Gonet: l'actualité des marchés au 26 septembre

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

4 minutes de lecture

Dow -1,61%, SPX -1,72%, Nasdaq -1,66%, Russell 2000 -2,48%, SOX -1,45%, Eurostoxx -2,29%, SMI -1,55%.

Le sentiment du marché est binaire, il est soit animé par la cupidité, soit par la peur. Ces deux meilleures ennemies ne se côtoient jamais, elles appliquent une garde alternée parfaite. Cet été la cupidité a réalisé un retour remarqué dans les esprits, qui a duré plus ou moins deux mois. Puis il y a eu le discours de Jackson Hole, à l’occasion duquel le grand méchant Powell a eu l’outrecuidance d’être réaliste, et le marché de se voir forcer de faire face une fois de plus à la réalité de la fin des robinets de liquidités grands ouverts. La séance de vendredi est à nouveau pénible pour les taureaux, qui subissent de plein fouet la chute du marché obligataire américain, dont les rendements grimpent beaucoup trop rapidement pour un joyeux royaume des actions qui abhorre cela par-dessus-tout. Voyez plutôt, le 2 ans US débute sa semaine à 3,85%, ce qui est déjà élevé, pour évoluer ce matin à 4,31%. Le 10 ans traite à 3,77%, lundi passé il évoluait à 3,45%. Le spread 2 / 10 ans atteint un historique -53 points de base, la question de la récession ne se pose plus pour un marché obligataire qui met son petit frère des actions devant un fait quasi accompli.

L’indice S&P500 (SPX) passe en-dessous de son niveau de clôture du 16 juin en séance (3666,77 points) pour clôturer légèrement au-dessus. La hausse de cet été est donc totalement annulée, notons au passage que ce niveau du 16 juin se situe précisément 3000 points au-dessus du bas de la crise des subprimes, atteint le 6 mars 2009 en séance (666,79 points). À l’époque on s’était dit que le diable avait acheté le marché, je sais, les traders sont hyper superstitieux. Plus sérieusement, au chapitre des secteurs les 11 composants du SPX reculent à la cloche, avec une mention spéciale pour l’énergie, qui dévisse de 6,75%, emportée par la chute du pétrole (le WTI Light Crude à 77,83 dollars le baril ce matin), lui-même emporté par le mot «récession», qui s’imprime un peu plus chaque jour dans la psyché de tout un chacun. Notons le secteur de la santé, qui limite la casse, tout comme les utilitaires, on sent bien que les intervenants tente de se réfugier là où ils le peuvent. Les volumes d’échanges augmentent mais sont très loin d’atteindre une configuration de capitulation. La volatilité se fait plaisir, le VIX décolle de 9,36%, il clôture à 29,92 après être venu à 32,31 en séance, le niveau de 35 constitue une résistance à considérer. Amis des produits structurés, votre moment est arrivé, il est aujourd’hui possible de striker des produits réellement conservateurs en encaissant de très beaux coupons, ne laissez pas passer cette occasion.

Le marché est donc en train d’enfin se souvenir que la récession fait toujours bel et bien partie du cycle économique. Dans ce contexte, Bank of America nous suggère de bien surveiller le marché américain de l’emploi. Lorsque ce dernier commencera à se détériorer, la banque américaine pense que le marché aura totalement accepté l’idée de la contraction économique. Elle ne nous dit pas d’acheter le marché à ce moment-là mais précise que cela devrait profiter aux actions les plus cycliques, le marché est une incroyable machine à anticiper les tendances, souvenons-nous en.

Dans un tel contexte, le dollar reste à la mode, bien qu’étant détenu comme quasiment jamais par le plus grand monde (crowded trade). Le Dollar Index (DXY) atteint 113,90 ce matin, un niveau extrêmement élevé. Il est ceci dit bien aidé par les annonces surréalistes du gouvernement de Liz Truss et l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite en Italie, j’y reviens. La paire euro dollar traite à 0,9680 ce matin.

