Gonet: l'actualité des marchés au 31 janvier

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow -0,77%, S&P 500 -1,30%, Nasdaq -1,96%, Russell 2000 -1,35%, SOX -2,67%, Eurostoxx -0,46%, SMI +0,42%.

L’ombre de la Fed plane sur Lower Manhattan.

Aucune nouvelle particulière n’explique le repli des indices hier, on lâche simplement un peu de lest dans les portefeuilles avant la décision de la Fed de demain soir et, surtout, le discours de son patron Jerome Powell. Rappelons le contexte, Jerome et les gouverneurs ont été bâillonnés par la black-out period ces derniers jours. Ils n’ont donc pu calmer les ardeurs acheteuses du marché, ce qu’ils avaient pris pour habitude de faire depuis quelques temps. Soyons honnêtes, on peut comprendre la Fed, qui doit craindre comme la peste de relâcher son étreinte trop tôt. Le retour de la Chine dans le concert de la croissance mondiale ajoute un ingrédient potentiellement inflationniste à la réflexion de la Réserve Fédérale. Prenez aussi les fonds de pension aux Etats-Unis, qui ont saisi le rebond des taux pour amasser des obligations depuis le dernier trimestre de 2022. Ce faisant, ils ont fait pencher la balance du côté de la demande, monter le prix des obligations et reculer les rendements, ce qui a incité les investisseurs à revenir massivement dans les actions, notamment celles de croissance, du coup les indices décollent depuis le début de l’année et le «wealth effect» augmente, qui fait se sentir mieux le consommateur américain, le voilà donc de retour au shopping mall (ou sur internet). Le consommateur demande donc plus de biens et de services, ce qui produit un effet direct sur… vous m’avez compris.

La conclusion de tout cela, c’est que tout d’abord je ne voudrais pour rien au monde être dans les chaussures de Jerome Powell. Au-delà de cette considération fondamentale, on ne peut reprocher à la Fed de rester prudente, posture qu’elle adoptera probablement demain soir, comme le suggère l’article paru ce weekend dans le Wall Street Journal et signé par Nick Timiraos (le porte-parole officieux de la Fed), qui indique que «l'inflation pourrait accélérer à nouveau en raison de l'étroitesse du marché du travail». M. Timiraos ajoute dans un article publié hier que la stratégie de la Fed en matière de taux d'intérêt pourrait dépendre de la mesure dans laquelle les membres croient que l'économie va ralentir. Pas besoin de consulter le Père Fouras pour comprendre que la Réserve Fédérale des Etats-Unis ne va pas lâcher la bride aux taureaux demain soir, c’est probablement la raison pour laquelle les indices d’actions reculent ce lundi. En l’état, les Fed Funds continuent de prévoir une hausse de 25 points de base demain, puis un relèvement similaire le 22 mars, le fameux taux terminal est toujours attendu légèrement en-dessous de 5%, alors que la Fed disait il y a encore peu qu’il se situe au-dessus. Notons que la BCE et la BoE (Bank of England) sont aussi de sortie cette semaine, que le rapport mensuel sur l’emploi aux Etats-Unis sera publié vendredi, que près d’un tiers de la capitalisation boursière du SPX publie ses résultats (et cela est important), mais le point d’orgue de cette semaine boursière reste incontestablement le FOMC de demain soir.

L’indice S&P500 (SPX) se maintient au-dessus des 4'000 points, au-dessus de sa moyenne mobile à 200 jours et au-dessus du top de son canal baissier entamé en janvier 2022. D’un point de vue technique, on peut donc dire que le SPX a un message pour la Fed: «même pas mal!». Le Nasdaq100 (NDX) repasse en-dessous des 12'000 points, il casse sa 200 jours mais parvient à se maintenir au-dessus du haut de son canal baissier. C’est donc là que réside le point faible du marché, il va falloir suivre le NDX en priorité, aussi parce que nombreux sont ses membres qui pèsent si lourd dans les indices qu’ils font souvent pencher la balance dans l’une ou l’autre direction. Si l’on se penche sur les petites et moyennes capitalisations (Russell2000 – RTY), la configuration technique reste similaire à celle du SPX, ce qui est plutôt rassurant. Les volumes d’échanges d’hier sont faibles avec 9,42 milliards de titres traités sur le NYSE, la volatilité remonte de 8% à 19,94, le dollar retrouve quelques couleurs, la paire EUR/USD revient à 1,0814, le pétrole baisse à 77,22 dollars le baril de WTI Light Crude et l’or recule à 1908 dollars l’once, impacté par le regain de forme du billet vert. Le rendement du 10 ans US remonte à  3,52%. Au chapitre des secteurs, je note que les biens de consommation de base et les utilities font mieux que les autres, tandis que l’énergie, la technologie et les services de consommation se prennent les pieds dans le tapis. L’appétit au risque diminue donc hier, la Fed approche à grand pas et cela se voit dans le comportement des acteurs du marché.

