Gonet: l'actualité des marchés au 6 février

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

5 minutes de lecture

Dow -0,38%, S&P 500 -1,04%, Nasdaq -1,59%, Russell 2000 -0,78%, SOX -1,9%, Eurostoxx +0,40%, SMI +1,44%.

Wall Street pensait être débarrassée de Jerome Powell et ses détraqueurs pour un moment, le marché de l’emploi américain la fait déchanter, retour sur une journée de vendredi plutôt agitée…

C’est quelque peu contrarié que le marché se remet aux affaires vendredi matin, les géants de la technologie font moins les malins, les résultats d’Apple, Amazon et Alphabet sont passés par là la veille au soir, qui ont montré que les mastodontes de la tech continuent de gagner des tonnes de milliards, mais que les voiles des revenus ne sont plus hissées aussi haut qu’elles le furent il y a peu, notamment au niveau du nuage (cloud). Leurs fortunes à la cloche sont diverses, Amazon perd 8,4%, Alphabet rend 2,8% et Apple gagne 2,4%, j’y reviens. Quoi qu’il en soit, le paysage de vendredi est posé, les résultats de sociétés déçoivent plus qu’ils ne rassurent mais on s’en fiche un peu sur les parquets de trading, Jerome Powell a quasiment abdiqué mercredi soir, les taux semblent voués à baisser, tout va bien à bord du navire des taureaux. Et puis 14h30 sonne, heure de la publication du rapport mensuel sur l’emploi aux Etats-Unis. C’est là que la mer s’agite d’un coup. Les taureaux découvrent avec stupeur que la première économie du monde a créé 517'000 emplois au mois de janvier, les économistes prédisaient 188'000. «Cerise sur le gâteau», le taux de chômage recule à 3,4%, on n’avait plus vu ça depuis 1969. Les taureaux ont beau mettre en lumière le recul des salaires horaires, tout cela fait un peu beaucoup pour un marché qui avait décollé les séances précédentes, on se met en marche vers le sud dans les salles de trading.

Mais les taureaux ne sont pas prêts à capituler aussi facilement que cela, ils résistent les bougres et tentent même de reprendre la main en séance, en envoyant brièvement les indices en territoire positif. Au final, les ours remportent cette manche, mais si l’on prend un petit peu de recul, sur la semaine les taureaux restent les grands gagnants. L’indice S&P500 (SPX) progresse de 1,6%, le Nasdaq100 (NDX) gagne 3,34%, l’Eurostoxx avance de 1,9% et le SMI s’adjuge 1,44%. Le breadth de vendredi est mauvais, seulement 21% des titres du SPX terminent la séance dans le vert. En y réfléchissant, la séance de cette fin de semaine se conclut plutôt bien, les résultats décevants des mastodontes de la tech combinés à un marché de l’emploi nettement plus fort qu’attendu auraient pu mettre le marché à genoux, vendredi il rend simplement une petite partie des gains de la semaine, dans des volumes d’échanges soutenus qui plus est (11,47 milliards de titres traités sur le NYSE).

Le marché des Fed Funds revoit sa copie. Il prévoit désormais 100% de probabilités d’une hausse de 25 points de base lors de la prochaine réunion de la Fed du 22 mars. La nouveauté, c’est qu’une hausse supplémentaire est désormais dans les cartes, pour la réunion du 3 mai. Les Fed Funds lui donnent 62% de chances de se produire, jeudi c’était 30%. Le dollar n’en demandait pas tant, le Dollar Index (DXY) repart fortement à la hausse et revient à 103,04, il regarde sa moyenne mobile à 50 jours qui se situe à 103,70. Sur la partie support, on se concentrera sur 100,82, le bas du 2 février. La paire EUR/USD recule à 1,0786, elle voit sa 50 jours à 1,0687, c’est le principal support à considérer à court terme. Côté résistance, 1,0901 reste d’actualité. Le rendement du 10 ans US passe de 3,38% à 14h30 vendredi à 3,54% ce matin. Au registre des secteurs, on inverse les rôles de début de semaine, les actions de croissance sont délaissées au profit des défensives que sont notamment les valeurs de la santé. Je note avec intérêt que la volatilité recule vendredi, le VIX perd 2% à 18,33, il n’y a pas le feu lac du sentiment des investisseurs en cette fin de semaine.

Techniquement, le SPX reste bien orienté. Il se maintient nettement au-dessus de sa 200 jours, au-dessus du haut de son canal baissier et une golden cross a eu lieu le 2 février (la 50 jours traverse la 200 jours à la hausse, un signal haussier). L’indice phare de Wall Street se maintient par ailleurs au-dessus des 4'100 points et il n’est pas suracheté. Même constat sur le NDX, avec la golden cross qui reste à venir.

