Un meilleur futur?

Chris Iggo, AXA Investment Managers

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De nombreux problèmes auxquels nous sommes actuellement confrontés, ne restent pas sans réponse.

  • Le risque d’une hausse permanente de l’inflation, l’insécurité concernant le taux final et le développement économique causent une certaine nervosité sur les marchés.
  • A ceci s’ajoute la fin de la mondialisation et l’instabilité du marché énergétique.
  • Toutefois, de nombreux problèmes auxquels nous sommes actuellement confrontés, ne restent pas sans réponse.
  • Tant que les évaluations restent négatives, les investisseurs devraient s’habituer à une baisse des rendements et à une éventuelle récession, pour afficher une position défensive.
Inflation durable?

Il se passe beaucoup de choses, et nous devons essayer de comprendre ce que cela signifie pour nos capitaux. Au niveau macroéconomique, l’économie mondiale va continuer à souffrir des problèmes d’approvisionnement qui ont entraîné des goulots d’étranglement au niveau des biens et de la main d’œuvre ainsi que les plus hauts taux d’inflation depuis une génération. Les entreprises sont confrontées à une hausse des coûts et de la pression sur les marges de bénéfices. Par ailleurs, elles doivent faire face à la pénurie de main d’œuvre et aux longs délais de livraison des fournisseurs sur de nombreux marchés. La politique a réagi de plusieurs manières. Les banques centrales doivent resserrer la politique monétaire car elles doivent avant tout assurer la stabilité des prix. Toutefois, elles ne l’ont plus fait depuis quelque temps car, depuis la crise financière mondiale, il s’agissait de lutter contre les premiers signes d’une déflation. Cette attitude déstabilise: les banques centrales, qui débattent sur le moment idéal et le montant correct de l’ajustement du taux, et les marchés financiers. Entre-temps, le haut niveau d’inflation risque de durer. Certes, pas à un taux de neuf pour cent, mais sans doute à trois ou quatre pour cent. Il revient donc aux marchés financiers de trouver des prix qui correspondent aux rendements et aux risques attendus. La complexité des facteurs à prendre en compte pour que ce processus fonctionne est ahurissante et tient les analystes, les économistes et autres commentateurs en haleine. Lors de l’évaluation des informations, les économistes parlent de «bruissement» et de «signaux», les bruissements étant la plupart du temps nettement plus perceptibles que les signaux. Une recherche approfondie et les analyses de qualité aident à distinguer ces deux phénomènes.

Niveaux d’instabilité

L’analyse financière continue à se concentrer sur les taux. A l’heure actuelle, nous sommes dans une phase de hausse des taux. Ceci crée plusieurs niveaux d’instabilité. Le premier niveau: Jusqu’à où vont-ils augmenter? C’est un point important car les taux d’intérêt sont utilisés pour l’escompte des flux de liquidités futurs. Cet escompte permet d’évaluer les placements financiers au jour actuel. Les marchés essaient d’estimer le niveau du taux d’intérêt final, mais ceci repose sur des pronostics et des probabilités. Le deuxième niveau d’insécurité concerne le niveau des flux de liquidités futurs. Lors de l’acquisition d’une obligation à rémunération fixe, ceci est relativement simple car les paiements de coupons sont connus. Une hausse des taux signifie que ces flux de liquidités futurs auront moins de valeur, ce qui cause une baisse des cours des obligations. Pour les actions, le calcul est plus difficile car les bénéfices futurs des entreprises dépendront principalement du développement de la croissance économique. Cette incertitude signifie aussi une hausse de la prime sur le risque afin de compenser le risque de diminution des rendements. Ceci explique la nervosité persistante des marchés. Les banques centrales demandent haut et fort des augmentations du taux, et ce processus va encore durer un certain temps. Des taux élevés signifient une augmentation du flux de liquidités pour faire face aux dettes existantes et une diminution des liquidités consacrées à la consommation et aux investissements. Certains emprunteurs risquent de ne pas pouvoir effectuer ces paiements, un risque qui a été souligné dans un rapport d’étude de la Deutsche Bank. Nous avons récemment signalé que les marchés obligataires offrent des possibilités tactiques pour augmenter l’allocation dans le secteur à rémunération fixe. Toutefois, les cours risquent de diminuer encore davantage si les taux augmentent.

