Gonet: l'actualité des marchés au 10 juillet

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow -0,55%, S&P 500 -0,29%, Nasdaq -0,13%, Russell 2000 +1,22%, SOX +0,01%, Eurostoxx +0,32%, SMI -1,02%.

C’est un début de troisième trimestre plutôt compliqué que vivent les marchés, principalement en Europe où le Stoxx Europe 600 se replie de plus de 3% et vient dangereusement chatouiller sa moyenne mobile à 200 jours vendredi en séance, attention à ne pas la franchir, un fort joli précipice se trouve juste en-dessous. Clôture du SXXP à 447,65 points vendredi, la 200 dma se situe à 444,62 pts. De l’autre côté de l’Atlantique cela se passe un peu moins mal mais ce n’est pas non plus Broadway. L’indice S&P500 (SPX) grappille 0,06% sur la semaine, le Nasdaq100 (NDX) prend 0,65%, le bon vieux Dow Jones recule de 1,14% (courtesy of United Health, Goldman Sachs, Home Depot et Amgen). Une semaine plutôt calme en apparence sur les indices américains donc, mais si l’on gratte très légèrement la surface de ce marché, on réalise que le calme actuel n’est qu’apparent. Prenez l’épisode de volatilité de jeudi, le VIX décollant à 17 soit le niveau où il évoluait durant la crise de confiance envers le secteur des banques régionales américaines. Lundi l’indicateur de la volatilité du SPX traitait à 13,50, vendredi il clôture à 14,83. Il s’agit donc bien d’un épisode de volatilité mais cela nous enseigne que les marchés sont tendus comme une corde de violon. La raison de cette hausse subite et éphémère? L’énième prise de conscience des opérateurs financiers que la Fed n’entend pas desserrer l’étreinte sur les taux avant un moment (minutes du dernier FOMC publiées mercredi soir).

La politique monétaire de la Fed reste donc restrictive, celle de la BCE également, alors qu’en parallèle les craintes de récession refont quelque peu surface. Les dernières statistiques macro en zone euro et en Chine pointent vers une contraction de l’activité. Aux Etats-Unis c’est plus mitigé avec des signaux plutôt négatifs de l’industrie manufacturière, les services semblant mieux se porter, alors que le marché de l’emploi pourrait bien se calmer (créations d’emplois publiées vendredi) mais le taux de chômage reste très bas, à 3,6%. L’épisode de volatilité de jeudi est probablement exacerbé par le rebond du rendement de l’emprunt US à 10 ans, qui décolle de 3,85% le 5 juillet à 4,09% vendredi, ce matin il traite à 4,05% et évolue donc dans sa zone de résistance 4,00% - 4,10%. Notons au passage que le spread 2 / 10 ans US s’améliore enfin un peu, il passe à -86 points de base contre près de -110 bps la semaine passée, cela reste très clairement inversé mais il faut noter l’amélioration. Cela dit, le marché obligataire est actuellement étonnamment nerveux, l’indice MOVE (l’équivalent obligataire du VIX) traite à 130,41. Afin de vous faire une idée de ce que cela veut dire, au plus fort de la crise du covid, il était monté à 160 et cette année il a décollé à près de 200 lorsque la crise des banques régionales US a débuté. Sa moyenne mobile à 200 jours évolue à 84,32.

La semaine écoulée nous enseigne que les investisseurs regardent à nouveau de près ce que la Fed a l’intention de faire. Les Fed Funds prévoient 89% de probabilités d’une hausse de 25 points de base le 26 juillet, ensuite c’est le flou artistique le plus total avec grosso modo aucune conviction marquée jusqu’au 18 septembre 2024, où ces même Fed Funds prédisent 80% de probabilités d’une baisse de 25 points de base. Je rappelle ici que Jerome Powell a récemment déclaré que les baisses de taux sont à prévoir dans «des années». On ne donne pas boire à un âne… Focus sur la Fed donc, dans un contexte où l’inflation semble doucement lâcher prise et où le marché de l’emploi envoie quelques signes encourageants aux taureaux vendredi, mais en l’état cela ne semble pas suffisant pour relancer la machine «bull market». Le SPX, le NDX et le Dow rendent tous un peu de terrain sur la séance, notons que le Russell2000 fait nettement mieux, il semble bien que l’armée ait envie de monter sur la colline, et surtout que les investisseurs favorisent l’idée de croissance. Le breadth est bon, 5 titres clôturent en hausse contre 2 en baisse sur le NYSE vendredi, l’ETF SPX Equal Weight progresse de 0,3%, c’est du côté des  mastodontes de la tech qu’il faut rechercher les coupables de la faiblesse de fin de séance, l’ETF Mega Cap Growth perd 0,5%.

