Les actions grimpent alors que l’inquiétude quant au relèvement des taux s’atténue

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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La nette contraction de l’activité dans le secteur des services a conforté dans l’idée que le cycle de resserrement orchestré par la Fed s’approche de son terme.

© Keystone

Il y a dix jours, les actions américaines ont grimpé, portées par les signes de modération de l’inflation salariale, qui ont semblé calmer l’inquiétude des investisseurs, ces derniers se demandant jusqu’où la Réserve fédérale américaine (Fed) ira dans son resserrement monétaire.

L’indice S&P 500 a grimpé de 2,3%, une hausse qui a profité à l’ensemble des secteurs, tandis que l’indice Nasdaq, qui fait la part belle aux valeurs technologiques, s’est adjugé 2,6%.

Diminution des rendements obligataires

Les rendements obligataires ont diminué face aux signes de dégradation de la conjoncture économique. Le rendement des bons du Trésor américain à dix ans a baissé de 16 points de base (pb), à 3,56%, et celui des bons à deux ans a diminué de 20 pb, à 4,26%.

Le marché des contrats à terme sur les fonds fédéraux a reflété la baisse des anticipations concernant le niveau final des taux directeurs aux Etats-Unis (en juin prochain), désormais estimé à 4,96% contre 5,04% il y a dix jours.

Les créations d’emplois au plus bas

Le rapport sur l’emploi salarié non agricole aux Etats-Unis a fait état de 223 000 créations de postes, un chiffre plus élevé que prévu par le consensus (203 000). Néanmoins, les créations d’emplois sont au plus bas depuis décembre 2020.

Le salaire horaire moyen a augmenté de 0,3% en glissement mensuel et les chiffres des mois précédents ont été revus à la baisse, ce qui ramène la progression en glissement annuel à 4,6%, contre 5,1% le mois dernier.

Dans le détail, les chiffres sont mauvais pour la plupart avec notamment une baisse des nouvelles commandes et une augmentation des stocks. La hausse des prix se poursuit mais elle s’essouffle.
La hausse des prix ralentit

L'indice des directeurs d'achat (PMI) de l'Institut de gestion des approvisionnements (ISM) relatif au secteur des services est tombé à 49,6 en décembre, contre 56,5 en novembre, loin de l’estimation du consensus (55,0). Il est à son plus bas niveau depuis mai 2020.

Dans le détail, les chiffres sont mauvais pour la plupart avec notamment une baisse des nouvelles commandes et une augmentation des stocks. La hausse des prix se poursuit mais elle s’essouffle.

A quoi faut-il s’attendre?

Les responsables de la Fed pourraient voir d’un bon œil le ralentissement du salaire horaire moyen dont le rapport mensuel sur l’emploi fait état. La progression des salaires de 3,5% correspond à peu près au maximum qui serait compatible avec les 2% d’inflation visés par la Fed et les chiffres de décembre s’en rapprochent.

Toutefois, d’autres données montrent que le marché de l’emploi est tendu. La Fed attend davantage de signes tangibles d’atténuation de l’inflation salariale pour envisager une pause dans son cycle de relèvement des taux.

Un taux de chômage moindre

Le taux de chômage, qui est tombé de 3,6 à 3,5%, se situe désormais à son plus bas niveau depuis cinquante ans. Le rapport JOLTS (Job Openings and Labor Turnover Survey) de novembre a fait état d’une baisse limitée du nombre de postes vacants (-54'000 en glissement mensuel, à 10,46 millions). Il recense 1,74 poste vacant pour 1 demandeur d’emploi.

A noter que le taux de démissions reste élevé, ce qui s’accompagne d’une forte progression des salaires. Le baromètre des salaires de la Fed d’Atlanta montre que les travailleurs qui changent d’emploi obtiennent un salaire 8% plus élevé.

L’activité dans les services ralentit

Les investisseurs ont également été rassurés par les signes de contraction de l’activité dans le secteur des services aux Etats-Unis en décembre, une première depuis deux ans et demi. Si l’on fait abstraction de la baisse observée pendant la pandémie, il s’agit du plus mauvais chiffre pour l’indice ISM non manufacturier depuis 2009.

Cela est de nature à rassurer la Fed, qui était préoccupée par les tensions sur les prix dans le secteur tertiaire. La composante «prix payés» est tombée à son plus bas niveau depuis janvier 2021, ce qui suggère que les difficultés d’approvisionnement continuent de se résorber.

On entrevoit des points d’inflexion pour l’inflation, pour les taux d’intérêt et pour la croissance économique dans les mois à venir. Il conviendra alors d’envisager une prise de risque accrue.
Comment investir?

Les marchés devraient rester volatils. La Recherche d’UBS considère toujours que les conditions macroéconomiques nécessaires à un rebond durable des actions ne sont pas encore réunies.

Récemment, on a pu observer un repli des actions américaines après la publication des bons chiffres de l’emploi. Les investisseurs ont semblé réaliser que la Fed ne se contentera pas de la décrue des prix à la consommation aux Etats-Unis pour assouplir sa politique. Le ralentissement de l’inflation salariale entrevu il y a peu constitue un pas dans cette direction. Mais il ne s’agit que d’un chiffre isolé.

Privilégier les secteurs défensifs

Dans ce contexte, il est recommandé de rester exposé aux actions mais de privilégier les stratégies qui confèrent une protection à la baisse. S’agissant des actions, la Recherche d’UBS affiche toujours une préférence pour les secteurs défensifs à l’instar des biens de consommation de base et de la santé, ainsi que pour les marchés qui font la part belle aux valeurs décotées comme le Royaume-Uni, au détriment du marché américain où les valeurs technologiques sont prépondérantes.

Quant aux obligations, la préférence va aux titres de grande qualité. L’avis est plus réservé à l’égard des titres plus risqués.

Cela dit, on entrevoit des points d’inflexion pour l’inflation, pour les taux d’intérêt et pour la croissance économique dans les mois à venir. Il conviendra alors d’envisager une prise de risque accrue.

Les opportunités à ne pas manquer

Pour les investisseurs plus intrépides qui cherchent à identifier les pans du marché qui pourraient rebondir le plus si jamais ces points d’inflexion se présentent, on décèle certaines opportunités sur les marchés de début de cycle comme l’Allemagne, sur les valeurs fortement décotées, sur certains segments du secteur des semi-conducteurs et sur les probables bénéficiaires du déconfinement en Chine.

Sur le marché des changes, en décembre, la Recherche d’UBS a ramené son opinion sur le dollar américain de Most Preferred à Neutral, considérant que le billet vert a déjà connu son point culminant.

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