Quels relais de performance pour le second semestre?

Philippe Ferreira, Kepler Cheuvreux Solutions

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Le score des marchés actions depuis le début de l’année laisse peu de potentiel haussier sur le reste de l’année. Les investisseurs vont devoir sortir des sentiers battus pour créer de la valeur.

Le rebond des actions depuis le début de l’année est spectaculaire, d’autant plus qu’il était largement inattendu. Le S&P 500 est en hausse de 20% avant dividendes à fin juillet alors que le Nasdaq enregistre un rebond de 44%! La hausse des actions européennes est plus modérée, mais toujours à deux chiffres depuis le début de l’année (+11%) et cela après une belle surperformance en 2022.

Regarder dans le rétroviseur est toujours utile, ne serait-ce que pour faire son mea culpa. En anglais on parle de «forecast error» sans que le mot «error» ne fasse référence à une erreur mais plutôt à la composante imprévisible d’une observation. En l’occurrence, nous avons été positifs sur les actions depuis le début de l’année, en relatif au consensus, et la performance de notre allocation d’actifs dépasse largement ses pairs à +7% fin juillet.

Mais comme toujours, la question clé qui anime les investisseurs n’est pas de comprendre ce qui s’est passé mais d’anticiper ce qui va se passer. Exercice futile diront certains puisque les boules de cristal n’existent pas. Pour autant, tout le monde prend un pari sur l’avenir: l’entrepreneur qui crée con entreprise et le chef d’entreprise qui investi pour augmenter ses capacités de production font un pari sur l’avenir de la même manière que l’investisseur, qui se positionne par rapport à des rendements attendus. Et c’est là où le mat blesse. La performance des marchés actions depuis le début de l’année laisse peu de potentiel haussier sur le reste de l’année. En d’autres mots, les «expected returns» sont faibles. Nous avons déjà atteint notre cible de fin d’année pour le S&P 500 en ce début août.

Il y a une asymétrie des risques qui milite pour un peu plus de prudence, même si on a déjà vu des années où les actions progressent de 25-30%.

Si l’on s’en tient à ces considérations, il va falloir chercher d’autres moteurs de performance que les actions pour créer de la valeur pendant le reste de l’année. En tous cas, face à l’incertitude qui est une constante sur les marchés financiers, il y a plus de risques de déceptions après un rebond que de risques de surprises. Il y a donc une asymétrie des risques qui milite pour un peu plus de prudence, même si on a déjà vu des années où les actions progressent de 25-30% et pas plus loin qu’en 2019 et 2021 pour le MSCI World.

Quels sont donc les relais de performance sur lesquels le couple rendement/ risque est intéressant de notre point de vue?

  • Tout d’abord, avec des taux élevés il y a aujourd’hui de nombreuses opportunités dans le crédit et le fixed income. Les taux 10 ans américains à 4% sont une option de repli pour réduire le risque dans les portefeuilles, d’autant plus que l’inflation est en train de retomber assez vite et que les banques centrales sont en train d’assouplir leur position. Pour des investisseurs en euro, le crédit investment grade, délivre aussi 4% hors financières. Allonger la duration sur des émetteurs de qualité, prendre un peu de risque de crédit sur les «corporate hybrids» et les Tier 2 bancaires, ou faire le pari de la pentification des courbes de taux est une autre façon de jouer des banques centrales qui seront désormais moins agressives alors que le risque de récession (et donc le risque de crédit) reste limité de notre point de vue.
  • Du côté des devises, la dépréciation du dollar au cours des derniers mois offre aussi des points d’entrée sur la devise directement (USD contre EUR) ou sur des actifs libellés en dollar partiellement couverts en change. La dynamique économique est moins porteuse en zone euro qu’aux Etats-Unis et la BCE devra en tenir compte dans ses décisions futures, ce qui est baissier EURUSD. Aussi, le rebond du GBP contre Euro nous semble avoir davantage de potentiel alors que le différentiel d’inflation milite pour une banque d’Angleterre qui restera relativement plus «hawkish» que la Fed/ BCE.
  • Enfin, au sein des actions, les émergents et la Chine qui ont pris du retard sur les pays développés ont du potentiel de surperformance alors que la Chine envisage de mettre davantage de moyens pour soutenir le marché immobilier. Toutefois, cette vue sur les marchés émergents ne peut fonctionner que si les actions des pays développés sont étales, ce qui est notre vue. Dans un mouvement baissier dans les pays développés, les actions des pays émergents peuvent difficilement être décorrélées. Et attention au risque de change sur les devises émergentes.

En conclusion, il y a de nombreuses options de repli à l’heure actuelle pour se diversifier vis-à-vis des actions qui ont délivré des performances époustouflantes depuis le début de l’année. Les marchés sont par nature volatils et le mois d’août n’est pas favorable historiquement du point de vue de la saisonnalité en ce qui concerne les actions européennes. Si d’un point de vue stratégique nous restons confiants sur l’absence de récession sévère, les rendements attendus pour les actions sont faibles pour le restant de l’année.

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