Enjeux de la mutualisation du KYC/KYB – Volet 4

Rémi Van Ooteghem, Wecan Group

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Pour Maryline Stiegler de Gonet & Cie, «l'accroissement des exigences implique l'accroissement de la facilité de collecte et d'échange des informations KYC.»

Maryline Stiegler, responsable des gestionnaires de fortune indépendants (GFI) chez Gonet & Cie SA, nous partage sa vision des enjeux de la mutualisation des processus KYC et KYB, ainsi que des opportunités qu'offre cette évolution incontournable du secteur financier.

Un contexte réglementaire de plus en plus exigeant

Le cadre réglementaire actuel impose des exigences toujours plus strictes, complexifiant et alourdissant considérablement le processus KYC, explique Maryline Stiegler. Il est nécessaire d'accepter que cette tendance ne fera que s'accentuer avec le temps. La mutualisation des efforts représente une solution essentielle pour rationaliser ces procédures, en les rendant moins lourdes, afin de préserver des institutions à taille humaine face à l'inflation réglementaire. Aujourd'hui, le processus KYC demeure largement manuel, fragmenté entre divers départements bancaires, ce qui génère des lenteurs significatives. La mutualisation constitue dès lors un levier incontournable pour fluidifier les échanges d'informations, optimiser les processus et permettre ainsi un gain de temps substantiel pour toutes les parties prenantes, y compris le client. Maryline conclut ainsi: «L'accroissement des exigences implique l'accroissement de la facilité de collecte et d'échange des informations KYC.»

Sécurité et confiance: des enjeux cruciaux

Pour Maryline Stiegler, la mutualisation, telle que conçue via la collaboration entre la Blockchain Association (BAF) et Wecan, répond également aux enjeux de sécurité. Les échanges de données doivent non seulement être digitalisés, mais également sécurisés, dans des environnements de confiance où les acteurs ont la possibilité de partager les informations en toute fiabilité. Pour autant, il s'agit avant tout d'un défi humain plus que technologique. Maryline souligne: «La technologie se développe, mais l'humain a besoin de temps pour accorder sa confiance.» En effet, la technologie est déjà disponible et n'attend qu'à être exploitée. Pour progresser, un alignement des mentalités et une confiance mutuelle sont indispensables. Cette confiance naîtra d'une collaboration étroite et de la création d'outils pertinents et fiables pour les utilisateurs.

Maryline Stiegler met également en avant l'avantage de la blockchain en matière d'auditabilité des données. Cette technologie garantit la traçabilité des informations, répondant ainsi aux exigences strictes de la Finma. Par ailleurs, l'accessibilité économique de la solution de Wecan permet aux gestionnaires d'actifs externes de rejoindre la plateforme sans que le coût ne soit un obstacle.

La Blockchain Association for Finance: une initiative déterminante

La BAF a été un forum décisif pour établir la confiance nécessaire et permettre des expérimentations concrètes sur le KYC entre les banques, Wecan et les EAM. Dès la création de la BAF, une volonté de dialogue constructif s'est manifestée, posant des bases solides pour avancer. Malgré certaines réticences initiales, de nombreux points de convergence ont été identifiés, dépassant souvent les attentes. Wecan, à travers la Blockchain Association for Finance, a réussi là où d'autres avaient échoué. La grande force de cette initiative réside dans le fait que chaque acteur conserve son identité propre, sans qu'une autorité supérieure impose une vision unique. Maryline résume ainsi: «La BAF est un collectif fondé sur le respect mutuel» et ajoute qu'«il est temps de jouer collectif et de le faire pleinement.»

Elle estime que nous vivons un véritable changement de paradigme. Pour progresser ensemble, nous devons nous adapter aux nouvelles exigences réglementaires mais aussi de marché, tout en conservant nos forces. Cela implique une collaboration proactive, créant un environnement financier suisse dynamique et accessible, où des acteurs agiles conservent leur identité.

Par ailleurs, elle constate que les attentes des clients évoluent: ils ne souhaitent plus perdre de temps sur des processus administratifs comme le KYC, dès lors que la sécurité est garantie. Ils recherchent la simplicité afin de se concentrer sur la satisfaction de leurs besoins.

Elle affirme que la place financière suisse dispose «d'une opportunité unique de redéfinir notre manière de collaborer, en respectant les identités individuelles tout en créant une valeur collective. C'est ainsi que nous pourrons prospérer dans un monde en constante évolution.»

Vers une adoption progressive de la mutualisation

L'évolution vers la mutualisation des processus KYC/KYB prendra du temps, mais Maryline Stiegler est convaincue que le contexte est favorable à une adoption massive de ces solutions. Elle compare cette transition à celle d'Internet il y a quelques décennies: une fois la technologie démystifiée, la confiance s'installe naturellement. Les acteurs doivent sortir de leurs silos et collaborer pour répondre aux exigences croissantes, évitant ainsi que la conformité ne devienne une entrave au développement de l'industrie.

Des bénéfices concrets pour l'industrie financière Suisse

La mutualisation permet de réaliser des économies d'échelle et d'améliorer l'efficacité. En partageant des solutions communes, les banques peuvent optimiser leurs ressources, renforcer la précision et la sécurité des données, tout en simplifiant l'expérience client. Actuellement, celle-ci est souvent alourdie par des procédures administratives fastidieuses. Maryline Stiegler souligne l'importance de replacer le client au centre des préoccupations et de rendre son expérience plus fluide. Pour que la place financière suisse demeure compétitive, il est crucial d'améliorer l'efficacité collective.

Elle résume la situation ainsi: «Cela fait des années que l'on se contente de pratiques constantes, mais finalement sans évolution décisive.» L'industrie doit oser se digitaliser, repenser ses méthodes, et sortir de sa zone de confort, car c'est dans l'intérêt des clients et, par extension, de la place financière suisse.

Les dernières années ont vu l'implémentation de nombreuses ressources en compliance et le déploiement de diverses technologies au sein des institutions financières, mais leur efficacité reste encore à prouver. En revanche, l'expérience client en la matière s'est certainement alourdie, et chacun reconnaît qu'il faut apporter des améliorations. Il est donc impératif de travailler ensemble pour accroître l'efficacité. Le mot d'ordre de Maryline: «Efficacité».

Encourager l'adoption de nouvelles pratiques

Pour accélérer la transition vers une mutualisation efficace, il faut oser rompre avec les schémas traditionnels et adopter de nouvelles méthodes de travail. Maryline Stiegler souligne l'importance de la formation interne et de la sensibilisation des clients. La Blockchain Association for Finance joue un rôle central dans cette évolution, en garantissant une communication efficace au sein des établissements financiers, afin de favoriser une adhésion collective aux nouvelles pratiques. L'enjeu est ainsi, selon Maryline, de «construire un avenir plus sécurisé et plus fluide pour l'ensemble de l'industrie financière Suisse.»

 


Lire également les volets 1,  2 et 3

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