Se focaliser sur les fondamentaux et non sur les flux à court terme

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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L'aversion au risque a été alimentée par un certain nombre de facteurs, dont la propagation de nouveaux variants du coronavirus.

© Keystone

Il y a une dizaine de jours, l'indice S&P 500 a cédé 3,3%, achevant ainsi le mois de janvier en repli de 1,1%: son plus mauvais début d'année depuis 2016. Dans le même temps, la volatilité s'est nettement accentuée: l'indice VIX a progressé de 11 à 33 points. Il faut remonter à juin 2020 pour trouver une progression hebdomadaire aussi forte. A l'époque, la deuxième vague de contaminations au Covid-19 déferlait sur les Etats-Unis.

L'aversion au risque a été alimentée par un certain nombre de facteurs, dont la propagation de nouveaux variants du coronavirus et les retards dans la distribution des vaccins. L'incertitude quant au calendrier et à l'ampleur du nouveau plan de relance budgétaire aux Etats-Unis, ainsi que l'inquiétude suscitée par les conditions de marché qui s'apparentent à une bulle spéculative ont renforcé ce sentiment.

A court terme, la dynamique de marché a encore été compliquée par l'action coordonnée de petits porteurs visant à faire grimper les cours de titres massivement vendus a découvert, avec à la clé un «short squeeze» (période pendant laquelle des investisseurs sont forcés d'acheter un titre pour couvrir une position short).

Un portefeuille diversifié de fonds long/short en actions devrait
signer une belle performance dans les mois à venir.

Point de situation sur les perspectives des marchés au terme d'une dizaine de jours mouvementée.

Volatilité: le reflet du positionnement des investisseurs

Il y a dix jours, l'indice S&P 500 a cédé 1,9% mais le rendement des bons du Trésor américain à dix ans a augmenté de 4 points de base, porté par une augmentation des points morts d'inflation et des cours des matières premières. Cette évolution ne dénote pas la crainte d'un ralentissement de la croissance. Elle reflète plutôt un repositionnement des participants au marché des actions après les fluctuations marquées de ces derniers mois. A la fin janvier, le S&P 500 était toujours en hausse de 13,6% par rapport à la fin octobre et de 66% par rapport au creux du mois de mars 2020.

Dans le même temps, les flux liés à un repositionnement ont fait les gros titres. Les achats massifs par des petits porteurs qui s'étaient concertés sur les réseaux sociaux ont engendré un «short squeeze» sur certains titres massivement vendus à découvert par des hedge funds, qui ont été obligés de couvrir leurs positions.

De nombreux investisseurs institutionnels ont ajusté leurs portefeuilles afin de tenir compte des risques que ces achats coordonnés effectués par des petits porteurs font peser sur les positions short. Néanmoins, étant donné la vitesse et l'ampleur des flux observés, la Recherche d’UBS pense que la pression est déjà en bonne partie retombée.

Privilégier un portefeuille équilibré

Dans l'ensemble, un portefeuille diversifié de fonds long/short en actions devrait signer une belle performance dans les mois à venir et le repli actuel sera certainement temporaire. Plus généralement, les récents événements confortent dans l'idée que la meilleure façon de diversifier son exposition aux hedge funds consiste à bâtir un portefeuille composé de plusieurs fonds, bien équilibré en termes de stratégies et de styles.

Il y a de belles opportunités parmi les actions émergentes, chinoises notamment,
et les petites capitalisations internationales.

En outre, même si certains titres ont ces derniers jours enregistré des fluctuations de cours difficilement justifiables au regard des fondamentaux, la rotation sectorielle plus générale qui sous-tend cette évolution se poursuit depuis l'annonce début novembre d'un premier vaccin efficace contre le Covid-19. Les investisseurs se sont détournés des bénéficiaires du confinement en 2020 au profit des valeurs restées à la traîne depuis le début de la pandémie et des pans plus cycliques du marché.

Cette tendance semble appelée à perdurer. En particulier, il y a de belles opportunités parmi les actions émergentes, chinoises notamment, et les petites capitalisations internationales, qui sont plus sensibles à la conjoncture économique que les grandes capitalisations américaines.

