Les nouvelles stars européennes de la croissance

Chris Davies, Baillie Gifford

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L’Europe regorge de petites et moyennes entreprises innovantes; très intéressantes pour les investisseurs actifs.

Jusqu’à très récemment en Europe, la honte de l'échec tendait à décourager la prise de risques. Et parce que les investisseurs ne toléraient pas les pertes initiales souvent inéluctables avant la montée en puissance des entreprises, les «tech» européennes ont peiné à se développer. Mais cette situation a changé. De Barcelone à Paris, d'Amsterdam à Vilnius, les entreprises innovantes ont établi les bases de leur propre succès. Des européennes telles que Delivery Hero (livraison de repas et courses à domicile) ou Adyen (plateforme de paiements en ligne) ont atteint une envergure internationale et leurs fondateurs sont devenus les mentors d’une nouvelle génération de dirigeants.

L’Europe ne manque pas de petites et moyennes capitalisations exceptionnelles, notamment dans le secteur industriel ou le B2B. Cependant, la tendance à associer succès et très grande taille (à l’image d’Amazon aux Etats-Unis ou de Tencent en Chine) amène à négliger les entités plus petites. Pourtant, pour l’investisseur éclairé et actif, ce secteur des petites moyennes capitalisations regorge d’opportunités. Les exemples qui suivent en témoignent.

L’Europe, où ce processus d’intégration vertical ne fait que démarrer, représente un marché dont la croissance pourrait être encore plus soutenue.

L’entreprise helvétique Crispr Therapeutics est née à la suite d’une découverte faite en 2011 par Emmanuelle Charpentier, sa cofondatrice, et par Jennifer Doudna. Ce duo, qui s’est vu attribuer le prix Nobel de chimie 2020, a découvert un moyen de «modifier» les gènes défectueux à l'origine de diverses maladies. Cette technique, appelée Crispr-Cas9, est la première à modifier le gène de manière permanente, ce qui rend les traitements ultérieurs inutiles. Elle est également plus rapide, moins chère, plus précise et plus efficace que les autres thérapies géniques existantes.

Les implications de cette découverte sont considérables. Crispr Therapeutics a mis au point un traitement contre la drépanocytose, une maladie génétique qui affecte des millions de personnes dans le monde. Cette pathologie étant bien comprise, elle représente un bon terrain d'expérimentation et les essais sur les patients sont prometteurs. L'entreprise pourrait donc appliquer Crispr-Cas9 à de nombreuses autres pathologies.

Un deuxième exemple est l’entreprise néerlandaise Topicus.com, qui crée, gère ou achète des entreprises spécialisées dans la fourniture de solutions logicielles destinées à d’autres entreprises ou au secteur public. Ces solutions vont de la gestion de la disponibilité des lits d'hôpitaux ou des rendez-vous chez le médecin à la rationalisation des processus comptables pour les spas, les clubs de golf ou les instituts de beauté.

Les niches de ce type se comptant par centaines, Topicus acquiert ces fournisseurs de logiciels, améliore leur processus opérationnel, réduit leurs coûts et se rémunère sur leurs revenus récurrents. Cette approche s'est avérée remarquablement profitable pour Constellation Software, entreprise canadienne active en Amérique du Nord et dont Topicus est issue. L’Europe, où ce processus d’intégration vertical ne fait que démarrer, représente un marché dont la croissance pourrait être encore plus soutenue. A l’heure actuelle, Topicus (Pays-Bas), qui bénéficie de la longue expérience de son actionnaire principal Constellation, couvre 23 secteurs représentant 136 entreprises et un total de 44’500 clients.

L’entreprise allemande à l’origine de la «Toniebox» pourrait aisément doubler sa valeur ces cinq prochaines années.

Le troisième et dernier exemple concerne l’entreprise allemande à l’origine de la «Toniebox». Cette boîte à histoires a été développée par deux pères déçus de l’offre proposée à leurs jeunes enfants. Lorsqu’on place une figurine, le «Tonie» sur la boîte, cette dernière peut diffuser des histoires, des berceuses ou d’autres musiques. Les fondateurs ont créé eux-mêmes certaines figurines, tandis que d'autres font l’objet de contrats de licence (Gruffalo, Peppa Pig et Barbie). Ce modèle d’affaire de type «rasoirs et lames de rasoir» est intéressant puisqu’il consiste à vendre un appareil puis à s’assurer des revenus réguliers grâce à la vente ultérieure de consommables.

En avril 2022, Tonies avait déjà vendu plus de 4 millions de boîtes et 50 millions de figurines. A mesure que les enfants grandissent, ils demandent des contenus différents, et la liste des figurines et des contenus disponibles ne cesse de s’allonger, ce qui maintient l’intérêt pour le produit. L’activité de l’entreprise pourrait donc évoluer de diverses manières, notamment en concluant des accords de licence selon lesquels n’importe quel autre jouet pourrait être «tonifié» en y intégrant une puce qui lui permettrait alors de distribuer du contenu.

L’entreprise étant encore jeune, elle pourrait aisément doubler sa valeur ces cinq prochaines années. Visant initialement les pays germanophones, elle s’est étendue ailleurs en Europe. Mais ce sont les Etats-Unis qui représentent le plus gros potentiel et la direction de Tonies a fait de grands progrès dans sa démarche effectuée en vue de pénétrer ce marché.

Comme le montrent ces différents exemples, il n’est pas nécessaire de se tourner vers les Etats-Unis ou la Chine pour trouver de la créativité sur le plan de la technologie, car l’Europe regorge de petites et moyennes entreprises innovantes et très intéressantes pour les investisseurs actifs.

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