Turbulences

César Pérez Ruiz, Pictet Wealth Management

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Les banques centrales inquiètent les marchés. La BCE confrontée à un test de crédibilité. Les projets de développement durable sont financés.

Le relèvement de 50 pb des taux de la Fed, la semaine dernière, était largement anticipé. La déclaration de son président, Jerome Powell, selon laquelle une hausse de 75 pb n’avait pas été réellement envisagée, a même déclenché une hausse des marchés actions. Mais celle-ci a été brève et les craintes inflationnistes ont rapidement repris le dessus. Alors que le marché du travail américain reste tendu et que l’inflation dépasse nettement l’augmentation des salaires (l’indice des prix à la consommation a progressé de 8,5% en rythme annuel en mars, un pic de quatre décennies, contre une hausse de 5,5% du salaire horaire moyen en avril), les marchés redoutent la formation d’une spirale inflationniste salaires-prix, dans un contexte où l’augmentation du crédit reste forte aux Etats-Unis et où les consommateurs disposent encore d’une bonne partie de l’épargne accumulée pendant la pandémie. Les marchés préférant que la menace inflationniste soit éliminée au plus vite, ils ont fait le travail de la Fed en propulsant les rendements obligataires à la hausse, ce qui a notamment pénalisé les valeurs de croissance.

La semaine dernière, d’autres banques centrales ont aussi durci leur politique pour lutter contre une inflation persistante. La Banque centrale du Brésil et la Banque d’Angleterre ont ainsi relevé leurs taux directeurs, tout comme (de manière plus inattendue) les banques centrales australienne et indienne. Le relèvement de 25 pb de la Banque d’Angleterre (BoE) s’est accompagné d’anticipations plutôt sombres. Selon ses responsables, l’inflation pourrait en effet atteindre un pic supérieur à 10% (en rythme annuel) en octobre, tandis que l’économie britannique devrait se contracter dans les mois à venir. Tout comme en Europe de l’Est (même si le président russe Vladimir Poutine n’a pas déclaré officiellement la guerre à l’Ukraine dans son discours de commémoration du Jour de la Victoire), les tensions se renforcent aux confins occidentaux du continent. Après l’émergence du Scottish National Party, le triomphe des nationalistes du Sinn Féin aux élections en Irlande du Nord alimente les spéculations sur l’éclatement du Royaume-Uni. Dans ce contexte, comment se positionne la Banque centrale européenne? Certains de ses responsables ont clairement indiqué que le taux des dépôts pourrait être relevé dès le mois de juillet. Certains pays sont cependant plus vulnérables aux hausses de taux, à l’instar de l’Italie, dont les spreads ont atteint 200 pb la semaine dernière. La manière dont la BCE soutiendra les pays subissant des coûts de financement plus élevés constituera un test important de sa crédibilité, sachant qu’elle s’apprête à réduire ses achats nets d’obligations d’Etat.

La BCE pourrait néanmoins avoir la volonté d’agir vite pour éviter de relever ses taux dans un environnement économique bien plus défavorable en fin d’année. Dans l’intervalle, nous continuons de sous-pondérer les emprunts d’Etat européens.

Dans l’ensemble, la volatilité reste élevée sur les marchés actions et obligations. Cependant, malgré les inquiétudes, les résultats du premier trimestre ont été globalement satisfaisants. Sans abdiquer face à un environnement plus difficile, les investisseurs avisés continuent de financer certaines initiatives. En parfaite adéquation avec notre thème de la durabilité, un fonds climatique très médiatisé a ainsi levé la semaine dernière USD 7,5 milliards.

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