Endiguement de la pandémie en cours

Le nombre de cas en Afrique du Sud, aux Etats-Unis, au Royaume- Uni et en Israël commence à diminuer, soulageant ainsi la pression sur les hôpitaux. Aux Etats-Unis, les restrictions pourraient être encore assouplies dans les semaines à venir grâce à la diminution du nombre de nouveaux cas et à l'accélération de la campagne de vaccination.

Il y a deux semaines, le gouverneur de Californie Gavin Newsom a levé les mesures strictes de confinement dans les zones concernées. Il y a dix jours, le gouverneur de l'Etat de New York Andrew Cuomo a annoncé que les restaurants new-yorkais pourraient de nouveau accueillir des clients en salle à compter du 14 février.

En outre, même si le démarrage de la production des vaccins contre le Covid-19 est plus poussif que prévu, les laboratoires concernés ont relevé leurs objectifs de production sur l'ensemble de l'année. Pfizer prévoit désormais de produire 2 milliards de doses en 2021, contre 1,3 milliard auparavant. Le laboratoire américain a imputé le ralentissement des livraisons à l'Europe aux travaux visant à accroître les capacités de production de ses usines.

De son côté, Moderna table désormais sur un minimum de 600 millions de doses, contre 500 millions auparavant. En outre, les résultats de l'essai clinique de phase 3 sur le vaccin en une seule injection de Johnson & Johnson ont montré une réduction de 66% en moyenne du risque de développer une forme modérée ou grave du Covid-19. Ce taux d'efficacité est inférieur à ceux observés pour les vaccins de Pfizer/BioNTech et Moderna. Mais il convient de souligner que les cas graves ont été réduits de 85% et que le vaccin a montré une réduction de 100% des hospitalisations et des décès dans toutes les régions.

Résultats d'entreprises encourageants

52% des entreprises du S&P 500 ont publié leurs résultats relatifs au quatrième trimestre 2020 qui, dans 88% des cas, se sont avérés supérieurs aux estimations (de 20% dans l'ensemble). A l’échelle mondiale, les données économiques continuent de s'avérer nettement meilleures que prévu: l'indice Citi Global Surprise se situe à +82, contre -79 lorsque la crise du Covid-19 était à son paroxysme en avril 2020.

Jerome Powell s'est employé à rassurer les investisseurs, affirmant que toutes
ces spéculations sur la stratégie de sortie sont prématurées.

La Chine, qui a une longueur d'avance dans la reprise économique, devrait enregistrer une croissance de son PIB de 8% cette année. Aux Etats-Unis, la Recherche d’UBS table sur une croissance supérieure à 6%.

Politiques budgétaire et monétaire porteuses

Dernièrement, le président de la Réserve fédérale des Etats-Unis, Jerome Powell, s'est une nouvelle fois employé à rassurer les investisseurs, affirmant que toutes ces spéculations sur la stratégie de sortie sont prématurées. En outre, il a relativisé le risque qu'une politique monétaire extrêmement accommodante alimente les bulles spéculatives. D'après lui, les risques financiers sont «modérés».

S'agissant de la politique budgétaire, le Congrès réduira probablement quelque peu la voilure du plan de relance proposé par le président Joe Biden, évalué à 1900 milliards de dollars, et les querelles partisanes retarderont son adoption. Cependant, ce nouveau train de mesures budgétaires devrait être adopté dans les semaines à venir et l'enveloppe y afférente devrait suffire à soutenir la croissance et le rebond des bénéfices.

Par conséquent, même si le positionnement des investisseurs et les flux sont susceptibles d'accentuer la volatilité à court terme, ils ne sont pas des facteurs fondamentaux de l'évolution des marchés à moyen terme. La politique macroéconomique et les perspectives bénéficiaires, conjuguées à l'intensification des campagnes de vaccination, laissent entrevoir une poursuite de l'ascension des marchés des actions.

La Recherche d’UBS reste encline à prendre des risques et recommande aux investisseurs de profiter de la volatilité afin d’accroître leur exposition à moyen terme aux actifs risqués.

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