Les marchés entrent en phase de consolidation

Philipp Bärtschi, J. Safra Sarasin Asset Management

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Selon ses dernières prévisions, la Banque mondiale prévoit une croissance économique de 5,6% cette année, soit le taux le plus élevé depuis 80 ans.

Perspective macroéconomique – Un environnement conjoncturel robuste

Malgré les  difficultés liées à la COVID, l’économie mondiale s’est nettement redressée depuis le début de l’année. Au deuxième trimestre, la croissance économique s’est encore accélérée grâce aux progrès significatifs de la vaccination, surtout dans les pays industrialisés. Sur ce plan, les régions émergentes ont encore du retard. Mais là aussi, des améliorations sensibles peuvent être observées et de nouveaux progrès devraient être réalisés dans les mois à venir. Selon ses dernières prévisions, la Banque mondiale prévoit désormais une croissance économique mondiale de 5,6% cette année, soit le taux le plus élevé depuis 80 ans.

Toutefois, malgré la solidité de l’environnement actuel de croissance, ces dernières semaines, de plus en plus de signes indiquent que la reprise économique a déjà culminé. Bien que les indices des directeurs d’achats européens aient une nouvelle fois réservé de bonnes surprises en juin, la dynamique s’est considérablement ralentie ces derniers temps. C’est le cas en particulier des États-Unis, dont les données macroéconomiques ont été plutôt mitigées ces dernières semaines.

Les indices des directeurs d'achat ont également fait apparaître la forte hausse des composantes de prix, qui indique une nette augmentation de la pression inflationniste. À ce titre, la Réserve fédérale américaine a envisagé pour la première fois, lors de la réunion de juin du Comité fédéral de politique monétaire (FOMC), la possibilité que la hausse de l'inflation soit plus élevée et, à certains égards, plus durable que prévu. Treize des 18 membres du FOMC sont désormais favorables à au moins une hausse des taux d’intérêt d’ici fin 2023, soit deux fois plus qu’il y a trois mois.

Un environnement économique robuste mais une dynamique qui s’essouffle

Source: Refinitiv, J. Safra Sarasin, données mensuelles, juillet 2018 à juin 2021, Momentum = moyenne sur 3 mois moins moyenne sur 12 mois
Obligations – Aplatissement de la courbe des taux

Alors que le rendement des emprunts d’État américains à 10 ans est tombé sous 1,3%, les rendements à court terme ont nettement augmenté en réaction au changement de stratégie de communication de la banque centrale américaine. La structure de la courbe des taux américains s’est ainsi nettement aplatie. Ceci est logique dans la mesure où la partie courte de la courbe se déplace naturellement vers le haut lorsque la banque centrale fait miroiter des hausses de taux d’intérêt dans un avenir proche, tandis que la partie longue, qui intègre les anticipations d'inflation à moyen terme, a tendance à baisser dans la perspective d’un contrôle plus strict de l’inflation.

Les obligations investment grade offrent peu de compensation contre le risque

Source: Banque J. Safra Sarasin, État: 30.6.2021, OAS = Option adjusted spread

Depuis la récente baisse des taux d’intérêt, les obligations investment grade nous semblent peu attractives. Les primes de risque de crédit sur ce segment sont proches des plus bas, avec une duration relativement longue. Les obligations à haut rendement et celles des marchés émergents de plus courte échéance sont plus attrayantes à cet égard et restent soutenues par le maintien d’un environnement de croissance robuste. L’endettement des entreprises s’est encore amélioré, ce qui se traduit aussi par un nombre nettement plus élevé de rehaussements que de dégradations des notes de crédit des entreprises par les agences de notation. En outre, les taux de défaut attendus sur le segment du haut rendement pour 2021 sont à leur plus bas niveau depuis 2011.

Actions – Pause dans les opérations de reflation

Le durcissement de ton de la banque centrale américaine en juin  a entraîné une hausse de l’incertitude quant à un retour potentiel des opérations misant sur la reflation. Les courbes de taux d’intérêt se sont aplaties, les anticipations d’inflation ont diminué, les titres cycliques et value ont nettement sous-performé les valeurs de croissance, les matières premières ont été sous pression et le dollar américain s’est apprécié. Dans ce contexte, les investisseurs ont légèrement réduit leur allocation aux actions récemment et pris des bénéfices sur les segments qui avaient particulièrement bénéficié de l’environnement de reflation. Cela signifie-t-il que les tendances établies depuis novembre dernier ont touché à leur fin? Pas nécessairement. Il s’agit davantage d’une phase de consolidation. L’inflation, qui évoluait nettement dans une direction depuis l’été dernier, repart désormais en arrière. La communication de la Réserve fédérale américaine, qui est davantage axée sur les risques d'inflation et la lutte contre celle-ci, a récemment soutenu ce mouvement. Reste à savoir jusqu’à quel point le recul ira, voir  si l’inflation repartira dans l’autre sens. Dans notre scénario central, nous supposons que la croissance et l’inflation resteront supérieures à la tendance pendant plusieurs trimestres. Le retour des opérations de reflation motivées par la hausse des taux d’intérêt n’est donc qu’une question de temps.

Allocation d’actifs – L‘environnement de  risque reste  prometteur Si nous avons pris des bénéfices sur les actions au deuxième trimestre, nous continuons de légèrement surpondérer la classe d’actifs dans nos portefeuilles mixtes. La solidité de l’environnement conjoncturel – malgré le tassement de la croissance – et l’abondance de liquidités continuent de soutenir la classe d’actifs. Au niveau régional, nous privilégions les actions des pays émergents, qui recèlent encore un potentiel de rattrapage. Au second semestre, la reprise cyclique devrait être plus marquée dans les pays émergents qu’aux États-Unis. En Chine surtout, nous observons des premiers signes de stabilisation de la croissance, lapays émergents qu’aux États-Unis. En Chine surtout, nous observons des premiers signes de stabilisation de la croissance, laquelle devrait de nouveau accélérer vers la fin de l'année.

Nous continuons de sous-pondérer les obligations investment grade et les emprunts d’État. Nous surpondérons toujours les obligations des marchés émergents et le haut rendement malgré le net recul des primes de risque de crédit. Les fondamentaux des entreprises et la quête de rendement devraient continuer de soutenir la classe d’actifs au cours des prochains mois. Comme nous supposons que les rendements devraient légèrement augmenter jusqu’à la fin de l’année, nous privilégions les segments à duration plus courte au sein de la classe d’actifs, d’où une sous-pondération des emprunts d’État des pays émergents et une surpondération des obligations d’entreprises des marchés émergents et des émissions des pays émergents en monnaie locale.

Nous continuons de surpondérer les placements alternatifs. Nous privilégions, en raison de leurs atouts de diversification, les placements aussi peu corrélés que possible aux obligations et aux actions, comme les obligations liées aux catastrophes, dont les performances sont très robustes tout au long du cycle économique et dans divers environnements d’inflation et de taux d’intérêt.

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