Joe Biden pourrait couper totalement Huawei de tous ses fournisseurs américains, dont Intel et Qualcomm, alors que le gouvernement renforce les restrictions sur le secteur technologique chinois. Depuis plusieurs années, Washington exige que les fournisseurs américains obtiennent l'approbation du gouvernement avant de vendre à Huawei. Les responsables de l'administration débattent actuellement de l'opportunité et de la manière d'ajuster les politiques d'octroi de licences, selon l’agence Bloomberg.

La Grande-Bretagne est confrontée aux deux années les plus sombres de toutes les grandes nations industrielles, avec une récession en 2023 et la croissance la plus lente vis-à-vis de ses pairs en 2024, selon le FMI. L'économie britannique se contractera de 0,6% cette année – la seule contraction au sein du G7 – car la hausse des taux d'intérêt et des impôts ainsi que la restriction des dépenses publiques exacerbent la crise du coût de la vie. Le Fonds prévoit une croissance du PIB mondial de 2,9% cette année, soit 0,2 point de plus que les prévisions d'octobre.

Janet Yellen déclare que la faiblesse persistante de l'inflation devrait redevenir un défi économique à long terme, une fois que les distorsions de l'ère pandémique à l'origine de la récente flambée se seront atténuées et que les prix se seront calmés. Paul Krugman s'inquiète du fait que les investisseurs aient mis trop tôt le risque d'inflation dans le rétroviseur. Marko Kolanovic, de JPMorgan, estime que les opérateurs boursiers devraient estomper le rallye de cette année, car ils s'attendent à ce que les marchés baissent à mesure que les risques de récession augmentent.

Au menu macro-économique du jour, les chiffres préliminaires d'inflation en France et en Allemagne ou le dernier PIB de la zone euro. Aux États-Unis, les prix de l'immobilier (15h00) seront suivis de l'indice PMI de Chicago (15h45) et de l'indice de confiance des consommateurs du Conference Board de janvier (16h00). Dans la nuit, le Japon a fait état d'une production industrielle et de vente de détails plus solides que prévu sur le mois écoulé, tandis que la Chine a publié ses indicateurs PMI officiels, avec une activité manufacturière en croissance légère, en ligne avec les attentes, et un PMI des services plus robuste que prévu et bien ancré en zone d'expansion.

Samsung Electronics: les bénéfices du quatrième trimestre du géant coréen sont inférieurs aux attentes. Le groupe prévoit des investissements dans les puces similaires à ceux de 2022. UBS: le bénéfice du quatrième trimestre augmente de 23% et dépasse les estimations. Unicredit: augmente son objectif de versement de dividende de 40% après un bénéfice record. Ford Motor réduit les prix et augmente la production de la Mustang Mach-E, suite aux rabais annoncées par Tesla. Le CEO de Leoni reprend le même rôle chez AMS-Osram. Boeing va augmenter la production de 737 MAX dans son usine américaine en 2024. L'industriel remporte un contrat de 2,3 milliards de dollars pour livrer des avions de ravitaillement en vol à l'US Air Force. Rheinmetall et General Motors ont des chances de remporter une grosse commande de camions de l'armée américaine. Nike poursuit Lululemon pour violation de brevets sur des chaussures. Bed Bath & Beyond ne devrait pas pouvoir échapper à la faillite cette semaine, selon plusieurs sources. Logitech nomme un nouveau directeur financier. Roche coopère avec l'américaine Jana Care pour les tests sanguins à domicile.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en baisse. Tokyo égare 0,39% à la cloche, Hong Kong perd 1,12%, Shanghai recule de 0,42% et Séoul rend 1,04%. Le future SPX récupère 7 points et l’Europe ouvre en léger recul.

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