La Suisse à la pointe des medtechs

Anick Baud, Bruellan

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En cette période où la livraison de matériel médical a été critique et urgente, l’UE a réalisé que la Suisse était un partenaire de choix.

L’industrie pharmaceutique est sans conteste l’un des piliers de l’économie suisse puisqu’elle représente plus d’un tiers des exportations et comprend deux des plus importantes entreprises du secteur au monde, à savoir Roche et Novartis. Ce que l’on sait moins en revanche c’est que la spécialisation de l’économie suisse dans la pharmaceutique couplée à une autre activité traditionnelle hélvetique a permis l’émergence d’un secteur particulièrement dynamique et qui connait une très forte croissance, celui des technologies médicales ou «medtechs».

Cette émanation du secteur pharmaceutique, qui est relativement jeune puisqu’elle s’est développée dans les années quatre-vingt, couvre une vaste gamme de dispositifs médicaux de pointe qui nécessite un important savoir-faire tant au niveau de leur développement, que de leur fabrication. Il s’agit aussi bien de prothèses orthopédiques (Medacta), que d’appareils auditifs (Sonova), de pompes à insulines (Ypsomed), que d’éléments de fixation osseux (Medartis), de plateformes de diagnostiques (Tecan) ou de respirateurs artificiels (Hamilton Medical) et bien évidemment d’implants dentaires (Straumann). Cette branche, bien que récente, occupe une place de premier ordre dans l’économie suisse puisque non seulement elle emploie 60'000 personnes mais elle représente près de 2,5% de son PIB et 5% de ses exportations avec plus de 1’400 entreprises qui y sont actives. En termes de nombre de brevets déposés auprès de l’Office Européens des Brevets, la Suisse est même le 3e pays le plus actif, derrière l’Allemagne et les Pays-Bas.

Beaucoup de sociétés de technologies médicales
étaient à l’origine des sous-traitants de l’industrie horlogère.

Le dynamisme exceptionnel et le savoir-faire de la Suisse dans le domaine des technologies médicales provient donc notamment de la vitalité de son secteur pharmaceutique et de l’émulation qui en découle, par un cadre réglementaire particulièrement propice à la recherche et à l’innovation mais aussi par la qualité et le coût élevé de son système de santé. Il existe cependant une autre raison qui s’inscrit directement dans l’histoire industrielle helvétique. En effet, beaucoup de ces sociétés étaient à l’origine des sous-traitants de l’industrie horlogère, preuve en est la localisation d’un grand nombre d’entre elles dans l’arc jurassien et bâlois. Quand le secteur horloger a connu une période difficile dans les années 1980, certains sous-traitants qui avaient l’avantage d’être spécialisés dans la production de haute précision et de grande qualité et dans la réalisation de séries limitées ont trouvé un débouché naturel vers une branche qui offrait des perspectives bien plus attrayantes. Elles ont ainsi commencé à collaborer avec des institutions de recherches médicales et la réunion de leurs différentes connaissances (médicales d’une part et technologie de précision d’autre part) a abouti à la naissance de ces nouveaux acteurs de pointe.

Un excellent exemple de cette mue réussie est l’entreprise bâloise Straumann. Crée dans les années cinquante, le groupe fabriquait à l’origine des bandes laminées pour l’industrie horlogère, il a rapidement utilisé son savoir-faire pour développer des produits d’ostéosynthèse (éléments de fixation osseux), puis des implants dentaires, jusqu’à devenir le numéro un mondial dans cette dernière activité.

Souhaitons que les négociations commerciales pourront
se poursuivre entre la Suisse et l’UE sous un jour nouveau.

L’an dernier pourtant, quand l’UE a annoncé un changement dans la réglementation sur les dispositifs médicaux pour mai 2020, complexifiant ainsi l’exportation d’appareils médicaux vers l’UE et désavantageant de fait les entreprises suisses face à leurs compétiteurs européens, ces dernières ont pris peur et envisagé leur avenir proche de manière plus sombre. Mais, effet inattendu de la crise du coronavirus, l’UE a été forcée d’appliquer un moratoire d’une année sur l’application de ce règlement. Il semble en effet que dans cette période où les besoins en matériel médical ont été importants et leur livraison urgente, l’UE ait réalisé que la Suisse pouvait être un partenaire fiable et privilégié. De plus, les produits médicaux suisses représentent 4,1% du chiffre d'affaires commercial sur l'ensemble du marché intérieur de l'UE, ce qui n’est pas négligeable. Souhaitons dès lors que les négociations commerciales pourront se poursuivre entre la Suisse et l’UE sous un jour nouveau et que cette réglementation sur les dispositifs médicaux pourra être assouplie.

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