Gonet: l'actualité des marchés au 13 juin

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

4 minutes de lecture

Dow -2,73%, S&P 500 -2,91%, Nasdaq -3,52%, Russell 2000 -2,73%, SOX -3,60%, Eurostoxx -3,36%, SMI -2,10%.

L’aversion au risque revient en force vendredi après la publication de l’indice américain des prix à la consommation, qui montre que l’inflation progresse encore, le fameux pic n’est donc pas encore atteint. La majeure partie de la surprise à la hausse provient de l'alimentation et de l'énergie. Le CPI (Consumer Price Index) de base continue de décélérer d'une année sur l'autre - il est passé de 6,2% à 6% - mais pas aussi rapidement que prévu. La hausse de 8,6% en mai par rapport à mai 2021 atteint un nouveau sommet en 40 ans. De nombreux économistes avaient espéré pensé que le mois de mars marquerait le fameux pic, ce n’est malheureusement pas le cas. En analysant la statistique plus en détails, on observe que l’inflation se propage à presque toutes les catégories. 70,6% du panier du CPI augmentent leurs prix de plus de 4% sur une base annualisée, un nouveau sommet. Si les contributions les plus importantes proviennent du logement, de l’alimentation, des billets d'avion et des véhicules neufs et d'occasion, les soins médicaux, le mobilier, les loisirs et l'habillement progressent également. On observe par ailleurs que la demande est en train de glisser des biens vers les services.

Le rapport sur l’inflation de vendredi démontre que la Fed a encore beaucoup de travail devant elle pour freiner la hausse des prix. Le sentiment du marché avait déjà été malmené un peu plus tôt dans la semaine, la Banque centrale européenne (BCE) se montrant plus faucon qu’attendu, tandis que la banque mondiale et l’OCDE révisaient à la baisse leurs perspectives de croissance globale. N’oublions pas non plus la gestion du covid en Chine, qui inquiète de plus en plus les marchés et on obtient un terreau plus que fertile au net repli des indices vendredi soir.

Le rendement de l’emprunt US à 2 ans se met en orbite et casse les 3%, pour grimper à 3,16% ce matin, on n’avait plus vu ça depuis 2008. Le 30 ans passe sous le 5 ans, (3,22% contre 3,33%) et le 10 ans vient tester 3,20% à nouveau très tôt ce matin, pour revenir à 3,19% actuellement. Le marché envisage désormais une hausse de 75 points mercredi soir, ça commence à faire beaucoup, la norme étant 25 points de base. Tout le monde a désormais compris que la Fed va devoir monter en intensité dans son combat contre l’inflation, tout le monde craint donc un atterrissage brutal de la croissance économique. La Fed est encore plus remise en question, la pression monte encore sur les épaules de Jerome Powell, et le marché attend désormais un pic d’inflation plus élevé, c’est en quelque sorte le scénario du pire redouté par les taureaux.  

L’indice S&P500 (SPX) réalise sa 9e baisse hebdomadaire en 10 semaines, il recule de 5% sur 5 jours et se pose pile sur le niveau de 3’900 points à la cloche de vendredi soir. Ses prochains niveaux de support sont 3’815 points (38.2% de retracement Fibonnacci de la hausse «post covid» de 2’191 à 4’818 points), puis 3’810, le plus bas de la séance du 20 mai. Le Nasdaq100 (NDX) est pour sa part tout proche de son support de 11’768 points (50% de retracement Fibonnacci), il clôture à 11’832 points vendredi. Ensuite ce sera 11’492, le bas de la séance du 20 mai. La volatilité progresse mais pas autant qu’on aurait pu le penser, le VIX gagne 6,4% à 27,75, rappelons ici qu’il a de la place jusque à 37 – 39. Tous les secteurs du SPX reculent vendredi, les plus mauvaises performances du jour étant réalisées par les financières, la technologie et la consommation discrétionnaire.

