La Banque d'Angleterre sur le fil

Steven Bell, BMO GAM (EMEA)

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Entre croissance faible et inflation, l’institution britannique fait face à un exercice d’équilibrisme périlleux.

La banque d'Angleterre (BoE) a augmenté son taux d'escompte de 0,25%. Depuis décembre dernier, il s'agit de la quatrième hausse consécutive, ce qui porte les taux officiels à 1%, soit le niveau le plus élevé depuis la crise financière de 2008. Elle fait suite à une série de hausses de taux par d'autres banques centrales. La Fed a fait la une des journaux avec sa dernière hausse, alors qu’elle suivait de près les hausses des banques centrales de l'Inde et de l'Australie. La BCE n'a pas encore agi, mais elle a prévenu qu'elle pourrait relever ses taux en juillet, soit bien plus tôt que prévu.

Comme une ombre de récession qui plane

La tendance est clairement à la hausse des taux alors que l'économie mondiale se remet à peine de la pandémie et que l'inflation atteint des niveaux jamais vus depuis des décennies.

Alors que l’économie stagne et que le chômage commence à augmenter, la BoE prévoit que l'inflation atteindra 10% au courant de l’année.

Pourtant, la décision de la BoE a n’a pas fait l’unanimité même au sein du comité, puisque trois des six membres avaient voté pour une augmentation de 0,5%. Alors que l’économie stagne et que le chômage commence à augmenter, la BoE prévoit que l'inflation atteindra 10% au courant de l’année. Si elle devait relever les taux conformément aux attentes du marché, la BoE estime que l'année 2023 serait marquée par une croissance négative voir même une récession.

Bien que l'économie britannique ait bénéficié d'une reprise vigoureuse après la pandémie avec une forte baisse du chômage, la «crise du coût de la vie» augure une récession. L'inflation dépasse largement les salaires et le gouvernement a intensifié la pression en augmentant les impôts. En outre, le personnel engagé pour lutter contre la pandémie est en train d'être renvoyé. Les revenus personnels réels devraient diminuer de 2,5% cette année, soit la plus forte baisse depuis 1947. L'enquête de Bloomberg prévoit que le PIB britannique du deuxième trimestre 2022 n'augmentera que de 0,2% par rapport au premier trimestre. Avant la guerre en Ukraine, le consensus tablait sur une hausse de 0,9%. Certains s'attendent désormais à une chute pure et simple du PIB au deuxième trimestre 2022. Bon nombre des prévisionnistes les plus optimistes n'ont pas tenu compte du jour férié supplémentaire prévu en juin pour célébrer le jubilé de la reine. L'expérience passée suggère que ce jour férié réduira le PIB du Royaume-Uni de 0,3%. Avertissant ainsi qu'une croissance négative n’est pas de l’ordre du possible, mais du probable.

Les consommateurs britanniques disposent d'une réserve COVID cumulée pendant les confinements.
Un matelas pour se réceptionner

Mais il n'y a pas que des mauvaises nouvelles. Les taux d'intérêt restent très bas. L'économie bénéficie d'un élan considérable à l'approche de la crise du coût de la vie. Et les consommateurs britanniques disposent d'une réserve COVID cumulée pendant les confinements. Cependant, la réserve est inégalement répartie, et de nombreux ménages sont confrontés à une détresse financière aiguë, mais les estimations de ce réservoir COVID estiment qu’elle représente 12% du revenu disponible au total.
Néanmoins, l'économie britannique est confrontée à un été très difficile. Les craintes d'un hiver encore plus rude vont s'accentuer avant une deuxième hausse massive des prix de l'énergie prévue en octobre. Le gouvernement pourrait annoncer un plan visant à en compenser l'intégralité. L’on assisterait alors, à un revirement majeur de la part du gouvernement.

Les banques centrales du monde entier ont réduit en urgence les taux d'intérêt en réponse à la pandémie. Cette urgence est maintenant terminée, mais les banques centrales ont tardé à rétablir les taux d'intérêt. Le résultat a été une poussée de l'inflation et la crainte d’une récession due à une réponse tardive. La BoE a peut-être eu le sentiment d'être confrontée à une décision difficile, alors qu'elle tentait de trouver un équilibre entre des perspectives de croissance plus faible et une inflation galopante. La réalité est que les taux d'intérêt restent trop bas, dans la plupart des pays développés, et que ce dilemme ne peut que s'aggraver dans les mois à venir.

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