La Chine va-t-elle mettre un terme à sa loi de Murphy?

Nicolas Mougeot, Indosuez Wealth Management Suisse

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Diversifier l’exposition au facteur croissance d’un portefeuille via les actions chinoises peut s’avérer particulièrement judicieux.

Bien que l'environnement économique et réglementaire reste complexe en Chine, les actions chinoises permettent de diversifier la poche croissance d'un portefeuille d'actions. La Chine pourrait être en avance sur le reste du monde dans le cycle correction de marché/reprise potentielle, même si tous ses problèmes sont loin d’être résolus…

UNE POLITIQUE MONÉTAIRE PLUS ACCOMMODANTE

Alors que la plupart des banques centrales ont commencé à resserrer leur politique monétaire, la Banque populaire de Chine s'est montrée plus accommodante pour soutenir l'économie. En mai, elle a abaissé le taux hypothécaire de 20 pb et le taux préférentiel de prêt à 5 ans de 15 pb. Ces mesures devraient alléger la pression et apaiser certaines inquiétudes sur le marché immobilier chinois. Globalement, l’effort de relance monétaire et budgétaire se reflète dans l'impulsion du crédit. A ce stade, le ratio cours/bénéfices à 12 mois est en ligne avec sa moyenne historique et les actions chinoises ne sont plus particulièrement chères.

BÉNÉFICES: BONNES OU MAUVAISES NOUVELLES?

Tandis que les analystes continuent à relever leurs estimations de bénéfices en Europe et aux Etats-Unis, ils sont plus pessimistes sur les bénéfices des entreprises chinoises, notamment depuis début mars, lorsque la Chine a durci sa politique en matière de lutte contre la COVID-19. D'une part, le marché semble avoir intégré une partie des mauvaises nouvelles concernant les actions chinoises, en particulier le recul de la marge bénéficiaire à 12 mois de l’indice MSCI China (passée de 11% à la mi-2021 à près de 8% aujourd'hui). D’autre part, leurs homologues américaines et européennes risquent toujours d'être dégradées, notamment en raison de marges bénéficiaires qui plafonnent et sont menacées par la hausse de l'inflation et le ralentissement de la croissance.

LA POLITIQUE PEUT-ELLE JOUER UN RÔLE DE CATALYSEUR?

En début d'année, la Chine a annoncé un objectif de croissance annuelle du PIB de 5,5%. La plupart des économistes estiment que cet objectif est hors de portée compte tenu de l'impact des différents confinements auxquels les villes chinoises ont dû faire face. Le gouvernement chinois tente d'utiliser les leviers monétaires et budgétaires pour maintenir la croissance à un niveau qui préserve l'emploi, tout en maintenant l'objectif de croissance de 5,5% en glissement annuel, même s'il est fort probable qu'il ne sera pas atteint cette année. L’effort de relance budgétaire et monétaire est particulièrement important cette année, alors que le 20e congrès national du Parti communiste chinois se tiendra au quatrième trimestre.

Tandis que ce congrès organisé tous les 5 ans vise à renouveler les principaux dirigeants, Xi Jinping fait campagne en vue d’être élu pour un troisième mandat, ce qui constituerait une première. Au cours des six mois de période électorale précédant les cinq précédents congrès nationaux, on constate que les actions chinoises ont historiquement surperformé les actions mondiales. Cela pourrait s'expliquer par une position plus accommodante à l’approche des congrès nationaux, en vue de bénéficier d’un soutien politique plus large. Un schéma similaire pourrait être observé cette année. Bien que la pression réglementaire sur les entreprises technologiques persiste, les autorités ont récemment envoyé plusieurs signaux positifs: la Chine a ainsi autorisé de nouveaux jeux mobiles en mai, tandis que les discussions concernant l'introduction en bourse d’Ant pourraient reprendre.

PRIVILÉGIER LES ACTIONS DOMESTIQUES

Alors que les craintes de récession s’intensifient dans le monde entier, les entreprises chinoises ciblant le marché domestique chinois pourraient enregistrer de meilleures performances à court terme. Parallèlement à des mesures de relance énergiques, la Chine devrait stimuler la croissance à moyen terme grâce à un plan d'investissement dans les infrastructures excédant 2’000 milliards de dollars. En termes de secteurs, nous privilégions une approche «barbell» associant des secteurs de Croissance tels que la technologie et la consommation discrétionnaire et des secteurs Value tels que l'énergie, les matériaux et les services financiers.

DIVERSIFIER L’EXPOSITION AU FACTEUR CROISSANCE

Diversifier l’exposition au facteur croissance d’un portefeuille via les actions chinoises peut s’avérer particulièrement judicieux. La corrélation entre les actions chinoises et les actions américaines est beaucoup plus faible qu’au sein des marchés développés. De fait, les marchés chinois et occidentaux sont sous-tendus par des facteurs différents. Les marchés développés subissent le resserrement de la politique monétaire et l'instabilité géopolitique en Europe (Brexit, incertitude politique en France, processus anti-fragmentation de la BCE, guerre en Ukraine), tandis que les marchés chinois affrontent la répression réglementaire, la chute des géants de l’immobilier et le ralentissement de la croissance. Une exposition aux actions chinoises offre dès lors une diversification appréciable, étant donné sa faible corrélation avec les actions américaines et européennes. Les actions chinoises bénéficient d'une décote liée à la gouvernance et à la géopolitique, qui devrait perdurer à moyen terme. La tendance baissière des marchés boursiers chinois est également due à la dynamique négative des bénéfices, qui pourrait toutefois s'estomper. Les valorisations deviennent plus attrayantes et la décote macroéconomique pourrait se réduire à l'avenir, du moins sur une base relative par rapport à d'autres régions.

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