de marché baissier» ? Je n’en sais rien ! Cependant, il m’apparaît que désormais les principaux indices actions ne sont pas à des niveaux qui pourraient supporter des nouveaux signes qu’une récession est en cours de matérialisation ou, pire encore, que l’inflation n’est pas en mesure de poursuivre sa décrue. Dès lors, nous avons décidé, cette semaine, de réduire notre exposition en actions.    
 

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