Le dollar poursuit son rebond, le Dollar Index (DXY) grimpe à 104,55 tandis que la paire eur/usd traite ce matin à 1,0481, le marché price le différentiel de taux entre Etats-Unis et zone euro, se réfugie dans le billet vert et tient aussi compte du risque réel qu’Emmanuel Macron n’obtienne pas la majorité absolue à l’Assemblée dans une semaine. Le plus bas récent de la paire eur/usd se situe à 1,0354, atteint le 12 mai. L’or remonte quelque peu malgré la force du greenback, l’once traite à 1’863 dollars ce matin. Le pétrole reste demandé, le baril de WTI Light Crude évolue à 118,23 dollars, malgré une nouvelle augmentation des stocks observée la semaine passée.

Le programme de la semaine qui débute est chargé et les investisseurs n’auront que très peu de répit, l'action étant dictée par la lutte de la Fed contre l'inflation et les problèmes de chaîne d'approvisionnement, toujours présents dans presque tous les secteurs. Au menu macro-économiques, le rapport sur les prix à la production aux Etats-Unis, les ventes au détail et l'industrie manufacturière sont tous attendus par les investisseurs avant l'annonce des taux du FOMC mercredi soir à 20h, ainsi que la conférence de presse de Jerome Powell qui suivra. Cette semaine nous aurons aussi droit aux décisions de la Banque d’Angleterre et de la Banque Nationale Suisse (jeudi) ainsi que de la Banque du Japon (vendredi).

Emmanuel Macron pourrait perdre sa majorité absolue au parlement français, ce qui l'obligerait à faire des compromis pour faire avancer les réformes. Son parti et ses alliés devraient remporter entre 262 et 301 sièges à l'issue du premier tour de scrutin d'hier. Un total de 289 législateurs est nécessaire pour obtenir la majorité. Le deuxième groupe le plus important semble être Nupes, une alliance de partis de gauche dirigée par Jean-Luc Mélenchon. Le second tour aura lieu le 19 juin.

Journée de répit macro-économique aujourd’hui pour les investisseurs, ce qui ne fait pas de mal dans cet environnement plutôt morose.

TotalEnergies: Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 58 à 66 euros. Le Qatar a attribué à TotalEnergies 25% d'une nouvelle entreprise nationale pour augmenter la capacité totale d'export de gaz naturel liquéfié du pays. L'action de la marque de beauté américaine Revlon s’effondre de 53% vendredi sur fond de craintes de faillite. Le gendarme financier britannique place le Crédit Suisse sous surveillance, selon le Financial Times. La SEC américaine enquête sur Goldman Sachs au sujet des fonds ESG. BlackRock offre le choix du vote en assemblée générale à près de la moitié de ses clients détenant des produits indiciels. Tesla va fractionner son action en trois pour la rendre plus accessible et améliorer la liquidité du titre. Netflix lance une seconde saison de Squid Game. Google paie 118 millions de dollars pour solder une plainte en nom collectif pour discrimination sexiste. Novartis présente des données positives avec Kymriah dans la leucémie.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices baissent fortement, en sympathie avec Wall Street. Tokyo recule de 3,01% à la cloche, Hong Kong abandonne 3,44%, Shanghai perd 1,25% et Séoul rend 3,52%. Le future SPX recule de 1,8% et l’Europe ouvre en repli de 1,9%. Les obligations baissent aussi, les crypto-monnaies sont bazardées, on se débarrasse d’un peu tout en ce lundi matin à l’avant-veille de la très importante réunion de la Fed. On le sait, en finance, les excès sont bien souvent corrigés par des…excès. La période actuelle est très compliquée, personne ne le conteste, elle permettra en revanche aux esprits apaisés de saisir des opportunités, les firmes de qualité restent de qualité, même dans l’œil du cyclone. Alors certes, on ne parle quasiment plus de TINA ou de FOMO ces jours, mais plutôt de VUCA (Volatility, Uncertainty, Complexity, Ambiguity). Est-il besoin de rappeler que, en finance, la patience est la mère des vertus? probablement que oui…

A lire aussi...