Chez Apple, le chiffre d'affaires et le bénéfice par action du premier trimestre fiscal n'ont pas été atteints; l'entreprise signale des contraintes d'approvisionnement dues aux confinements du Covid en Chine et un effet de change négatif de 800 points de base ; la croissance du chiffre d'affaires du premier trimestre est également inférieure aux prévisions; les services, la marge brute et ses prévisions, l'amélioration de l'approvisionnement et les commentaires positifs sur la demande sont les éléments les plus positifs. Chez Amazon, le chiffre d'affaires et le résultat d'exploitation du quatrième trimestre battent les attentes; cependant, la croissance du nuage ralentit 7 points de pourcentage pour atteindre 20%, soit 2 à 3 points de pourcentage de moins que prévu ; les prévisions de chiffre d'affaires et de résultat d'exploitation pour le premier trimestre sont faibles; les meilleurs commentaires concernent la normalisation des marges dans le commerce électronique. Chez Alphabet, le chiffre d'affaires du quatrième trimestre est inférieur de 1% à celui des analystes, avec une baisse de 2% du Search en glissement annuel, soit un ralentissement de 1pp par rapport au trimestre précédent, tandis que le résultat d'exploitation est également inférieur de 1%; le chiffre d'affaires de YouTube est en baisse de 8% en raison d'une demande plus faible de la part des annonceurs; la société a passé beaucoup de temps à parler de l’avancée de l'IA; elle met également l’accent sur la réduction des coûts, bien que les effets ne soient pas attendus avant 2024.

Washington lance une mission pour récupérer ce que les responsables considèrent comme du matériel d'espionnage dans le ballon chinois abattu au large de la Caroline du Sud, alors que la pression monte sur Joe Biden pour qu'il riposte à Pékin en imposant de nouvelles restrictions aux exportations de technologies sensibles. Pékin insiste sur le fait qu'il s'agissait d'un avion civil qui a dévié de sa trajectoire, et déclare qu'elle «se réserve le droit d’envoyer d'autres réponses». Un responsable américain indique que des ballons similaires avaient survolé l'espace aérien américain au moins trois fois pendant la présidence de Donald Trump.

Le yen a atteint son niveau le plus faible depuis plus de trois semaines après que Nikkei a annoncé que Masayoshi Amamiya a été approché par le gouvernement pour succéder à Haruhiko Kuroda au poste de gouverneur de la Banque du Japon en avril. Le secrétaire adjoint du Cabinet, Yoshihiko Isozaki, dément cette information, affirmant qu'aucune décision n’a encore été prise. Selon les économistes, M. Amamiya prolongerait probablement la politique d'assouplissement monétaire actuelle s'il était nommé à ce poste.

La déroute des actions des sociétés du groupe Adani entre dans sa troisième semaine. Adani Enterprises glisse de près de 10% après avoir renoncé à une importante vente d'obligations, avant que le titre ne se reprenne, il ne recule plus que de 3% ce matin. StanChart cesse d'accepter les obligations d'Adani comme garantie pour les prêts sur marge, selon ET Now. Le parti d'opposition pousse le Premier ministre Narendra Modi, un allié d'Adani, à rompre son silence et prévoit une manifestation nationale aujourd'hui.

Au menu macro-économique du jour, les commandes d'usines allemandes en décembre (sorties plus fortes que prévu) et les ventes de détail dans la zone euro en décembre (11h00) animeront la séance.

De nouvelles hausses de prix des produits alimentaires de Nestlé seront inévitables cette année, selon le patron du groupe, Ulf Mark Schneider, cité dans FAZ. Dans les mines d'or, l'américain Newmont Corporation propose de racheter le canadien Newcrest Mining pour 16,9 milliards de dollars en actions, sur la base de 0,380 Newmont pour 1 Newcrest. Une offre basée sur 0,363 actions Newmont avait été précédemment repoussée. Dans le secteur de l'entreposage individuel, Public Storage lance une OPA hostile sur Life Storage pour 11 milliards de dollars. L'opération, en titre, valorise la cible 129,30 USD par action. Gilead obtient l'accord de la FDA pour le traitement du cancer du sein par Trodelvy. La fusion entre Dufry et Autogrill est finalisée. BMW investit 800 millions d’euros pour produire des voitures électriques au Mexique. Walt Disney veut vendre plus de contenus à ses rivaux. Novartis présente des données positives sur le long terme avec Cosentyx. Elon Musk déclaré non coupable pour ses tweets sur une sortie de la cote de Tesla en 2018.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices sont en repli, hormis Tokyo qui profite de l’affaiblissement du yen, la paire USD/JPY traite à 131,77. L’indice Nikkei225 progresse de 0,67% à la cloche. Hong Kong et Shanghai se replient de 2,23% et 0,76%, il semble qu’un ballon fasse peur aux indices du pays. Séoul rend 1,7%. Le future SPX abandonne 18 points, le marché intègre la notion de résultats de sociétés en ralentissement et d’une Fed qui restera probablement restrictive plus longtemps qu’espéré, avec un taux terminal qui est désormais attendu à 5%. En parallèle, les craintes de récession se dissipent un peu plus après le rapport sur l’emploi de vendredi. Le pétrole souffre du retour en force du billet vert, le baril de WTI Light Crude recule à 73,79. L’or a perdu près de 100 dollars par once en quelques séances, ce matin la relique barbare évolue à 1878 dollars. Il semble de plus en plus évident d’un point de vue technique que le niveau de 1960 dollars constitue la résistance à casser. Côté support on regardera la zone 1846 – 1843 dollars, qui concentre la moyenne mobile à 50 jours et 50% de retracement Fibonnacci de la baisse de 2070 dollars à 1616 dollars.

Cette semaine nous suivrons attentivement l’interview de Jerome Powell de demain ainsi que l’indice du sentiment des consommateurs publiés par l’Université du Michigan vendredi. La saison des résultats de sociétés ralentit, nous aurons ceci dit notamment droit à Walt Disney, BP, Pepsico et Chipotle.

A lire aussi...