Lonza, un succès qui ne date pas d’aujourd’hui

Anick Baud, Bruellan

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Meilleure performance annuelle du SMI (+62%) et plus forte progression sur 10 ans (+600%). Retour sur un succès qui s’est construit dans la durée.

Après plus de quatre mois de rebond, la spectaculaire baisse de février et mars a pratiquement été intégralement effacée sur le marché suisse (-2.5% YTD sur le SPI). Si l’ensemble des actions suisses a ainsi récupéré du terrain, la situation est par contre bien contrastée d’un titre à l’autre. En effet, la moitié des quelques 200 sociétés composant le SPI se trouve encore en territoire négatif, alors même que certaines entreprises ont vu leur cours progresser de manière insolente et sont aujourd’hui à leur plus haut niveau historique. Parmi celles-ci, on trouve le spécialiste chimique et pharmaceutique Lonza. Non content de réaliser la meilleure performance annuelle (+62%) de l’indice regroupant les 20 plus grosses capitalisations suisses (SMI), devançant même de près de 40% le deuxième, Givaudan, elle figure également en première place du SMI si on prend la performance de ces dix dernières années (+600% sur 10 ans). L’accord de partenariat avec l’entreprise américaine Moderna qui, rappelons-le, est la plus avancée dans la course au vaccin contre le COVID-19, n’est sans doute pas étranger à ce succès, mais cette formidable progression s’inscrit aussi dans la lente transformation du groupe qui s’est accélérée ces quinze dernières années et qui devrait se terminer avec la vente de ses activités historiques probablement d’ici la fin de l’année.

Retour sur ce succès

Pour beaucoup et pendant longtemps, le groupe né en Valais à la fin du dix-neuvième siècle a surtout été synonyme de pollution au mercure des eaux environnants Viège. Aujourd’hui, ces problèmes sont heureusement pratiquement résolus et Lonza n’a plus grand-chose à voir avec la société qu’elle était dans les années 1970, lorsque qu’elle fut rachetée par Alusuisse, ni avec celle qu’elle était à la fin des années 1990, au moment de sa séparation d’Algroup, quand ce dernier a fusionné avec Alcan et Pechiney.

Lonza est devenu un leader dans la fabrication de médicaments
et de principes actifs pour l’industrie pharmaceutique et biotechnologique.

Le groupe suisse qui emploie 15’500 personnes à travers le monde et a réalisé un chiffre d’affaires de 6 milliards l’an dernier, a en effet opéré dès 1992 un virage stratégique majeur, grâce à des acquisitions particulièrement judicieuses.

D’une entreprise spécialisée dans la production d’ingrédients chimiques utilisés dans le contrôle microbien, la désinfection, la protection de matériaux ou comme additifs alimentaires, Lonza est devenu un leader dans la fabrication de médicaments et de principes actifs pour l’industrie pharmaceutique et biotechnologique. Cette division représente d’ailleurs 75% de ses ventes et pratiquement 85% de son bénéfice opérationnel. Le groupe est devenu un acteur incontournable de l’industrie de la santé, pour qui la sous-traitance de la fabrication des médicaments présente de nombreux avantages, notamment l’amélioration de la qualité et la rapidité de mise sur le marché.

Preuve de l’importance de Lonza dans ce domaine, sur les quelques 500 médicaments, vaccins ou traitements actuellement à l’étude pour lutter contre le coronavirus, elle a été approchée pour 150 d’entre eux. L’entreprise a refusé de participer à la grande majorité d’entre eux, donnant la priorité à Moderna d’une part, mais également à une poignée d’autres études qui paraissent en bonne voie mais sur lesquelles elle ne peut communiquer pour l’instant.

Logiquement, l’évolution du cours des titres de la société a pris l’ascenseur lorsque Moderna a annoncé, en mai, qu’elle l’avait choisie pour fabriquer le principe actif d’un milliard de doses de vaccins dans ses usines de Portland (USA) et de Viège.

Tout comme il y a 20 ans les sociétés pharmaceutiques ont toutes
vendu leur activité chimique pour devenir de «pure players».

Mais un autre élément important a retenu l’attention, et la faveur, des investisseurs. Le management du groupe a en effet confirmé en juillet, au moment de la publication des résultats, ce que le marché appelait de ses vœux depuis longtemps, à savoir la vente de son activité chimique d’ici la fin de l’année.

Tout comme il y a 20 ans les sociétés pharmaceutiques ont toutes vendu leur activité chimique pour devenir de «pure players», Lonza entend ainsi se concentrer sur son activité la plus rentable et la plus visible. D’après Albert Baehny, président du conseil d’administration, plusieurs acheteurs potentiels, industriels ou financiers, ont déjà manifesté leur intérêt. La vente pourrait rapporter 4 milliards de francs suisses selon certains spécialistes. Cette manne serait bien entendu utilisée pour renforcer la stratégie d’expansion menée activement depuis 15 ans mais pourrait aussi servir à payer un dividende spécial l’an prochain.

Il est vrai que la récente performance du groupe, ainsi que sa valorisation, ne font pas de Lonza ce que l’on appelle «une affaire». Néanmoins, pour les actionnaires existants, cette performance est la confirmation de la réussite de la stratégie suivie et pour les futurs investisseurs, la récente nomination à la tête de l’entreprise de l’ancien responsable de la fabrication et de la commercialisation des médicaments chez Roche devrait fournir la preuve que le groupe va continuer à jouer un rôle essentiel et déterminant dans le secteur de la santé et que le potentiel de long terme n’est sans doute pas épuisé.

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