Comment investir dans le métavers?

Charles-Henry Monchau, Syz

4 minutes de lecture

Le métavers est le concept à la mode, poussé par Facebook qui en a fait sa nouvelle mission et même son identité. De quoi parle-t-on et comment investir dans ce concept?

Fin octobre, Mark Zuckerberg annonçait le changement de nom de la maison mère de Facebook en «Meta», se référant directement à un gigantesque projet qu’il entend développer: le métavers. D’autres grands groupes (Nike, Disney, etc.) semblent également se préparer au même défi technologique.

De quoi s’agit-il? Le Metaverse (en anglais) est une contraction des mots «meta» et «universe». Pour Zuckerberg, il s’agit du «graal des interactions sociales». L’idée est de générer des expériences virtuelles plus immersives, tout en restant en lien avec le réel. Parmi le type d’expérience rendue possible par cet univers en trois dimensions: acheter dans des boutiques virtuelles de (vrais) vêtements et les récupérer dans le monde réel, assister à un concert (virtuel) donné par un artiste (réel), etc. Dans ce type d’expériences, 3D virtuelle et univers réel sont donc intrinsèquement liés. Pour y accéder, il suffit d’utiliser un casque de réalité virtuelle et/ou d’autres interfaces technologiques.

Mais le métavers c’est également une nouvelle dimension dans l’univers des jeux avec des projets tels Decentraland où les utilisateurs peuvent y gagner des MANA (jeton natif de Decentraland), acheter des terrains ou objets de collection virtuels, voter sur des projets économiques et de gouvernance ou encore créer des NFT (jetons non fongibles), en leur donnant une interopérabilité réelle pour la valeur de leur temps passé dans le jeu.

Pour les profanes, le métavers ressemble à une version améliorée de la réalité virtuelle (RV). Mais pour de nombreux spécialistes, le métavers pourrait bien être l’avenir de l’internet.

Le Web 3.0

Internet a toujours servi à connecter les gens. Mais au cours des trois dernières décennies, la technologie Internet s’est transformée et la façon dont nous interagissons avec le web a évolué avec. Trois ères clés de l’internet peuvent être distinguées:

  • Web 1.0 - Netscape nous a connecté à internet;
  • Web 2.0 - Facebook et d’autres réseaux sociaux nous ont connecté à des communautés en ligne;
  • Web 3.0 – Le métavers va nous connecter dans un monde virtuel désormais dans les mains de la communauté d’utilisateurs (en lieu et place des géants d’internet actuels).

Comme le montre le tableau ci-dessous, le niveau d’interaction, les medium utilisés, l’organisation, l’infrastructure d’internet et le niveau de contrôle exercé évoluent.

L’Internet mobile Web 2.0 a changé la manière dont nous utilisons et interagissons sur le Web. Le Web 3.0 Metaverse a le potentiel de créer une mutation encore plus profonde.

L’opportunité du marché du métavers

On estime que les revenus générés par les jeux virtuels pourraient passer d’environ 180 milliards de dollars en 2020 à environ 400 milliards de dollars en 2025.

L’évolution continue de la monétisation des développeurs de jeux est une dynamique clé dans cette tendance de fonds. Les joueurs s’éloignent de plus en plus des jeux payants pour privilégier des jeux gratuits, que les développeurs monétisent en vendant aux joueurs des objets, des terrains, etc. afin d’améliorer leur niveau de jeu ou le statut social au sein de ces mondes virtuels.

L’une des évolutions les plus importantes entre Web 2.0 et Web 3.0 est le passage d’entreprises métavers fermées (càd détenues et contrôlées de manière centralisée par des géants du Web) à des métavers cryptographiques ouverts (càd détenus et contrôlés démocratiquement par les utilisateurs).

Dans un univers Web 2.0, les joueurs ne peuvent monétiser leurs investissements et leurs efforts. Les développeurs de jeux ne permettent pas aux joueurs d’échanger des objets avec d’autres joueurs et gardent ces mondes fermés afin que les joueurs ne puissent pas transférer leur richesse virtuelle vers l’économie réelle.

Les réseaux de métavers crypto ouverts Web 3.0 solutionnent ce problème en éliminant les contrôles de capitaux imposés à ces mondes virtuels par les plates-formes Web 2.0. Ce nouveau paradigme permet aux utilisateurs de posséder leurs actifs numériques en tant que jetons non fongibles (NFT), de les échanger avec d’autres dans le jeu et de les transporter vers d’autres expériences numériques, créant ainsi une toute nouvelle économie Internet qui peut être monétisée et dans le monde réel.

Cette «économie créatrice» est connue sous le nom de «Play to Earn».

Les entreprises Web 2.0 établies – telles que Facebook – devront dès lors adapter leurs modèles d’affaires en ouvrant leurs écosystèmes et en supprimant certains de leurs avantages concurrentiels.

Un jeu qui en vaut la chandelle car le métavers représente une opportunité de revenus de plus d’un trillion de dollars dans le domaine de la publicité, du commerce social, des événements numériques, des «hardware» et de la monétisation des développeurs/créateurs (cf. graphique ci-dessous – source: Grayscale).