«Moment of Truss pour la livre sterling»: la première ministre britannique annonce le plus grand programme de réductions d'impôts depuis 1972 afin de favoriser une croissance économique plus forte. En bref, Londres veut dépenser 60 milliards de pounds pour compenser la hausse du prix de l’énergie, en six mois, je répète, en six mois… en bonne afficionada de Maggie Tatcher, Liz Truss va supprimer le plafond des bonus des banquiers et veut augmenter les impôts des sociétés à 25%, tout en supprimant le droit de timbre sur les achats de maisons. La baisse de l’impôt sur le revenu devrait intervenir un an plus tôt que prévu. Cette annonce choque le marché et fait décoller le rendement de l’emprunt britannique à 10 ans de 36 points de base, à 3,82%, les investisseurs reconnaissant qu'elle sera financée par l'émission d'un plus grand nombre de titres de créance dans un contexte de hausse des taux d'intérêt. En outre, on craint que les efforts visant à stimuler une croissance plus forte ne maintiennent les taux d'inflation à un niveau élevé. La livre s’effondre contre le dollar, le Câble traite ce matin à 1,0695, le 13 septembre il évoluait à 1,1738, le 13 janvier à 1,3749, je m’arrête ici pour mes amis exposés à cette monnaie…

C’est historique! Giorgia Meloni remporte une large victoire en Italie au cours d’élections qui vont tourner la page de l'ère Draghi. Giorgia Meloni remporte une nette majorité lors des élections italiennes de dimanche, s'apprêtant à devenir la première femme Première ministre du pays à la tête du gouvernement le plus à droite depuis la Seconde Guerre mondiale. Son alliance, qui comprend également la Ligue de Matteo Salvini et Forza Italia de Silvio Berlusconi, obtient environ 43% des voix, selon les projections de la RAI, le radiodiffuseur public. Cela donnerait au bloc au moins 114 sièges au Sénat, où 104 voix sont nécessaires pour obtenir la majorité. L’euro en prend ombrage, on craint que les relations entre Rome et Bruxelles se tendent dans les salles de marchés.

La semaine qui débute sera marquée par une multitude de publications économiques, notamment les dernières mises à jour des commandes de biens durables, de la confiance des consommateurs, des ventes de logements neufs, du PIB et des prix PCE aux Etats-Unis. Nous aurons aussi droit à une cascade de discours de banquiers centraux, à suivre de près bien évidemment. Sur le calendrier des entreprises, Intel (INTC) tiendra un événement clé sur l'innovation, Amazon (AMZN) présentera de nouveaux produits et Tesla (TSLA) tiendra sa très attendue journée de l'intelligence artificielle à Palo Alto, en Californie. Jeudi, les actions de Porsche commenceront à se négocier à Francfort.

Au menu macro-économique du jour, l'indice Ifo de confiance des milieux d'affaires allemands (11h00) et l'indice d'activité de la Fed de Chicago (14h30) sont attendus.

Givaudan: Morgan Stanley passe de pondération en ligne à surpondérer en visant 3400 francs. Volkswagen lance Porsche en bourse jeudi. L'Italie et Intel choisissent la Vénétie comme région de prédilection pour une nouvelle usine de puces. PG&E va remplacer Citrix dans le S&P500. EQT Corp prendra la place de Duke Realty. Glencore condamné à une amende de 486 millions de dollars pour son système de manipulation du marché américain. La direction de Credit Suisse publie un mémo interne pour tenter de rassurer ses employés après les rumeurs récentes. Vodafone envisage de vendre sa participation dans Vantage Towers. Le directeur financier sortant du groupe Burberry occupera le même poste chez GSK. Justin Boxford nommé président mondial de la marque Estée Lauder. AstraZeneca abandonne le médicament contre le cholestérol de Ionis après avoir échoué à atteindre le seuil d'efficacité dans l'étude de phase II. Givaudan se joint à LanzaTech pour fabriquer des ingrédients de parfumerie à partir de carbone renouvelable.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent dans le rouge, Tokyo perd 2,66% à la cloche, Hong Kong recule de 0,93%, Shanghai abandonne 1,17% et Séoul baisse de 3,02%. Le future SPX rend encore 25 points et l’Europe ouvre en repli de 0,6%. La configuration technique de l’or se détériore encore un peu, l’once évolue à 1643 dollars, le prochain niveau de support se situe à 1600 – 1598 dollars. Gardons en tête que le sentiment du marché est en train d’atteindre des niveaux d’extrême pessimisme, la capitulation semble guetter, qui marque souvent la perte de nerfs des investisseurs, petits porteurs en tête. Warren Buffet doit se régaler ces jours.

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