En 2024, restons constructifs!

Clémentine Gallès, Société Générale Private Banking

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Une approche diversifiée et sélective permettra de limiter les effets du ralentissement économique et les risques (géo)politiques non négligeables de 2024.

Un atterrissage en douceur de l’activité semble se profiler avec un maintien de la surperformance des Etats-Unis, une croissance molle en Europe et au Royaume-Uni, et des incertitudes qui perdurent sur l’activité chinoise, notamment du fait des risques qui pèsent sur son marché immobilier. L’inflation devrait continuer sa baisse progressive, avec des effets de base favorables qui s’estompent et des salaires qui encouragent la persistance de l’inflation sous-jacente. Le pivot des banques centrales devrait avoir lieu et leurs taux pourraient bien baisser de façon synchrone à partir du deuxième trimestre, avec une diminution progressive de leurs taux directeurs. Les politiques budgétaires devraient quant à elles se normaliser à différentes vitesses. La tonalité devrait toujours être accommodante aux Etats-Unis, la normalisation devrait se poursuivre en Europe et, en Chine, le soutien devrait être contenu. Cependant, si l’horizon paraît dégagé, les risques géopolitiques sont toujours bien présents.

Actions: une année en deux temps

Différents facteurs laissent penser que les grandes économies éviteront d’entrer en récession. Les entreprises et les ménages affichent un bilan solide, le marché du travail poursuit sur une dynamique favorable, le repli de l’inflation offre un regain de pouvoir d’achat aux ménages, et les conditions financières s’assouplissent. En outre, les Etats-Unis pourraient continuer de bénéficier d’une politique budgétaire accommodante en cette année électorale. Dans ce contexte, la surperformance des marchés actions US observée en 2023 devrait subsister, au moins au premier semestre. Au second semestre, l’économie européenne pourrait commencer à se redresser, bénéficiant du repli de l’inflation et de la baisse des taux d’intérêt. Dès lors, les marchés actions européens pourraient retrouver de la vigueur.

L’année 2023 a été marquée par une très forte surperformance des valeurs de l’IA. Pour autant, la valorisation de ce secteur n’apparaît pas excessive.

Les voyants de l’obligataire au vert 

Un scénario macro-économique clément, le bilan solide des entreprises et les taux réels encore positifs sont autant d’atouts pour les marchés obligataires, qui devraient rester attractifs, au moins en première partie d’année. Ce devrait notamment être le cas des obligations d’entreprises européennes bien notées qui bénéficient du contexte de faible croissance. Par ailleurs, les valorisations restent intéressantes malgré la hausse de fin d’année, avec des écarts de taux, relativement aux taux souverains, au-dessus de la moyenne historique. Enfin, les baisses des taux des banques centrales devraient soutenir la dette des entreprises bien notées, généralement positivement corrélées avec les obligations souveraines.

Marchés émergents: la Chine entre deux eaux

En 2024, la croissance chinoise devrait rester en-deçà des 5% et, même si les actions et obligations chinoises semblent attractives, leur potentiel haussier paraît limité. En effet, les tensions immobilières et la reprise morose de la demande privée devraient peser sur les actifs financiers. Par ailleurs, la faiblesse de la dynamique des prix conduirait la banque centrale à maintenir des taux d’intérêts bas, pénalisant ainsi la devise et le marché obligataire. Enfin, la poursuite des tensions commerciales devrait peser sur les actifs. In fine, les investisseurs étrangers, qui ont déjà subi plusieurs revers devraient conserver un faible appétit pour la Chine. Les autres économies émergentes resteraient sur une bonne trajectoire de performances financières, avec une croissance vigoureuse et des politiques monétaires prudentes. Les grandes économies émergentes continueraient également à bénéficier de la tendance de friendshoring, du fait de la vitalité de leurs exportations et des flux d’investissements directs. Cependant, le risque d’une politique protectionniste reste présent, notamment pour les actifs latino-américains.

Thématiques, intelligence artificielle (IA) et énergie propre

L’année 2023 a été marquée par une très forte surperformance des valeurs de l’IA. Pour autant, la valorisation de ce secteur n’apparaît pas excessive: le ratio prix/bénéfices n’est que légèrement supérieur à sa moyenne de long-terme alors qu’il était plus de deux fois supérieur lors de la bulle technologique des années 2000. Rester exposé à cette thématique semble donc pertinent. D’autre part, investir dans des sociétés qui bénéficieront de la transition énergétique pourrait également porter ses fruits. En effet, que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis, l’impulsion donnée par les gouvernements devrait assurer leur longévité et leur pérennité. De plus, beaucoup d’entreprises de ce secteur appartiennent à des industries qui surperforment quand les taux baissent et ou quand l’activité ralentit. Enfin, ces secteurs d’activité apparaissent de plus en plus rentables.

Un dollar moins fort

Le contexte macro-économique qui se profile devrait favoriser une vue neutre sur les parités entre l’euro, le franc suisse et la livre sterling contre le dollar US. En ce qui concerne le yen, il devrait regagner du terrain face au dollar US. Par ailleurs, l’écart de politique monétaire entre la Chine et les Etats-Unis devrait maintenir des pressions baissières sur la devise chinoise. Enfin, en 2023, les Etats-Unis sont la seule économie développée avec un déficit externe courant important. Le retour de ce déséquilibre, déjà existant pré-Covid, montre que l’ensemble des économies excédentaires surfinancent le déficit externe américain; ce qui laisse présager d’une demande d’actifs financiers américains de la part du reste du monde qui restera forte.

Actifs privés: des opportunités mais la sélectivité reste de mise

En matière de private equity, des perspectives intéressantes pourraient se présenter pour les fonds en déploiement à condition de privilégier la sélectivité. Quant à la dette privée, elle offre une alternative attrayante au marché obligataire pour les investisseurs ayant un appétit pour les actifs de long terme et relativement illiquides. En effet, elle offre des opportunités de diversification, une faible volatilité, ainsi que des rendements ajustés au risque prévisibles et attractifs, en particulier lorsque les taux sont élevés. Toutefois, ce contexte et la croissance baissière pourraient peser sur les flux de trésorerie disponible et les défauts de paiement des entreprises pourraient augmenter lors des prochains trimestres. Cependant, en privilégiant des clauses contractuelles strictes et une sélection rigoureuse des gérants, 2024 pourrait bien offrir de belles perspectives.

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