La rotation vers les valeurs cycliques devrait reprendre

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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95% des valeurs technologiques ont annoncé des bénéfices supérieurs aux attentes, ce qui est mieux que les secteurs les plus cycliques.

© Keystone

La saison des résultats du premier trimestre aux Etats-Unis s'annonce encore meilleure que prévu. Une bonne partie des entreprises de l'indice S&P 500 (représentant les trois quarts de sa capitalisation boursière) ont publié leurs résultats. 85% d’entre elles ont fait mieux que prévu par les analystes.

Dans l'ensemble, les résultats sont supérieurs de 25% aux prévisions, notamment grâce aux valeurs financières. Même si l'on exclut le secteur de la finance, le dépassement de 19% n'en reste pas moins impressionnant par rapport aux 5% observés en moyenne ces dernières années.

Nouveau sommet en vue

Les bénéfices sont donc en passe de grimper de près de 45% au premier trimestre, soit bien plus que l’estimation initiale de 30% de la Recherche d’UBS. Les bénéfices du S&P 500 vont atteindre un nouveau sommet trimestriel.

Les résultats d'entreprises meilleurs que prévu sont de nature à entretenir la progression des marchés.

En outre, les prévisions augmentent et la croissance du bénéfice par action (BPA) pourrait s'avérer supérieure au taux de 31% anticipé sur l'ensemble de l'année. Les résultats d'entreprises meilleurs que prévu sont de nature à entretenir la progression des marchés. Pour l'indice S&P 500, la Recherche d’UBS table sur un objectif de cours en fin d'année de 4400 points.

Les valeurs technologiques, et après?

Cette solidité financière est notamment due aux géants technologiques Facebook, Microsoft, Amazon, Apple et Alphabet, qui ont tous annoncé des résultats supérieurs aux prévisions du consensus. Les forces qui ont stimulé les bénéfices des entreprises pendant la pandémie sont restées en place au premier trimestre, avec une croissance particulièrement forte dans des domaines tels que la publicité en ligne et les services cloud. Cela explique en partie pourquoi les valeurs de croissance ont dernièrement surperformé les valeurs cycliques.

En effet, l'indice Russell 1000 Growth a progressé de 7% le mois dernier, contre 4% pour le Russell 1000 Value. La baisse des taux d'intérêt réels sur cette période a probablement entraîné un certain retour de balancier en faveur des valeurs de croissance. Néanmoins, les très bons résultats des entreprises technologiques y ont également contribué. Jusqu'ici, 95% des valeurs technologiques ont annoncé des bénéfices supérieurs aux attentes, ce qui est encore mieux que les secteurs les plus cycliques comme la finance (87%) et l'énergie (58%).

Malgré cette bonne passe des entreprises technologiques, les investisseurs feraient bien de se préparer à une reprise de la rotation vers les valeurs cycliques amorcée en début d'année. Il leur est également conseillé d'envisager un rééquilibrage de leur portefeuille après le rebond des mégacapitalisations du secteur technologique. Explications.

La solide performance des portefeuilles pendant la pandémie est largement due aux géants technologiques.
  1. La baisse de la demande
    Les catalyseurs d'une poursuite de la progression des géants technologiques semblent moins évidents. Une meilleure visibilité sur les programmes de rachat d'actions de ces derniers pourrait leur donner un coup de pouce dans l'immédiat. D'ailleurs, il est probable que les entreprises technologiques profitent d'une éventuelle baisse de leur cours de Bourse pour racheter leurs actions.
    Toutefois, le prochain trimestre s'annonce moins brillant pour ces entreprises en raison d'un fléchissement prévisible de la demande liée au cycle de mise à niveau et de renouvellement des parcs informatiques, en attendant la dernière ligne droite avant les fêtes de fin d'année. Par ailleurs, les comparaisons en glissement annuel moins flatteuses pourraient limiter l'ampleur des bonnes surprises sur le front des résultats au second semestre.
     
  2. Le pari sur la relance
    L'étonnante résistance des valeurs technologiques au premier trimestre est imputable au retard enregistré dans le déconfinement, ainsi qu'à la stabilisation du rendement des bons du Trésor américain ces dernières semaines.
    Cependant, la donne devrait changer au deuxième trimestre avec les progrès des campagnes de vaccination, les dépenses budgétaires et le probable rattrapage de la demande refoulée, qui pourrait donner un coup de fouet aux secteurs cycliques comme la finance et l'énergie.
    De plus, les perspectives bénéficiaires des valeurs cycliques et décotées semblent plus fiables en raison du redressement de la croissance économique. En revanche, la barre est placée très haut pour les géants technologiques en raison du fléchissement de la dynamique induite par des facteurs exceptionnels liés à la pandémie.
     
  3. Une réglementation plus stricte
    La croissance et la perspective d'une évolution de la réglementation favorisent également une rotation au sein même du secteur technologique. A mesure que les perspectives de croissance des géants technologiques se normaliseront, les investisseurs devraient s'intéresser aux petites et moyennes capitalisations du secteur technologique susceptibles d'enregistrer une forte croissance à long terme.
    Le durcissement de la réglementation du secteur aux Etats-Unis pourrait également influencer les valeurs technologiques, comme en témoignent les difficultés rencontrées par les géants technologiques chinois après le tour de vis donné par les autorités locales. Les impacts liés à la réglementation ont tendance à être transitoires mais le moindre revers à court terme pour les géants technologiques pourrait se traduire par une surperformance des petites et moyennes capitalisations du secteur.
     
  4. La croissance structurelle à long terme
    La solide performance des portefeuilles pendant la pandémie est largement due aux géants technologiques. Mais les investisseurs doivent éviter une surexposition à ce pan du marché. Dans un contexte d'accélération de la croissance, la Recherche d’UBS privilégie toujours les valeurs cycliques et décotées comme les valeurs financières et celles de l'énergie.
    Il convient également de se positionner dans l'optique de la croissance structurelle à long terme. On pense notamment aux secteurs d'où pourrait provenir la prochaine grande opportunité (fintech, healthtech et greentech, par exemple).

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