Et c’est parti pour un money time de marché! L’été bat son plein, les investisseurs sont assommés par des températures en bull market permanent, bon nombre d’entre eux regardent ailleurs car en vacances et la saison des résultats de sociétés au troisième trimestre débute cette semaine, alors que la liquidité des indices s’évapore comme le glacier du Rhône. Le bull market reste aux manettes, le momentum observé ces dernières semaines n’a pas encore fait ses valises mais de nombreux obstacles potentiels pourraient se dresser sur la route des taureaux ces prochaines semaines. Quid de la santé réelle des entreprises? Au-delà des attentes réduites des analystes, on observera de près la marge bénéficiaire des sociétés et leur pouvoir de fixation de prix, dans un contexte où les coûts de financement augmentent alors que l’inflation reflue. On gardera aussi en tête la courbe des taux US, qui s’est inversée il y a un an déjà (2 / 10 ans). Les investisseurs considèrent cette courbe comme un indicateur de la santé économique du pays. Lorsqu’elle s’inverse, cela signifie que les traders parient que la Fed maintiendra ses taux élevés à court terme, mais qu’elle devra ensuite les réduire pour relancer l’économie. Et puis il y a le positionnement général, qui a récemment beaucoup évolué. De nombreux acteurs du marché sont restés sur la touche depuis le début de l’année, boudant la hausse des actions, pour finalement rejoindre le pack ces dernières semaines et pousser le positionnement long en actions à son plus haut niveau en près de 18 mois (source: JP Morgan Chase). Le positionnement dans les secteurs des logiciels et des semis semble particulièrement tendu. Rappelons ici que 8 firme du SPX (Alphabet, Amazon, Apple, Meta, Microsoft, Netflix, Tesla, Nvidia) représentent 30% de la capitalisation boursière de l’indice. Le fameux FOMO (Fear Of Missing Out) a récemment fait son retour, attention à garder la tête froide dans un tel contexte.

Le taux d'inflation des consommateurs chinois est resté stable en juin, tandis que les prix à la production ont encore baissé, alimentant les inquiétudes sur les risques de déflation et renforçant la spéculation sur une éventuelle relance économique. «Les données d'aujourd'hui plaident certainement en faveur d'un assouplissement de la politique monétaire, ce que les décideurs politiques font déjà, mais seulement de manière mesurée», pense SocGen.

Janet Yellen déclare qu'il est trop tôt pour écarter la menace d'une récession américaine, mais les données suggèrent «qu'il y a une voie pour faire baisser l'inflation dans le contexte d'un marché du travail sain». Ses deux jours d'entretiens à Pékin contribuent à renforcer les relations entre les États-Unis et la Chine et Mme Yellen indique qu'elle a cherché à convaincre la nouvelle équipe économique du pays que les États-Unis ne sont pas déterminés à rechercher un «avantage économique».

Au menu macro-économique du jour, les stocks des grossistes américains en mai seront publiés à 16h00.

La Banque nationale saoudienne (The Saudi National Bank) s'est vu refuser une prise de participation de 40% dans le Credit Suisse, selon Blick. L'action Bayer soutenue par une rumeur de scission de sa branche Crop Science. Mark Zuckerberg annonce 70 millions d'utilisateurs pour Threads, lancé par Meta Platforms pour concurrencer Twitter. Un tribunal américain invalide le brevet pour une combinaison du médicament pour le coeur Entresto (sacubitril/valsartan) de Novartis.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en ordre dispersé. Tokyo recule de 0,61% à la cloche, Hong Kong progresse de 0,81%, Shanghai avance de 0,22% et Séoul perd 0,24%. Le future SPX rend 15 points et l’Europe ouvre en repli de 0,2%. Le dollar recule à 1,0953 contre euro, l’or reste enfermé dans sa fourchette 1900 – 1930 dollars par once et le pétrole tente de repartir à la hausse, actuellement à 73,35 dollars le baril de WTI Light Crude.

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