Dans un contexte où la conformité réglementaire devient de plus en plus exigeante, la mutualisation des processus KYC (Know Your Customer) et KYB (Know Your Business) représente un enjeu clé pour le secteur financier. Michael Chaille, Global Head of Wealth Management chez AlphaFMC, nous éclaire sur les principaux défis et opportunités liés à cette transformation.
Les défis actuels de la mutualisation
Pour Michael Chaille, la mutualisation du KYC/KYB est l'un des grands enjeux du secteur financier, notamment face aux exigences croissantes en matière de réglementation, de protection des données personnelles et de transparence. De son point de vue, le KYC comprend trois dimensions: les données, les processus et les décisions. La mutualisation se concentre principalement sur les données, laissant aux banques la possibilité de se différencier sur les processus et les décisions liés au cycle de vie de la relation client.
Bien que certaines banques craignent la portabilité des données, Michael Chaille estime qu'elle est inévitable et bénéfique pour l'industrie.
Cette mutualisation implique évidemment une mise en œuvre de mécanismes de contrôles rigoureux et l'utilisation de technologies comme la blockchain qui sont essentielles pour assurer la sécurité des échanges d'informations entre les institutions.
Un autre défi concerne la portabilité des données. Bien que certaines banques craignent cette évolution permettant aux clients de changer de banque plus facilement, Michael Chaille estime qu'elle est inévitable et bénéfique pour l'industrie. Cette transition encouragera les institutions financières à se concentrer sur le développement de leurs compétences clés comme la gestion des investissements et de la relation client, renforçant ainsi leur éléments différentiateurs et donc leur marque.
L'évolution de la mutualisation dans les prochaines années
Selon Michael Chaille, la mutualisation du KYC devrait prendre une ampleur croissante au cours des trois à cinq prochaines années, à mesure que l'industrie converge vers la gestion des données via une Market Utility telle que Wecan Comply. «La technologie blockchain est identifiée comme un élément clé pour soutenir ce concept de mutualisation, garantissant la pérennité, la sécurité et l'authenticité des données partagées», précise-t-il.
Parallèlement à la dimension «données» propre au KYC, l'introduction de l'intelligence artificielle pourra soutenir les processus et les décisions nécessaires à la gestion du cycle de vie client de manière plus fine et pertinente. Toutefois, cela prendra encore du temps avant d'être adopté par les banques, notamment en raison des défis liés à la confiance dans ces technologies, souvent perçues comme des «boîtes noires».
De façon plus globale, l'accès aux données, y compris celles du KYC, est essentiel pour comprendre véritablement le client. Cette compréhension est nécessaire pour mieux servir leurs clients, aussi bien en termes de qualité et d'efficacité. Par exemple, cette connaissance approfondie permet de capter les signaux d'insatisfaction avant qu'ils ne se manifestent pleinement, et ainsi de réduire l’attrition client qui représente souvent 30% des efforts de l’année suivante. «Nous avons réalisé une étude auprès de nos partenaires qui a montré qu'un client prenait la décision de chercher une autre banque environ six mois avant de prévenir sa banque actuelle», explique Michael Chaille. Cela souligne la nécessité pour les banques de réagir proactivement avant même que le client ne manifeste son intention et que ce soit trop tard. AlphaFMC est souvent sollicité pour accompagner ses clients dans la mise en place d'outils et de méthodes de travail permettant de détecter ces signaux de manière proactive.
Les avantages concrets de la mutualisation
En termes de bénéfices concrets, la mutualisation du KYC permettra de réduire le temps et les efforts nécessaires pour l'onboarding des clients, ce qui entraîne également une réduction significative des coûts pour les banques. «Actuellement, l'onboarding d'un client peut prendre plusieurs semaines, voire des mois, en fonction de la complexité des documents à vérifier et des procédures internes de chaque banque», explique Michael. Grâce à la mutualisation, ce délai pourrait être considérablement réduit, impliquant non seulement moins d’effort interne de la banque mais aussi aux clients d'accéder plus rapidement aux services financiers dont ils ont besoin, tout en minimisant les frustrations associées à ces processus, qui représentent souvent leur première expérience avec l'institution. Une expérience d'onboarding fluide contribue à créer une relation positive dès le départ, renforçant ainsi la satisfaction et la fidélité des clients.
Un autre avantage qui découle de la mutualisation concerne l’amélioration de la qualité des données. «Les vérifications conduites par plusieurs acteurs sur le même jeu de données améliorent la qualité en continu et ainsi la capacité de gestion des risques», ajoute Michael Chaille.
Alors qu’elles sont encore en retard, l’adoption des différentes évolutions technologiques, telles que la blockchain et les utilitaires KYC, permettra aux institutions financières traditionnelles et aux néo-banques de converger vers un modèle hybride, mélange de technologie et d’humain. Ainsi, les deux types d'acteurs se rejoignent progressivement, et à terme, pour un segment de clientèle équivalent, il ne restera qu'une seule sorte de banque, combinant le meilleur des deux mondes: l'agilité des néobanques et la diversité des services des banques traditionnelles.
Accélérer la transition vers une mutualisation efficace
Pour s'engager dans cette transition, Michael Chaille recommande deux actions principales : «Premièrement, rejoindre un forum comme la Blockchain Association for Finance (BAF) pour participer à la définition d’une vision commune et aux standards qui la définissent. Deuxièmement, très vite passer à l’expérimentation avec des projets pilotes comme ceux lancés sur le KYC par Wecan Comply.»
Michael souligne aussi l'importance de l’implication des équipes internes aussi bien techniques que métiers. «La mise en place de nouveaux systèmes offre l’opportunité de repenser les façons de travailler en impliquant les équipes pour garantir une adoption harmonieuse et maximiser les bénéfices.» C’est une partie de ce que l’on fait chez AlphaFMC.
Un mot pour la fin
La mutualisation des processus KYC et KYB représente une opportunité majeure pour le secteur financier. Bien qu'il reste des défis à surmonter, la technologie, la collaboration entre acteurs privés et publics, ainsi que l'adoption d'une vision commune sont les clés pour une transition réussie. «La mutualisation n'est pas une simple évolution, c'est une transformation nécessaire pour garantir un meilleur service et réduire les coûts pour contribuer à la pérennité des institutions face aux attentes des organes de régulation et des clients», conclut Michael Chaille.
Lire également le premier volet