Taux d’intérêt supérieurs dans la zone euro

Le message exprimé clairement par la Banque centrale européenne (BCE) concernant sa volonté d’augmenter les taux, a suscité des interrogations quant à la durabilité fiscale en Europe, ce qui explique la forte baisse disproportionnée des cours des obligations souveraines italiennes enregistrée la semaine dernière. Le marché se souvient de la politique de la BCE engagée pour soutenir les pays aux bilans plus faibles afin de minimiser le risque de fragmentation financière dans la zone euro. La politique va maintenant dans une autre direction. Ce qui implique que le risque doit de nouveau augmenter. Bien entendu, la BCE dispose de mécanismes pour réagir à ce développement (le Draghi-Put), mais sur le court terme, les obligations souveraines européennes doivent refléter les risques d’une baisse de la croissance, d’une hausse de l’inflation et de l’augmentation des coûts du crédit, et ce dans un environnement qui n’est pas prêt à apaiser les marchés avec un retour des réductions budgétaires. Actuellement, l’inflation est supérieure aux taux si bien que la valeur réelle des dettes va baisser. Mais si les taux augmentent, l’inflation et la croissance vont diminuer, et la soutenabilité de la dette va redevenir un véritable problème. Les rendements des investissements en Europe sont compromis par ces risques.

Défis ESG

Mais comme si la hausse des taux ne suffisait pas, les dirigeants politiques parlent d’une fin de la mondialisation, d’un paysage géopolitique mondial accidenté et d’un marché énergétique instable. Les effets sur les émissions de dioxyde de carbone qui augmentent de nouveau constituent un aspect important pour le marché mondial de l’énergie. Pour les investisseurs qui appliquent des stratégies de placement durables, le secteur énergétique est un défi essentiel. Autrement dit, une sous-pondération du secteur énergétique en 2022 a entraîné une sous-performance par rapport au marché. Et, ce qui est encore plus important, pour les stratégies qui se concentrent sur les émissions zéro nette, il faut contrôler soigneusement comment le marché énergétique peut se développer de manière réaliste, y compris le fait que les fournisseurs de gaz et de pétrole traditionnels doivent jouer un rôle important dans le développement de nouvelles sources d’énergie plus propres.

Un meilleur futur?

L’année va être difficile. Mais le futur pourra être meilleur. La technologie se développe sans cesse pour soutenir cette transition. La participation au marché du travail peut de nouveau augmenter si le retour devient plus attrayant et si les gouvernements reconnaissent qu’il est préférable de laisser le marché se charger des emplois plutôt que d’introduire des mesures motivées par une politique nationaliste, affichant une volonté commerciale protectionniste «Obtenir des emplois pour (veuillez indiquer la nationalité)». Les plus optimistes pensent à l’avenir qui nous attend si nous réussissons la transition énergétique. Le soleil et le vent peuvent remplacer le pétrole, le gaz et le charbon. Nous disposons des compétences nécessaires et le faisons déjà. Mais nous devons largement étendre les plans. Ceci exige une hausse des prix du carbone et des dépenses budgétaires pour l’infrastructure. Au final, nous aurons un système énergétique global plus propre, plus démocratique et, il faut l'espérer, un système politique mondial dans lequel le contrôle des ressources énergétiques ne servira pas d’arme pour des raisons politiques dignes du Moyen-Age.

Forces du marché

Les investisseurs ne peuvent pas contrôler les marchés ou les rendements qu’ils obtiennent. Mais partons du principe que de nombreux problèmes auxquels l’économie mondiale est actuellement confrontée, ne restent pas sans réponse. Le prix à payer pourrait être une baisse des rendements et une récession. Tant que les évaluations ne sont pas plus intéressantes, ce qui de toute évidence, sera bientôt le cas, les investisseurs devraient réagir avec une orientation défensive de leurs portefeuilles de placement. Ces temps vont arriver et dans un ou deux ans, l’inflation diminuera, les taux n’augmenteront plus et les investissements dans les entreprises vont de nouveau apporter de hauts rendements.

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