La question qu’on peut se poser ce matin est de se demander ce qui se serait passé dans les marchés si la Fed, le Trésor US et la FDIC n’avaient pris les mesures drastiques annoncées hier. Rappelons ici que les déposants de Sillicon Valley Bank (SVB) ont vu leurs dépôts garantis à 100% hier contre seulement 4% dimanche. De son côté, la Fed a également mis en place un programme de financement à terme des banques (Bank Term Funding Program - BTFP) qui aidera les banques à éviter de vendre à perte des titres du Trésor et d'autres titres d'État en leur permettant de proposer ces titres à la Fed, qui les évaluera au pair, en guise de garantie. Ce sont là des mesures incontestablement drastiques, qui auraient dû tuer la crise SVB dans l’œuf. La réaction du marché obligataire hier montre combien le monde reste traumatisé par la crise financière de 2008. Le marché obligataire, représenté par le bon du Trésor US à 2 ans, qui rendait 5.08% le 8 mars, évolue hier matin à 4.42% et traite actuellement à 3.94%. Cet effondrement du rendement du 2 ans est historique, on regardera 3.88% d’un point de vue technique, c’est là qu’évolue sa moyenne mobile à 200 jours. Alors pourquoi cette ruée des investisseurs dans la partie courte des taux américains ? On peut citer la recherche de sécurité, des couvertures de positions short, l’anticipation d’une récession ou encore un message du marché à la Fed : « la hausse des taux est terminée ». On peut aussi penser que le marché obligataire, d’habitude si rationnel, a perdu le nord, voyez l’indice MOVE (volatilité des obligations), qui décolle à 173 points, début mars il évoluait à 120 et la seule fois de son histoire où il a traité plus haut que son niveau actuel c’était 208.50 le 30 septembre 2008…

Étonnamment, dans ce monde perturbé par des bonds en déroute, les actions semblent garder un certain calme. La séance d’hier est plutôt volatile à Wall Street, mais au final l’indice S&P500 (SPX) clôture juste en-dessous de l’équilibre, tandis que le Nasdaq100 (NDX) gagne 0.79%. Le secteur financier reste sous intense pression, surtout les banques régionales US, l’ETF KRE chute de 12.31%. Les défensives et la technologie soutiennent la cote, on observe un retour des investisseurs dans les mastodontes que sont notamment Apple (AAPL +1.3%) et Microsoft (MSFT +2.1%). Gardons en tête que, lorsque la poussière retombera, les valeurs de croissance seront ravies de constater que leurs coûts de financement a nettement diminué. La volatilité poursuit sa hausse, le VIX gagne 7% à 26.52, il atteint 30.81 en séance. Les volumes d’échanges augmentent significativement avec 15.38 milliards de titres traités sur le NYSE. Le dollar en revanche reste délaissé, l’aversion au risque n’est pas si évidente que cela, la paire eur/usd traite ce matin à 1.0684. Le pétrole glisse à 74.04$ le baril de WTI Light Crude, tandis que l’or reste demandé, l’once évolue ce matin à 1912$. Le taux terminal de la Fed plonge, les discussions vont dans tous les sens dans les salles de marchés à ce sujet, on parle de baisses de taux, tout cela est un peu confus.

À ce propos, c’est aujourd’hui à 13h30 que sera publié le ô combien important indice des prix à la consommation aux Etats-Unis, la question étant de savoir dans quelle mesure le marché y prêtera réellement attention aujourd’hui, tellement il focalise sur le secteur financier depuis vendredi. Un secteur financier qui fait grise mine ce matin, les CDS (Credit Default Swaps) s’écartent un peu partout dans le monde, au Japon les bancaires reculent de 7 à 8%.

Jeffrey Gundlach s'attend à une hausse de 25 points de base par la Fed le 22 mars, après quoi les autorités feraient une pause. SVB "perturbe vraiment le plan de match de Jay Powell", déclare-t-il à CNBC. Les swaps indiquent ce matin que les chances d'une hausse de 25 points de base en mars sont inférieures à 60%. Les données du CPI d'aujourd'hui pourraient ajouter un élément nouveau.

HSBC, le nouveau propriétaire de l'unité britannique de SVB, prévoit d'injecter 2 milliards de livres sterling de liquidités dans la division. La Fed lance une enquête interne sur sa supervision de la banque californienne suite à des critiques. L'étude sera publiée d'ici le 1er mai. Apollo fait partie des investisseurs qui ont exprimé leur intérêt pour le rachat du portefeuille de prêts de SVB, selon l’agence Bloomberg. Le système américain Federal Home Loan Banks a levé 88,7 milliards de dollars par la vente d’obligations à court terme, augmentant ainsi le montant des liquidités qu'il peut déployer pour aider les prêteurs régionaux. Fannie Mae reporte la vente de plus de 500 millions de dollars d'obligations liées à des prêts hypothécaires, invoquant des conditions de marché défavorables. JP Morgan a reçu des milliards de dollars de dépôts ces derniers jours, et BofA, Citi et Wells Fargo ont également enregistré un volume plus élevé que d'habitude, selon Bloomberg.

Au chapitre de la cavalerie, qui arrive toujours trop tard, First Republic et cinq autres banques américaines sont placées sous surveillance par Moody's en vue d'une révision à la baisse de leur notation. Nous voilà rassurés…

Au menu macro-économique du jour, tous les regards sont donc braqués sur les chiffres de l'inflation de février aux Etats-Unis (13h30).

Rivian négocie la fin de son accord d'exclusivité avec Amazon. ISS a recommandé de rejeter la nouvelle proposition de rémunération de l'administrateur délégué d'UniCredit, Andrea Orcel. Bunge va prendre la place de Signature Bank dans le S&P500. Volkswagen va construire une usine de batteries au Canada. Vodafone cherche à supprimer 1000 emplois en Italie.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en nette baisse. Tokyo perd 2.19% à la cloche, Hong Kong abandonne 2.69%, Shanghai rend 0.72% et Séoul recule de 2.56%. Le future SPX gagne 10 points et l’Europe est indiquée en très léger recul à l’ouverture, après avoir chuté hier, pénalisée par son secteur financier.

Tout le monde sur le pont à 13h30 pour la publication de l’indice américain des prix à la consommation.