La BNS met fin à la période des taux négatifs

AWP

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L’institut d’émission resserre pour la deuxième fois en autant d’examens trimestriels sa politique monétaire, relevant son principal taux directeur de 75 points de base. Ce dernier passera ainsi dès ce vendredi de -0,25% à 0,5%.

La Banque nationale suisse (BNS) met un point final à près de huit ans de taux négatifs. Afin de contrer une inflation persistante, l’institut d’émission resserre pour la deuxième fois en autant d’examens trimestriels sa politique monétaire, relevant son principal taux directeur de 75 points de base. Ce dernier passera ainsi dès ce vendredi de -0,25% à 0,5%.

Le garant de la stabilité monétaire entend par ce biais «contrer la pression inflationniste qui s’est de nouveau accrue et en entraver la propagation à des biens et services moins touchés jusqu’ici par le renchérissement», précise le point de situation livré jeudi. L’institution avertit au passage qu’il n’est «pas exclu que de nouveaux relèvements de taux soient nécessaires pour assurer la stabilité des prix à moyen terme».

La BNS avait introduit pour la première fois en décembre 2014 des taux négatifs, en abaissant la marge de fluctuation du Libor - son taux de référence d’alors - entre -0,75% et +0,25%. Quelques semaines plus tard, le 15 janvier 2015, ce dernier passait complètement en terrain négatif en étant abaissé entre -0,25% et -1,25%, après l’abolition du cours plancher face à l’euro.

Une exception réactivable

Par cette mesure, la BNS voulait empêcher une appréciation trop importante du franc. Inédit à l’époque, le taux négatif a depuis intégré durablement la panoplie de mesures à disposition de l’établissement. «Il restera, à l’avenir aussi, un important instrument de politique monétaire auquel nous recourrons si nécessaire», a prévenu dans un discours Thomas Jordan, président de la direction générale de la BNS.

Concernant l’appréciation du franc, le garant de la stabilité monétaire demeure «disposée à être active au besoin sur le marché des changes afin de garantir des conditions de marché appropriées». La BNS pourrait donc acheter ou vendre des devises pour contrôler l’évolution de la monnaie nationale.

La hausse du taux directeur par la BNS intervient dans un contexte mondial de resserrement monétaire afin de contrer l’envolée de l’inflation. Mercredi soir, la Réserve fédérale américaine (Fed) a donné un nouveau fort tour de vis à sa politique monétaire et a averti qu’il lui faudrait resserrer encore, ce qui sera douloureux pour les ménages.

Le retour du taux directeur helvète en territoire positif était largement anticipé par les analystes et économistes. La Banque cantonale de Zurich rappelle à cet égard que la Suisse faisait figure de dernier des Mohicans sur le Vieux continent.

Epargnants au créneau

Du côté des établissements d’importance systémique, Postfinance a d’ores et déjà annoncé la suppression dès octobre des ponctions de 0,25% sur les avoirs des particuliers dépassant 100’000 francs. Grands clients et institutionnels bénéficieront même d’une adaptation immédiate dès le 23 septembre. Le bras financier du géant jaune n’a par contre pas encore établi de calendrier pour un retour à la rémunération de l’épargne.

La fondation alémanique pour la défense des consommateurs SKS considère, elle, que les conditions sont désormais réunies pour un allègement des commissions bancaires et pour un relèvement des taux d’intérêts sur les comptes d’épargne.

 

Sans la hausse des taux, l’inflation serait plus élevée

Sans le resserrement de politique monétaire effectué jeudi par la Banque nationale suisse (BNS), l’inflation aurait été encore plus importante, a indiqué le directeur de l’institut d’émission helvétique. Les risques sur la conjoncture mondiale sont élevés.

«Sans le relèvement de taux annoncé aujourd’hui, la prévision d’inflation serait nettement plus élevée», a indiqué M. Jordan, selon le texte de son discours prononcé lors d’une conférence de presse à Zurich.

S’inscrivant à 3,5% en août, «l’inflation en Suisse est certes faible en comparaison internationale, mais elle se situe toutefois nettement au-dessus de la plage comprise entre 0% et 2% que nous assimilons à la stabilité des prix», a expliqué le dirigeant.

Selon ce dernier, «les prix de l’énergie ont continué dans l’ensemble à augmenter et accroissent la pression inflationniste dans de nombreux secteurs. Le risque d’effets de second tour s’en trouve donc renforcé».

Des taux négatifs efficaces

L’appréciation du franc, qui a pris 7% depuis la précédente relevée du taux directeur mi-juin, a joué en faveur de la BNS. «Cette appréciation contribue à resserrer les conditions monétaires et à atténuer la pression inflationniste», a expliqué Thomas Jordan.

Revenant sur la longue période de taux négatifs, M. Jordan a estimé qu’ils avaient été efficaces. «Son utilité en termes de politique monétaire a été clairement supérieure à ses effets indésirables».

Concernant les perspectives économiques, le responsable a souligné que «la croissance de l’économie mondiale a nettement ralenti ces derniers mois» et devrait rester faible ces prochains trimestres. Elle est freinée notamment par la situation énergétique en Europe, par les pertes de pouvoir d’achat dues au renchérissement et par le durcissement des conditions de financement.

Mais la situation énergétique pourrait encore se détériorer, a-t-il averti. «La forte inflation pourrait se prolonger, ce qui exigerait des réponses plus vigoureuses des politiques monétaires à l’étranger. Enfin, la pandémie de Covid-19 continue de faire peser sur la croissance d’importants risques à la baisse», a énuméré M. Jordan.

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