Que changeront les élections américaines?

Antti Tilkanen, Bruellan

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Pour dénicher les meilleures idées d'investissement aux États-Unis, mieux vaut ne pas se focaliser sur la Maison Blanche.

Premier constat, d’ordre général: l’accession de Joe Biden à la présidence des États-Unis est contrebalancée par la majorité, très probablement, conservée par les Républicains au Sénat, tandis que les Démocrates contrôlent toujours la Chambre des représentants. Cette configuration devrait limiter la portée des changements à venir, l’adoption de projets de loi majeurs requérant de facto le soutien des deux partis.

Cela étant, au cours des prochaines années, les résultats de ces élections auront quelques implications intéressantes. Du point de vue des marchés financiers, le contexte devrait être plutôt porteur dans la mesure où la proposition de Joe Biden d’annuler les baisses d’impôt accordées en 2017 aux entreprises, en relevant le taux d'imposition légal de 21% à 28%, a peu de chances d'être mise en œuvre. Un constat qui vaut également pour la taxation des plus-values. Deuxièmement, les Républicains exerceront un contrôle sur l’ampleur des futurs programmes de relance, et sur l’évolution du déficit budgétaire – déjà bien lourd. La politique monétaire est donc appelée à rester laxiste.

Dans le même temps, l'approche plus traditionnelle et multilatérale de Joe Biden en matière de politique étrangère et de commerce atténue les risques. L’opinion américaine à l'égard des pratiques commerciales de la Chine n’est certes pas propre aux républicains, mais le remplacement des guerres tarifaires par des mesures moins perturbatrices augure d’une désescalade des tensions et d’un environnement commercial plus prévisible.

Sans majorité démocrate au Sénat, il n'y aura pas
de transformation du système de santé américain.

Même s’il est encore tôt pour se prononcer sur les impacts sectoriels spécifiques, quelques lignes directrices peuvent déjà être mentionnées. Les secteurs de la santé et de la défense font généralement l’objet de beaucoup d’attention mais, cette fois-ci, le changement de locataire à la Maison Blanche ne devrait pas trop les affecter. Quant aux risques réglementaires pour les entreprises actives dans la communication et la technologie, ils n'augmentent pas non plus de manière significative.

Sans majorité démocrate au Sénat, il n'y aura pas de transformation du système de santé américain. Les moteurs structurels restent en place, et les pressions sur les prix auxquelles sont déjà confrontés les sociétés pharmaceutiques, les gestionnaires de régimes d’assurance médicaments (PBM) ou les hôpitaux vont, au mieux, évoluer progressivement. Ces pressions persisteront toutefois et le régime actuel ne modifie pas suffisamment la donne pour en faire une idée d'investissement très solide.

A mesure que le mouvement vers des énergies propres se renforce, les investissements, la production et la distribution d'énergie changent. Le plan climatique de Joe Biden, d'un montant de 1’700 milliards d'euros, fournit quelques orientations et accélèrera le processus. Il ne sera pas mis en œuvre dans sa totalité, mais la reconnaissance des questions climatiques est aujourd’hui aussi mieux partagée du côté républicain. Dans l'ensemble, la transition énergétique n'est pas bouleversée par ces élections, mais les investissements seront un peu plus rapides. Ce qui explique les bonnes performances boursières cette année des entreprises actives dans le domaine du renouvelable, de pair avec les sondages prédisant une victoire démocrate. Les normes et réglementations au niveau fédéral devraient faciliter les choses, même s’il est peu probable de voir le Congrès adopter un programme d’infrastructure énergétique de grande ampleur.

Les questions politiques ont tendance à attirer
trop d'attention par rapport à leurs effets réels.

L'administration Trump a démantelé les réglementations sur les combustibles fossiles et l'efficacité énergétique, une tendance qui s’inverse désormais. Sans être optimaux pour les énergies renouvelables, les résultats de ces élections mettent globalement l’énergie propre, plutôt que l'indépendance énergétique, en priorité première.

Si l'on se réfère aux attentes du consensus lors des précédentes élections, on constate que l’impact du président sur les marchés est largement surestimé. Les questions politiques plus généralement ont tendance à attirer trop d'attention par rapport à leurs effets réels, peut-être parce qu'elles consistent en des narratifs simples et des événements spécifiques faciles à suivre. A titre d’exemple, les secteurs de l'énergie, des matières premières et de la finance étaient censés bénéficier de la victoire surprise de Donald Trump en 2016 et de la déréglementation qui s’ensuivrait. Ils ont surperformé très brièvement, car cette victoire n’était pas complètement intégrée dans les cours, mais terminent ses quatre années de présidence dans le bas du tableau des performances sectorielles. Pour dénicher les meilleures idées d'investissement aux États-Unis, mieux vaut ne pas se focaliser sur la Maison Blanche. Cette fois-ci, l’impact boursier haussier s’avère encore plus modeste et limité dans le temps et, à horizon quatre ans, les meilleures (et pires) performances auront peu à voir avec des considérations politiques.

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