L’économie du métavers Web 3.0

Les premiers univers métavers du Web 3.0 ont généralement été construits sur la blockchain avec une multitude d’acteurs contribuant au développement des jeux tout en permettant à ces éléments d’être librement échangés sur la blockchain.

Les exemples d’activités commerciales les plus connues à l’heure actuelle sont les suivantes:

  • Des galeries d’art, telles que Sotheby’s, permettent aux propriétaires de présenter et vendre leur art numérique NFT aux enchères;
  • Des entreprises ont établi un siège numérique dans le métavers permettant à leurs employés de se rencontrer et de collaborer;
  • Des panneaux d’affichage numériques (publicité) dans le métavers;
  • Des salles de concert dans le métavers où DJ et musiciens jouent de la musique et organisent des concerts.

Ces mondes Web 3.0 métavers font partie d’une économie cryptographique interconnectée dans le cloud. Des protocoles décentralisés interagissent et fournissent les infrastructures techniques nécessaires au bon fonctionnement de ces économies virtuelles dans le métavers.

L’investissement en capital dans le secteur a récemment commencé à s’accélérer. Des entreprises telles que Facebook prévoient d’investir des dizaines de milliards de dollars dans le Métavers. Mais pour de nombreux experts, il ne s’agit là que d’un début alors que la véritable idée du métavers pourrait bel et bien prendre encore 10 à 15 ans à se développer.

Dans un blog sur medium, Jon Radoff a mis en avant la chaine de valeurs du métavers en distinguant 5 catégories:  

  • Le domaine d’expériences:
    En dématérialisant l’espace physique, la distance et les objets, le métavers va changer nos expériences en ligne notamment dans les jeux, les réseaux sociaux (possibilité de socialiser à travers des activités virtuelles), l’E-sport, les achats en lignes (vêtements, immobilier, etc.), des événements «live» autour de la musique, du sport, etc.
    Les entreprises sont actives dans cette catégorie: Alphabet, Amazon, Disney, Microsoft, Nike, Sea Ltd, Sony, Take-Two ou encore Tencent.
     
  • Les découvertes:  
    Il s’agit ici des fonctionnalités qui permettent aux utilisateurs de vivre des expériences et ce à 2 niveaux: 1) celles qui viennent en support aux utilisateurs qui recherchent des informations au sujet d’une expérience spécifique (moteurs de recherche, apps, influenceurs); 2) Des messages marketing qui ne correspondent pas forcement à une recherche spécifique (notifications, publicités visuelles, etc.) Alphabet, Apple, Facebook (Meta) sont exposés ou vont se positionner sur ce segment.
     
  • L’économie de la création:
    Cette catégorie inclue tous les outils technologiques qui permettent aux créateurs de contenus de concevoir les expériences recherchées par les utilisateurs. Aujourd’hui, certaines plateformes telles que Roblox permettent déjà de créer du contenu sans connaissances spécifiques de codage. Le métavers devrait permettre un développement de ce concept à bien plus grande échelle via l’utilisation d’outils spécifiques tels que le mapping géospatial, le dessin en 3D, les NFTs, etc. Les entreprises cotées relativement bien positionnées sont Autodesk, Dassault Systèmes, Matterport, Facebook (Meta Platforms), Nintendo, Roblox ou encore Unity Software.
     
  • Les interfaces avec l’être humain:
    Il s’agit ici des outils et matériel informatiques (logiciels et hardware) qui permettent de faire le lien entre le monde virtuel et le monde réel et d’établir les connections entre les utilisateurs. Pensez par exemple aux lunettes 3D, au matériel audio dit «smart», des montres connectées, des implants neurologiques, des applications sur smartphones, des dispositifs haptiques, etc. Cette catégorie inclut des grandes sociétés technologiques telles que Amazon, Apple et Alphabet, Microsoft mais aussi Meta Platforms (Facebook).

     
  • Les infrastructures nécessaires au fonctionnement du métavers.
    Cette catégorie est relativement large et inclue des semiconducteurs, le 5G / Wifi, le «cloud» ainsi que les centres de données.
    Les sociétés de semiconducteurs telles que AMD, Nvidia, Qualcomm et TSMC sont bien placées sur ce thème. Mais on y trouve également des acteurs plus «niche» tels que Digital Reality, Equinix ou encore Global X Cybersecurity.

    La chaine de valeur (source: Medium)

En conclusion

Comme c’est très souvent le cas dans les investissements thématiques, la sélection de titres consiste en un savant dosage entre des grandes capitalisations (mais dont l’exposition au thème est forcement diluée du fait de la diversification de leurs activités) et des «pure play», beaucoup plus sensibles à la thématique mais également plus risqués et plus volatils. A la banque Syz, nous lançons un certificat métavers composé de plusieurs dizaines de grandes et capitalisations boursières ayant une exposition aux différentes catégories mentionnées dans la section précédente. Il s’agit d’un véhicule d’investissement à fort potentiel d’appréciation mais aussi au risque très élevé.

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