En quête de placements décorrélés du reste du marché

Yves Hulmann

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Quelle que soit la volatilité sur les marchés, la dette privée contribue à apporter de la stabilité dans un portefeuille, souligne Niels Bodenheim de NN Investment Partners.

La remontée des taux d’intérêt n’a pas mis un frein à la quête de rendement de la part des investisseurs. Quel peut être l’apport de placements en dette privée dans les portefeuilles? Le point avec Niels Bodenheim, responsable de l'équipe de crédit alternatif («Head of Alternative Credit») chez NN Investment Partners.

«Il y a un certain décalage entre le moment où le capital est engagé et celui où il est déployé. C’est pour cela qu’il faut avoir une stratégie d’investissement à long terme.»
Comment la hausse des taux d’intérêt modifie-t-elle le contexte d’investissement pour la dette privée?

Différents aspects sont à considérer à ce sujet. D’un côté, les investisseurs sont toujours en quête de rendement. En effet, même si les placements en obligations jugées sûres génèrent à nouveau des rendements positifs, ceux-ci restent le plus souvent bien inférieurs aux taux d’inflation actuels, en Europe notamment. De l’autre, les investisseurs sont aussi à la recherche de placements présentant une volatilité moindre. Actuellement, la volatilité est beaucoup plus élevée pour la dette publique (celle négociée sur les marchés) que pour la dette privée. La dette à taux flottants est un facteur de stabilité. Les taux flottants permettent d’obtenir un rendement supérieur au taux sans risque («risk free rate»). Enfin, il y a toujours l’aspect de la décorrélation – les gens veulent investir une partie de leurs actifs placés dans des placements qui soient décorrélés du reste du marché. Il y a une remise en question du modèle traditionnel 60/40, à savoir un portefeuille constitué de 60% d’actions de 40% d’obligations. Les marchés traditionnels offrent actuellement certaines opportunités mais ils présentent aussi des incertitudes. Quelle que soit la volatilité sur les marchés, la dette privée apporte, elle, davantage de stabilité. Un portefeuille bien diversifié et bien structuré d’investissements dans la dette privée contribue à réduire la volatilité dans un environnement caractérisé par une inflation élevée ou une récession, tout en offrant des rendements attrayants.

Compte tenu du temps qui est nécessaire pour placer le capital confié à un véhicule qui investit dans les marchés privés, n’y a-t-il pas un risque de devoir patienter trop longtemps avant d’obtenir les résultats espérés?

Bien entendu, la dette privée n’est pas un type d’investissement qui s’effectue de manière instantanée. Il y a un certain décalage entre le moment où le capital est engagé et celui où il est déployé. C’est pour cela qu’il faut avoir une stratégie d’investissement à long terme. Un autre aspect à considérer est aussi que la dette privée est plutôt favorable au prêteur, ce qui ajoute un aspect de protection à la baisse.

«La dette privée contribue à financer l’économie au sens large, pas seulement certains véhicules spécifiques.»
Du point de vue de l’émetteur, est-il possible d'obtenir de meilleures conditions, soit des coûts de financement moins élevés, pour l’emprunteur s'il se refinance via de la dette privée plutôt qu’à l’aide d’obligations classiques?

Il faut tenir compte du fait que l’environnement est devenu plus difficile pour emprunter de l’argent à faibles coûts. Les prêts syndiqués sont moins prévisibles en périodes d’incertitude. A cet égard, la dette privée offre aussi davantage de flexibilité. Il y a moins de personnes avec qui il faut négocier. Il est ainsi possible d’avoir davantage de flexibilité entre les emprunteurs et les prêteurs. La relation entre les deux parties est plus directe que dans le cadre de prêts syndiqués. C’est un avantage aussi bien en cas de nouvelles émissions que s’il s’agit de financer des ajouts de financement.

Qui lève surtout des fonds actuellement avec de la dette privée?

Il y a, d’un côté, des nouveaux émetteurs tels que des fonds de private equity, immobiliers ou dans les infrastructures par exemple. De l’autre, il y a aussi toutes sortes d’entreprises qui ont besoin de financement supplémentaire que ce soit pour leur fonds de roulement ou pour financer des développements supplémentaires. Dans ce sens, la dette privée contribue à financer l’économie au sens large, pas seulement certains véhicules spécifiques. Et c’est à mon avis d’autant plus important actuellement du fait que l’activité de prêts octroyés par les banques a été fortement réduite comparé à ce qu’elle était encore par le passé. La dette privée ne sert pas à financer uniquement le private equity mais elle contribue aussi à la croissance économique dans son ensemble.

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